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George Bush en Asie : La raison du plus fort

Publié le lundi 6 mars 2006 à 07h25min

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Le président américain, George W. Bush, était tout récemment en Inde, première étape d’une tournée qui l’a conduit ensuite au Pakistan. Si l’Inde a constitué le plat de résistance de cette tournée asiatique, il n’empêche que l’escale de Kaboul, capitale de l’Afghanistan, était un passage obligé.

En effet, ce pays est un condensé de toutes les contradictions de la politique américaine dans cette région. Après avoir aidé les Taliban à chasser les troupes soviétiques, les Etats-Unis se sont retrouvés en conflit avec leurs protégés d’hier.

A telle enseigne qu’ils se sont vu contraints d’intervenir une nouvelle fois pour imposer leur "paix", en mettant en place un gouvernement contesté par une partie non négligeable de la population. Les attentats à répétition qui font de nombreuses victimes, sont la preuve que contrairement au bréviaire officiel, le pays est loin d’être pacifié. Il en est de même du Pakistan voisin, le supposé meilleur allié, du moins officiellement des Etats-Unis. Ce pays constitue en effet, la principale tête de pont de Washington dans sa lutte contre le terrorisme international.

Mais cette coopération est mal supportée par les populations. On comprend aisément l’impressionnant dispositif policier déployé lors de la visite de George Bush. Un dispositif à la hauteur de l’hostilité d’une population qui, à travers des marches et des grèves, entend protester contre la politique américaine en Asie.

Cependant, c’est la visite en Inde qui a retenu l’attention de tous les observateurs. La promptitude avec laquelle Washington et New Delhi sont parvenus à un accord de coopération nucléaire civile a étonné plusieurs chancelleries. Surtout que c’est la première fois que Bush se rend dans ce pays.

Au-delà des subtilités diplomatiques et de la complexité du sujet, on peut retenir que cette visite se situe à un moment où les Etats-Unis sont pris entre le marteau de leurs professions de foi démocratique et l’enclume de leur refus de reconnaître des régimes issus d’élections démocratiques dès lors qu’ils nuisent aux intérêts géopolitiques et géostratégiques américains. C’est ainsi que Washington continue à ne pas reconnaître la victoire du Hamas, persuadé que ce mouvement refuse d’être à sa dévotion.

Quand on ajoute à ce casse-tête palestinien, l’inconnue irakienne et l’arête iranienne incrustée dans la gorge de George Bush, on mesure aisément la position inconfortable de l’Amérique dans ses rêves de construire le fameux GMO (Grand Moyen Orient) regroupant des Etats convertis à la démocratie sous la baguette magique de Washington. Mais, on le constate, il s’agit d’une nébuleuse dans laquelle les Etats-Unis veulent une chose et son contraire.

Tout en ménageant des régimes corrompus et dictatoriaux, Washington veut donner des fessées à d’autres pour déficit démocratique. S’il est vrai que l’Inde est une démocratie au sens universellement accepté du terme, il n’en demeure pas moins que ce pays n’a jamais signé le traité de non- prolifération nucléaire, contrairement à l’Iran qui a signé le document et qui a même permis aux inspecteurs de l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique) de visiter ses sites.

Cependant, poussé par le même aveuglement qui avait prétexté la présence d’armes de destruction massive en Irak pour envahir ce pays, Washington démontre ainsi qu’en réalité, ce ne sont ni les impératifs d’un monde démocratisé ni le respect du droit international qui le préoccupent. L’exemple de l’Iran (qui a signé la Convention sur la non- prolifération nucléaire) et de l’Inde (qui s’en est toujours démarquée) est la preuve que le droit international n’a de sens que lorsqu’il sert les intérêts de quelques grands pays.

Manifestement, elle n’obéit à rien, sauf à celle des puissances qui régentent le monde. Tout est régulé selon les intérêts du moment des grandes puissances. Ainsi, sont faits les rapports entre grandes et petites nations. Il ne suffit pas d’être dans la légalité pour espérer échapper à leur sévère et aveugle sentence.

Pour ce faire, George Bush n’a pas craint d’aller à l’encontre de certaines dispositions de la loi américaine qui interdisent de signer des accords dans le domaine nucléaire, fût-il civil, avec un pays qui n’a pas renoncé à la course à l’arme nucléaire.

A défaut d’empêcher l’Administration Bush de déployer son rouleau compresseur sur ses supposés ennemis à travers le monde, ses partisans auraient pu lui indiquer la voie de la sagesse, à savoir, laisser la tempête se calmer avec l’Iran avant d’ouvrir d’autres fronts, porteurs de risques.

En tous les cas, cette manière sélective d’appliquer le droit international et cette politique ségrégationniste ne feront qu’exacerber davantage les tensions entre les nations, chose dont le monde qui a d’autres défis à relever, n’a pas besoin. En attendant, par cet accord, George Bush espère diminuer l’influence et le poids de la Chine dans la région. En retour, New Delhi ne serait pas mécontente de siéger au Conseil de sécurité de l’ONU comme membre permanent avec droit de veto, au même titre que Pékin.

En contrepartie, les Etats-Unis seraient enchantés de profiter du vaste marché (1 milliard de consommateurs) que constitue l’Inde pour augmenter le volume de leurs exportations. Mais, que ferait l’Inde de sont droit de veto dans la jungle onusienne où les nouveaux venus subiraient le diktat des anciens membres, toujours prêts à piétiner le droit international ?

"Le Pays"

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