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Débat sur l’histoire du Mossé : beaucoup de benda pour rien

Publié le mercredi 29 octobre 2003 à 06h35min

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La parenté à plaisanterie est une vertu en Afrique et particulièrement au Burkina Faso qu’il faut sauvegarder à tout prix. Le cas entre les San et les Mossé, est un exemple vivant et significatif. A travers cette note d’humeur, Mamadou Paré, apporte sa contribution au débat sur l’histoire des Mossé.

Comme la vie serait triste ! Sans eux ! Pour nous autres les San. Et sans jeu de mots s’il vous plaît.

Décidément, ces Mossé ne finiront jamais de nous égayer. Ainsi, pendant des semaines, ils se sont évertués avec leur fougue habituelle à disserter non comme autre fois les Byzantins sur le sexe des anges, mais c’est tout comme ! sur la (non) réalité historique de l’empire des Mossé.

Je voudrais tout d’abord, rassurer nos chers obligés, les Mossé, même si du fait des travaux champêtres au Sourou et au Nayala (il faut bien que nous assurions la sécurité alimentaire de ces Mossé là !) nous étions très sollicités, les San (et non les Samo comme nous qualifient ces incorrigibles femmes et hommes du "Yel kae yé" ont montré un intérêt paternel pour ce pseudo-débat. Car c’en est un !

Preuve de l’intérêt des San pour leurs esclaves les Mossé sur cinq "contributeurs’’ (Me Pacéré, Pr. Nacanabo - Toégui, Omar Barro et aujourd’hui l’auteur de ces lignes), trois sont San ou apparentés.

Mais venons au fait : au-delà de cette querelle sur l’existence ou la non existence de l’empire des Mossé, il faut vraiment être un Moaga pour ne pas tout simplement constater que les autres empires contemporains aux royaumes mossé ont certes existé mais aujourd’hui ont disparu. Et en laissant le royaume mossé vivace avec une organisation, des ressorts politique, administratif et culturel encore étincelants. Et puis, vous n’aviez pas un royaume, vous aviez des royaumes. Vous aviez toujours votre Mogho Naaba, mais des empires, où sont leurs empereurs ?

Du reste, il n’y a aucun complexe à être un royaume au lieu d’un empire. Le dernier empire africain en date (pour faire contemporain) a "prospéré " au bord

du fleuve Oubangui ! Mais à ce jour et un quart de siècle après son éphémère existence, on est encore à en solder les douloureux et tragiques comptes !

Par contre pour rester au niveau du symbolisme des choses et de leurs formes (car ne dit-on pas que la forme détermine le fond !) des royaumes ont survécu aux épreuves du temps et sont aujourd’hui des réalités contemporaines.

En réalité, dans ce lamentable débat, il faut plaindre Me Pacéré Frédéric Titinga qui, en dépit de la qualité de son engagement (concédons-le au Moaga de Manéga ! même s’il reste notre esclave) pour la promotion de l’image de la Haute-Volta au Burkina Faso, n’a pas encore compris que le " sport national "

prisé dans notre pays est de magnifier l’histoire, la culture, l’avoir et l’être des autres et de s’auto flageller en restant dans ses petits souliers. Ailleurs, des gens ont fait basculer la légende dans l’histoire, ils se sont forgé des grands faits d’armes, de grandes réalisations imaginaires qui passent finalement pour réalité.

Ici, et c’est bien dommage, la simple reconnaissance des faits historiques est sujet à caution et à remise en cause. Pourtant, les faits historiques sont là et bien là. Celui par exemple qui est de constater avec le grand historien malien Skene Mody Cissoko que même s’ils sont les esclaves des San, je le cite, "Mossi font partie des meilleurs guerriers d’Afrique’’ ; obligeant, soit dit en passant, même le conquérant Samory Touré, à éviter avec eux la confrontation et à les laisser tranquilles.

Bref ! Il faut peut-être qu’une fois pour toutes, on comprenne que dire les vérités historiques est constitutive d’une approche galvanisante de l’Etat-nation en construction dans le respect des apports des différentes communautés ! Il est également grand temps que nos historiens, mais aussi nos metteurs en scène, nos artistes et nos littéraires comprennent que la marche vers l’avenir se nourrit des faits passés. Et cela qu’il relève de l’histoire stricto sensu, de la légende, de la fécondité imaginative et créatrice des contours ou de tous ces éléments à la fois.

C’est ainsi qu’il faut mettre en exergue la bravoure de Tiéfo Amoro devant les troupes de Samory et relever la victoire des Bobo et de leurs alliés sur le roi du Kénédougou à Bama.

En attendant que je me rende le vendredi au faux départ du Mogho Naaba pour prendre d’autorité trois canaris de dolo et un mouton de Dori bien dodu pour me payer en tant que mentor de mes esclaves, il faut (et là je suis sérieux) convenir que sur ce faux débat, il y a beaucoup de bruit pour rien.

Mamadou Paré
Secteur 30, Ouagadougou
E-mail : madoupare@yahoo.fr

(*) Benda : tam-tams dont se servaient autrefois les Mossés pour chanter les louanges de leurs maîtres : les San, dimunitif de S.A.M.O (= South African Mafia Organisation).

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