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Les droits humains au Burkina vus par le MBDHP:L’esprit d’un rapport

Publié le lundi 15 décembre 2003 à 10h14min

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Le Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples (MBDHP) a officiellement présenté le 31 octobre dernier, un rapport sur l’état des droits humains au Burkina Faso de 1996 à 2002. Le tableau dressé est pour le moins noir.

Si noir qu’on ne peut manquer, par honnêteté d’être sceptique et de s’interroger sur la véracité des faits et allégations après une lecture minutieuse. Sommes-nous vraiment au Burkina ? La liberté d’aller et venir existe-t-elle dans ce pays ? Ce rapport reflète-t-il vraiment la réalité ? La "coloration" politique qui transparaît tout le long du rapport ne crédibilise-t-elle pas la "thèse" selon laquelle le MBDHP est "trop" politique ?

Autant de questions qui à elles seules, jettent le trouble sur la probité intellectuelle d’acteurs de la défense et de la promotion des droits humains qui ont pourtant pignon sur rue, tant au plan national qu’international. Retour sur un rapport controversé.

L’article 2 des statuts du MBDHP stipule que : "Le Mouvement a pour objet la protection, la promotion et la défense des droits fondamentaux et des libertés individuelles et collectives de la personne humaine dont les principes sont énoncés dans la Déclaration universelle des Droits de l’Homme et des Peuples de 1948". Un peu plus loin, dans l’article 5 il est écrit qu’il est strictement interdit aux membres d’utiliser le Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples à des fins autres que celles relevant de son objet. Ces deux articles sont clairs et ne souffrent d’aucune ambiguïté. Mais, comme on le dit souvent, les textes ne valent que ce que valent les hommes chargés de les appliquer. En effet, entre les postulats et la réalité c’est trop souvent le jour et la nuit.

Un tableau bien sombre

Si on devait s’en tenir uniquement à la forme du rapport, on pourrait dire qu’il est largement complet. En effet aucun domaine n’a été occulté par la "loupe" du MBDHP, puisque l’essentiel était de "fouiller" et de trouver des "dysfonctionnements" qui puissent "accréditer" des thèses déjà arrêtées. En tentant de plancher sur l’état des droits humains de 1996 à 2002, il était certain que le pouvoir de la IVe République et l’Etat auraient pour leur grade.

Est-ce parce que l’Etat est une continuité ? Qu’à cela ne tienne, la loupe du MBDHP est passée partout et le constat a toujours été le même, c’est à dire triste et désolant. Des droits civiques et politiques aux droits spécifiques des femmes et des enfants en passant par les droits économiques, sociaux et culturels rien n’a été omis et c’est la même rengaine.

On se surprend alors à se demander comment diable les Burkinabè dans leur ensemble et les autres nationalités présentes dans le pays arrivent à vivre dans un tel enfer et comment un tel rapport a pu échapper à la censure et ses auteurs à une " répression aveugle ". C’est dire que quelque part quelque chose cloche et il n’est pas besoin d’être particulièrement perspicace ou pro-pouvoir pour le comprendre. Du coup on s’interroge sur tant de simplisme et d’exagération.

Faut-il le rappeler, le pays revient de loin et son histoire sociopolitique certes a été beaucoup mouvementée et marquée par des régimes d’exception aux cours desquels la question des droits humains était reléguée au second plan. A titre d’exemple, sous le CNR ils étaient purement et simplement considérés comme " réactionnaires " donc contre le progrès social, le principe de base étant de mettre en opposition les droits humains et les droits des peuples. C’était seulement en 1987. Par ailleurs la démocratie n’a de nouveau eu droit de cité au Burkina Faso qu’en 1991 avec l’adoption d’une constitution, suivie d’élections présidentielles puis législatives.

A en croire le rapport du MBDHP, cette construction de la démocratie n’a duré que j’usqu’en 1996, année après laquelle elle aurait commencé à se dégrader. A l’évidence le MBDHP a un peu trop forcé sur le trait. Il devrait commencer par reconnaître qu’il y a des acquis démocratiques, sociaux, économiques et même politiques indéniables. Il est certain que sans ces acquis, le MBDHP n’existerait même pas à plus forte raison produirait un rapport dont tout le contenu est pour le moins controversé.

Halidou et le MBDHP : la référence ?

Ce qui frappe aussi dans ce rapport, c’est la longue liste de crimes commis dans les années 1980 qui y figure alors qu’il est censé ne concerner que la période 1996-2002 ? Bien curieux n’est-ce pas ?

Tout naturellement pour avoir affronté une telle gehenne Halidou et son MBDHP en ont "bavé" et ce ne serait pas de trop que d’en faire de véritables héros : Tenez malgré leur "modestie légendaire" ils ne peuvent pas s’empécher de l’affirmer dans le rapport : "Aujourd’hui, il n’est pas laudatif, ni superfétatoire d’affirmer que le MBDHP est la première organisation de la société civile qui défend avec le plus de constance et de détermination les droits humains, tous les droits humains au Burkina Faso.

Ce choix et cette conséquence ont valu au MBDHP, à ses militants, à ses sympathisants toutes les tracasseries possibles de la part de la IVe République…". Plus loin il ressort que le président du MBDHP qui est également président du Collectif a été l’objet d’un véritable lynchage médiatique qui a débordé les frontières du Burkina Faso et a dû subir des intimidations, des interpellations et autres tracasseries pour briser son moral. Ainsi donc la boucle est bouclée. En plus de violer massivement les droits humains la IVe République serait aussi une machine infernale contre tous ceux qui se mettent au service de ceux-ci.


Présentation du MBDHP

Officiellement le MBDHP que dirige M. Halidou OUEDRAOGO a été créé le 19 février 1989, c’est-à-dire sous le régime du Front populaire. Les mauvaises langues disent même que c’était avec sa bénédiction. A tout le moins on peut dire que quoique régime d’exception, le Front Populaire avait une haute idée de la démocratie et de la promotion des droits humains. La naissance de cette organisation était assurément un bon indicateur dans la mesure où les « stigmates » des régimes d’exception étaient encore bien visibles.

Selon donc les textes du MBDHP, l’organisation se fixe comme missions la défense, la protection et la promotion des droits de l’homme. Pour ce faire, les moyens qu’il utilise selon les circonstances sont entre autres, la médiation, la dénonciation, la coalition, les pétitions, les conseils. Comme initiatives ou actions à mettre à son actif. Le MBDHP, cite entre autres, la pétition initiée en 1993 pour la révision du code de l’information, la contribution à l’écriture de la constitution de la quatrième République et la ratification par notre pays de nombreux instruments juridiques des droits humains…

Le Mouvement est dirigé par un comité exécutif élu au Congrès et assisté par une commission arbitrale avec des divisions spécialisées. Il est organisé en sections provinciales. L’organisation est affiliée à la Commission internationale des juristes (CIJ), à l’UIDH dont Halidou OUEDRAOGO est le président, à la FIDH, etc.

L’article 5 de l’organisation stipule : « Il est strictement interdit aux membres d’utiliser le Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples à des fins autres que celle relevant de son objet ». Il semble que cet article souffre beaucoup tant il est martyrisé par certains propos et actes du président du Mouvement ou certains de ses responsables. En effet, nombre d’entre eux sont suspectés de profiter de leurs positions pour s’offrir des avantages indus si ce ne sont des passe-droits. Le reproche le plus commun est la « politisation » outrancière du mouvement à telle enseigne qu’il a perdu beaucoup de sa crédibilité.

Cependant, malgré les reproches et autres critiques, on ne peut manquer d’affirmer que d’une manière ou d’une autre, le mouvement de Halidou OUEDRAOGO, a été un acteur à la « naissance », à l’évolution et au renforcement de la démocratie dans notre pays.

Par Ben Alex BEOGO
Source : Rapport MBDHP
L’Opinion

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