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Burkina / Contraception des jeunes : Christèle Bissinga/Diendéré préconise la sensibilisation sur les risques des rapports sexuels précoces

Publié le mercredi 13 mars 2024 à 19h09min

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Burkina / Contraception des jeunes : Christèle Bissinga/Diendéré préconise la sensibilisation sur les risques des rapports sexuels précoces

L’éducation sexuelle des enfants est très souvent un sujet tabou entre parents et enfants. C’est là qu’entrent en jeu les centres d’écoute pour jeunes pour pallier cela. Les jeunes, en fréquentant ces centres pour jeunes, ont en plus des conseils en santé sexuelle et reproductive surtout recours aux méthodes de contraception sexuelle et très souvent, un peu trop tôt. En effet, certains enfants à l’âge de 14 ans, sont actifs sexuellement et il leur est proposé des méthodes contraceptives pour éviter les grossesses non désirées, les maladies sexuellement transmissibles comme nous l’explique Christèle Bissinga/Diendéré, Point focal OEV (Orphelins et enfants vulnérables) à l’ONG REVS PLUS dans cet entretien sur la contraception des jeunes.

Lefaso.net : Quelle est la tranche d’âge qui vient à vous pour les méthodes contraceptives ?

Christèle Bissinga/Diendéré : Pour ce qui est de la contraception, généralement, ce sont des personnes adultes qui viennent. Mais en plus d’eux, nous avons les adolescents et les jeunes qui viennent et la plupart du temps, c’est à partir de 19 ans. Mais de plus en plus, on reçoit des moins de 19 ans. La sage-femme en a reçu une âgée de 14 ans pour lui administrer des méthodes de contraceptions.

Comment peut-on expliquer cet engouement de jeunes ou très jeunes pour des méthodes contraceptives ?

Cela s’explique par le fait que de plus en plus, les enfants sont précoces sexuellement et aussi par l’information sur la gratuité des méthodes contraceptives ; mais ça c’est à la demande, ce n’est pas une imposition. Si une adolescente de 14 ans qui est sexuellement active vous demande une méthode contraceptive, vous ne pouvez pas refuser. Même s’il y a des conseils qu’on va donner à l’appui, du moment où vous savez qu’elle est sexuellement active, autant lui donner des méthodes de contraception en lui donnant d’autres conseils afin qu’elle évite d’avoir une grossesse précoce.

Quelles sont les méthodes de contraception que vous leur proposez ?

La méthode de contraception que les adolescentes utilisent le plus, c’est la pilule. Mais en même temps, il y a le préservatif que nous recommandons généralement parce que le préservatif a une double protection : autant il évite les grossesses non désirées, autant il évite les infections sexuellement transmissibles. Donc cela fait qu’on préconise beaucoup plus le préservatif en termes de méthode de contraception, mais toutes les autres méthodes de contraception sont au fait. Il y a le dispositif intra utérin, il y a les implants…que nous pouvons donner à celles qui le désirent mais tout en expliquant les avantages, les inconvénients de chaque méthode contraceptive. Également il y a les injectables.

Quels sont les conseils que vous leur donnez généralement ?

La plupart du temps, quand les ados, les jeunes viennent pour les méthodes de contraception, on explique déjà quelles sont les différentes méthodes de contraception, les effets secondaires des différentes méthodes de contraceptions qui peuvent être des saignements, la prise de poids, des aménorrhées c’est-à-dire que les règles ne sont pas régulières, et surtout la double protection comme je le disais tantôt. Ce sont surtout des conseils qu’on donne surtout aux adolescentes, d’attendre d’être plus matures sexuellement avant d’avoir des rapports sexuels et que les rapports sexuels ne doivent pas être également imposés par le partenaire sexuel. Donc, c’est à chacun son rythme. Si on se sent vraiment prêt d’avoir des rapports sexuels, que ce ne soit pas imposé, que ce ne soit pas parce que le partenaire est plus âgé, qu’il a beaucoup plus d’influence sur toi que tu dois forcement accepter d’avoir des rapports sexuels et que chacun a son rythme. Ce n’est pas parce que l’autre est sexuellement actif que forcement toi également, tu l’es. Donc, on donne toujours des conseils aux uns et aux autres pour savoir d’abord quelle est la méthode qu’il faut choisir et également quels sont les effets secondaires que ça peut entraîner et on insiste surtout sur la double protection.

À quel âge les parents doivent parler de sexualité avec leurs enfants et quelle doit être l’attitude des parents à cette période ?

Cela dépend du degré de maturité de l’enfant. Nous avons des enfants à 9 ans qui sont sexuellement actifs malheureusement. Nous avons des enfants où c’est un peu plus tard à 15, 18 ans. Donc, je pense que chaque parent, en fonction du développement de son enfant, doit voir quel est le meilleur moment pour pouvoir parler. Si tu sens déjà que ton enfant est précoce, il faut commencer à aborder les questions de santé sexuelle avec l’enfant. Les gens pensent que c’est uniquement de rapport sexuel qu’il faut parler, non ! En matière de la santé reproductive, d’abord l’enfant doit connaître son corps. Il y a des parents, quand leurs enfants ont les règles, ils paniquent. Ils se posent des questions : Comment on fait ? Qu’est-ce que je dois lui dire, elle est toute petite, elle n’a que 10 ans, 11 ans et elle a déjà vu ses règles. Il faut savoir prendre le temps de pouvoir échanger avec l’enfant sur les changements qui interviennent dans son corps, ce qui peut arriver en tant que fille, en tant que garçon et maintenant, s’il y a des rapports sexuels qu’est-ce qu’on doit faire ?

Est-ce qu’il faut se protéger est-ce qu’il faut attendre plus tard ? Que les parents puissent instaurer un climat de confiance avec leurs enfants parce que tant qu’ils ne vont pas instaurer ce climat de confiance, ça va être difficile pour les enfants de s’ouvrir et en même temps, les parents ne doivent pas mettre une barrière pour parler de sexualité à leur enfant. Chacun en fonction de l’âge de l’enfant, doit pouvoir adapter son langage pour pouvoir parler de ça. Mais il ne faut pas que ce soient des questions qui soient tabous. Dès qu’on met la censure, ça va amener les jeunes à vouloir aller chercher dehors et pourtant là, ce n’est pas évident qu’ils aient la bonne information.

Si les parents aussi ne se sentent pas à l’aise de pouvoir aborder les questions de sexualité, il y a des centres pour jeunes qui peuvent aborder ces questions avec les jeunes. Donc, en fonction du degré de maturité de l’enfant, si tu sais déjà qu’à 10 ans ton enfant est précoce et qu’il a des tendances, autant commencer à parler dès ce moment pour éviter qu’il y ait problème plus tard parce que dès qu’il y a la censure, ça amène les enfants à se renfermer sur eux-mêmes. Mais si les parents sont déjà enclins à parler de ça, de petite amie, de copine, de les taquiner sur leurs copines, leurs petits amis… les enfants ont plus tendance à s’ouvrir. Mais si vous fermez déjà la porte, ils vont aller apprendre dehors et ce n’est pas évident que ce soit la bonne information.

Avec l’internet, les enfants sont aujourd’hui exposés à des images ou vidéos qui les poussent à expérimenter le sexe, quels conseils peut-on donner pour qu’ils se préservent de ces scènes ?

D’abord il faut donner des conseils sur les risques des rapports sexuels précoces parce que plus tôt on a des rapports sexuels, plus cela va avoir des effets secondaires sur l’organisme surtout de la jeune fille. Donc, c’est toujours important de donner des conseils par rapport à cela. Également, il faut pouvoir dire aux enfants que les images qu’ils voient ne sont pas toujours des effets de la réalité. Souvent, on va montrer des films pour adultes ou on voit les partenaires avoir des rapports pendant plus de 30 mn, une heure de temps, les jeunes ont tendance à croire que c’est ça la réalité, que c’est en ayant des rapports sexuels plus longs que cela démontre ton degré de performance pourtant ce n’est pas la réalité. Donc, il faut savoir dire aux enfants que ce que vous voyez, ce n’est pas toujours la réalité, ce sont souvent des images montées. Et comme je le disais tantôt, il faut maximiser la relation parent-enfant.

Plus les enfants vont se sentir en confiance, plus ils prendront le temps de pouvoir échanger avec vous et d’accepter ce que vous allez leur dire. Autre chose importante, c’est surtout l’accès même à ces images-là. Il faut que les parents puissent prendre le temps de contrôler ce que leurs enfants regardent à la télé. En contrôlant ce qu’ils regardent, qu’ils ne laissent pas d’abord qu’ils aient accès à ces images-là. Et même souvent, c’est sur le téléphone. Les parents donnent souvent très tôt des Android à leurs enfants qui leur permettent d’avoir accès à ces images. Il faut contrôler de temps en temps ce que les enfants voient. Et quand vous regardez par exemple un film avec les enfants et qu’il y a des images pour adultes qui passent, on a tendance à zapper, à changer de chaîne sans rien dire aux enfants. Il ne faut pas zapper. Souvent il faut les laisser regarder et après maintenant on échange entre parents et enfants en leur demandant par exemple ce qu’ils ont vu ?

Il faut leur expliquer que ce qu’ils ont vu, c’est pour les grandes personnes, ce n’est pas pour les enfants de leur âge. Quand vous aurez atteint l’âge, en ce moment vous serez plus aptes à le faire et en ce moment, ce serez vous qui allez décider de le faire. Mais dès que directement on met la censure, ça fait que l’enfant va se refermer sur lui-même et s’il a affaire à ça, il ne va pas vous en parler. Il faut vraiment contrôler ce que nos enfants regardent sur les téléphones. Ce n’est parce qu’on a donné un téléphone à un enfant qu’on n’a pas le droit de regarder ce qu’il fait dessus. Ça ne veut pas dire non plus qu’il n’a pas droit à sa vie privée. C’est vrai qu’il a droit à sa vie privée mais de temps en temps, il faut contrôler ce qu’il regarde pour pouvoir échanger avec lui et que ce soit de façon bienveillante.

Haoua Touré
Lefaso.net

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AB1 Christèle Bissinga/Diendéré, Point focal OEV (Orphelins et enfants vulnérables) à l’ONG REVS PLUS

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Vos commentaires

  • Le 14 mars à 05:55, par Lustres En réponse à : Burkina / Contraception des jeunes : Christèle Bissinga/Diendéré préconise la sensibilisation sur les risques des rapports sexuels précoces

    Merci Madame BISSINGA pour les précieux conseils. Ce n’est vraiment pas simple pour nous les parents. Étant de la génération 80-90 , la manière dont nous avons été éduqués par nos parents et totalement différente de la manière d’éduquer les enfants en 2020. Cela suppose que nous devrons prendre d’autres modèles sans pour autant prendre de vue les vertus inculquées à nous par nos parents. L’exercice est très très compliqué, mais pas impossible.

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  • Le 14 mars à 11:13, par non’ga En réponse à : Burkina / Contraception des jeunes : Christèle Bissinga/Diendéré préconise la sensibilisation sur les risques des rapports sexuels précoces

    Très bon sujet. Merci pour cet ouverture d’esprit. La question du sexe est très tabou encore dans nos sociétés. On en a peur. On est pudique. Et pourtant, on ne va pas y échapper. A moins d’être religieuse, ou moine, ou prêtre. Maintenant, il faut affronter la question, assi bien par rapport à nos enfants, et aussi bien par rapport aux couples pour qu’ils maitrisent le nombre d’enfants qu’ils veulent. Il est bien vrai que le préservatif et l’abstinence, restent les seuls moyens de protection pour lutter contre les grossesses non désiréés, et surtout les maladies sexuellement transmissibles comme le sida (vih), la gono..., les champignons etc... Cela est surtout ,valable pour les jeunes. Mais pour les couples, qu’est ce qu’on leur propose, pour qu’ils continuent d’avoir une vie sexuelle épanouie sans risque de grossesses non désirée ? Tout le monde a t il accès au préservatif ? à la pilule ? au stérilet (bien qu’il ne soit pas sûr) ? Toutes ces informations et conseils que vous avez donnés sont capitals. Tous les publics ont ils accès à ces informations ?les gens dans les villages par exemple. Les langues nationales sont en train d’être valorisées au burkina. Je pense que c’est une bonne occasion pour sensibiliser, diffuser l’information au plus grand nombre. D’autre part, je propose que les tradipraticiens nous propose des contraceptifs à base de plantes ou autres pour aider les couples dans les villages à maitriser les grossesses non désirées. En tout cas, je vous remercie déjà pour ce travail et cette ouverture d’esprit que je constate.

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  • Le 14 mars à 21:06, par Rabo En réponse à : Burkina / Contraception des jeunes : Christèle Bissinga/Diendéré préconise la sensibilisation sur les risques des rapports sexuels précoces

    "Et quand vous regardez par exemple un film avec les enfants et qu’il y a des images pour adultes qui passent, on a tendance à zapper, à changer de chaîne sans rien dire aux enfants. Il ne faut pas zapper. Souvent il faut les laisser regarder et après maintenant on échange entre parents et enfants en leur demandant par exemple ce qu’ils ont vu ?" Dixit Christèle Bissinga/Diendéré, Point focal OEV (Orphelins et enfants vulnérables) à l’ONG REVS PLUS .

    Comme elle ne précise ni l’âge de l’enfant, ni le contenu visuel, on peut penser "tout public et tout contenu". Et cela me dérange, car nous sommes entrain de glisser tout doucement vers les pratiques du ’’tout permis’ de l’Occident décadent.

    Je suis d’autant plus inquiet que, par réflexe lorsque je lis des reportages sur les activités des ONG opérant au Burkina, je suis allé sur le site net de l’ONG ONG REVS PLUS pour voir ses publics cibles au Burkina ( Antenne(s) : Dano, Houndé, Diébougou, Solenzo, Dédougou). Parmi les publics, j’ai lu et bien lu "personnes LGBTQI"

    Public(s) : personnes détenues, personnes LGBTQI, personnes handicapées, personnes travailleuses du sexe, personnes usagères de drogues.

    quelqu’un peut il m’éclairer sur la position officielle du Burkina sur cette question de LGBTQI. Merci d’avance.

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