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Migrations burkinabè : Un capital humain et moral à consolider

Publié le lundi 24 juillet 2006 à 10h31min

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Les Burkinabè, contrairement à d’autres Africains, n’ont pas un goût prononcé pour l’aventure. Autrement dit, le grand large. Cette assertion est confirmée par l’ambassadeur de France au Burkina. En effet, dans une interview accordée aux Editions "Le Pays", le diplomate français a reconnu que "les Burkinabè ne voyagent pas beaucoup", et qu’il a "la chance d’être dans un pays où il n’y a pas de flux migratoire important".

En conclusion, Francis Blondet estime que "l’immigration choisie à la manière de Nicolas Sarkozy ne s’applique pas au Burkina". Certes, dans l’histoire des relations humaines, les Burkinabè d’une certaine génération se souviennent encore du colporteur mossi ou du marchand de sel qui franchissait occasionnellement les frontières de son pays, soit pour ramener de la cola du Ghana, soit pour rapporter du sel de Taoudéni et de Kidal au Mali, ou encore du pèlerin qui voyageait à pied pour accomplir, à la Mecque, un des cinq piliers de l’islam.

Quoi qu’il en soit, l’envie de s’installer définitivement dans ces pays d’accueil n’a jamais effleuré leur esprit. Cependant, avec le temps, les Burkinabè vont être soumis à une immigration subie, sinon imposée. Ce fut lors du tracé de la Régie Abidjan - Niger (RAN), et la mise en oeuvre de l’office du Niger, au Mali, où la Haute Volta de l’époque, pourvoyeuse de main-d’oeuvre, fut dépecée au profit de la Côte d’Ivoire, du Soudan français (actuel Mali) et du Niger. Cependant, il fallait humaniser ces recrutements qui, de triste mémoire, rappelaient la période des travaux forcés. C’est ainsi que, principalement avec la Côte d’Ivoire, des accords en matière de main-d’oeuvre furent signés à travers le SIAMO (Syndicat interprofessionnel pour l’acheminement de la main-d’oeuvre) dont la direction régionale était fixée à Bobo Dioulasso depuis janvier 1950. Dans la même lancée, les mêmes accords furent, plus tard, signés avec le Gabon.

En tous les cas, à la faveur de la mondialisation et de l’ouverture sur l’extérieur, les Burkinabè, à l’instar des autres peuples, ne pouvaient se réfugier dans une sorte de claustrophobie. La singularité des Burkinabè, c’est leur refus de se couper du cordon ombilical qui les lie à leur pays d’origine. Ceci explique-t-il la raison de leur comportement exemplaire dans les pays d’accueil ? L’on est tenté de le croire. Toujours est-il que si l’on en croit notre ambassadeur en Allemagne, l’attitude de nos compatriotes dans ce pays est d’une exemplarité telle que, d’autres Africains, qui ne sont pas en règle vis-à-vis de la législation locale, n’hésitent pas à se réclamer de la nationalité burkinabè pour échapper aux dures lois qui frappent les sans-papiers.

Dans un contexte où l’Europe est en train d’élaborer des lois pour légitimer la chasse aux Nègres, les Burkinabè, par leurs comportements, semblent être une sorte d’échantillon qu’on pourrait exposer à la vitrine pour servir d’exemple à suivre. Depuis que le problème de l’immigration clandestine fait la une de l’actualité, avec ses images humainement insupportables, il est rarement question de Burkinabè refoulés des Iles Canaries, de Ceuta et de Melilia, ou retrouvés en errance dans les confins de la frontière marocaine, algérienne ou mauritanienne .

On comprend pourquoi la nationalité burkinabè constitue, pour les autres Africains, une sorte de parapluie et d’échappatoire à toutes sortes de tracasseries. Ce capital de crédibilité internationale peut légitimement susciter en nous une sorte d’orgueil national justifié. Une telle crédibilité comporte cependant son revers. Celui de compromettre notre réputation d’hommes intègres, si nous laissons des individus à la moralité douteuse abuser de la seule, ou presque, matière d’exportation que nous avons, l’homme.

Pour préserver ce capital de sympathie qui nous permet d’échapper à toutes ces humiliations, il importe de prévenir toutes les tentatives d’infiltration dans les rangs de nos compatriotes, et qui pourraient mettre à mal leurs bons rapports avec les autorités des pays d’accueil. Tout récemment, s’est tenu à Ouagadougou un symposium sur les migrations africaines.

Cette rencontre est venue à point nommé et offre l’occasion de mettre en place une véritable politique de l’émigration. Celle-ci devrait consister, sur le plan extérieur, à protéger cette espèce de poule aux oeufs d’or en empêchant que des personnes, de mauvaise réputation, bradent la nôtre en s’engouffrant dans la brèche, et mettent en difficulté nos compatriotes vivant à l’extérieur. A l’intérieur, on pourrait, par exemple, créer un observatoire de l’immigration qui aurait pour rôle d’informer les éventuels candidats au départ sur ses avantages et ses inconvénients.

Cette structure aura également pour rôle de faire un lobbying pour vendre l’image positive des Burkinabè à l’extérieur. Du reste, le Mali, pays à haute intensité de mouvement migratoire vers l’extérieur, peut nous servir d’exemple quant à la manière de gérer efficacement le phénomène. Jusqu’à présent, le Burkina peut se flatter d’être un pays où les documents officiels, passeports, visas et diplômes sont enviés, au point d’être une destination privilégiée pour bon nombre de ressortissants d’autres pays. Il lui importe donc de mettre des garde-fous pour dissuader tous les aventuriers de l’extérieur qui frappent à ses portes, et les cupides à l’intérieur qui se laissent facilement appâter par les marchands de la facilité qui se prêtent au jeu malsain de falsifications de documents officiels.

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 26 juillet 2006 à 11:03, par Gérard En réponse à : > Migrations burkinabè : Un capital humain et moral à consolider

    Je suis Français, résident en France, et j’attends depuis Noël dernier la visite d’un de mes amis Burkinabé ... Cela fait 3 fois que sa demande de Visa est refusée (sans que la fonctionnaire de l’ambassade de France ne lui dise pourquoi son dossier est rejeté ... !
    Alors que cet ami présente toutes les garanties : une maison à Ouaga. , un emploi (artisan à son compte), un compte en banque, et un certificat d’hébergement en bonne et due forme !(quand on connait les difficultés d’obtention de ce certificat auprès des Mairies françaises..).
    Alors quand l’ambassadeur affirme que les Burkinabés « ne voyagent pas beaucoup » , en ce qui concerne la France, il ne faut pas aller très loin pour en connaitre les raisons !
    Je ne parle , bien sûr, de l’accueil qui est fait aux postulants à un Visa !... Situation déjà dénoncée dans vos colonnes en son temps ... Mais ceci est une autre histoire !

  • Le 26 juillet 2006 à 17:36, par Jamal En réponse à : > Migrations burkinabè : Un capital humain et moral à consolider

    Sans revenir sur la polémique de l’immigration choisie, je voudrais juste soulever une inquiétude que me suscite l’article. On parle ici de surveillance de la nationalité ou de contrôle des immigrants. Gageons que ce n’est pas pour instaurer une graine de xénophobie au Faso. On a suffisamment de problèmes pour ne pas en rajouter. C’est sur la fierté de la nationalité que nombre de dérives fraticides ont trouvé leur source.

  • Le 28 août 2006 à 20:09 En réponse à : > Migrations burkinabè : Un capital humain et moral à consolider

    J’ai ete choque par cet article. Quand est ce que la solidarite africaine verra jour ?
    en lisant cet article j’ai eu mal d’etre burkinabe. comment pouvez vous etre fier d’etre des "particuliers"= etre du betail choisi".En lisant je me suis dis que les ivoiriens avaient bien raison de nous "malmener " car nous sommes des moutons qui n’ont en realite aucun sentiment d’orgueil. comment en ces moments de difficultes que vivent les AFRICAINS en europe et partout ailleurs ne pouvont nous pas etre solidaires et se battre contre l’ennemi commun, comment pouvons nous sentir meilleurs que les autres : ici en europe un noir est noir qu’il soit des antilles ou d’Afrique. ils reussissent bien leur procede"diviser pour mieux regener". hier c’etait les tsutsi qui etaient plus beau que les hutis. aujourd’hui ce sont les burkinabes qui son tmieux que les autres, oh ! mon Dieu quand est ce que l’africain comprendra que le developpement de l’ AFRIQUE passera par l’unite. Cela fait plus de 400 ans (4 siecles) que nous sommes sous leur dominations, quand est ce que nous allons nous unir pour chasser l’ennemi.nous sommes les seuls sur cette planete a ne pas nous unir et a laisser aux autres le droit de nous dicter leur lois. Si l’occident n’appauvrissait l’Afrique, aucun africain ne voudrais venir vivre dans ce monde de mal etre et de froid. En somme ce que vous venez d’ecrire, etre burkinabe signifie l’esclave ideal ( docile, pas d’orgueil, cerveau lave par le colon...).

    LE CHEMIN SERA LONGUE VERS LA CONSCIENTISATION DU PEUPLE NOIR.

    AFAMA

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