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Sida : Une bande dessinée pour prévenir la pandémie

Publié le jeudi 27 novembre 2003 à 10h52min

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Le Réseau Ecole et développement vient de mettre sur le marché un livret intitulé "Contre le Sida". Pour vulgariser ce livret, M. Jacob Sovoessi a séjourné au Burkina Faso du 15 au 19 novembre 2003.

Dans l’entretien qu’il nous a accordé, M. Sovoessi aborde les grands thèmes du livret, la stratégie pour permettre sa vulgarisation, etc.

Sidwaya (S.) : Situez-nous l’objet de votre visite au Burkina Faso.

Jacob Sovoessi (J. S.) : Je suis arrivé à Ouagadougou depuis quelques jours pour présenter, faire connaître et parler d’un livret d’activités publié en septembre 2003 par le Réseau Ecole et développement. Ce livret est intitulé "Contre le Sida". Contre le Sida parce qu’en tant qu’institution d’éducation, nous avons voulu marquer notre point dans cette lutte contre la pandémie du siècle mais nous avons voulu surtout innover en apportant un support d’éducation. Par ailleurs, c’est aussi un support d’information pour jeunes et pour adultes.

S. : Quels ont été vos contacts ici afin de mieux faire connaître ce livret ?

J. S. : Le Réseau Ecole et développement est un mouvement regroupant les institutions protestantes scolaires d’Afrique occidentale et centrale. En tant que tel, le Burkina a été membre de cette institution pendant plusieurs années même si sa participation a été refroidie entre-temps.

Au cours de notre récent séjour, nous avons beaucoup travaillé avec les Assemblées de Dieu (les écoles et les Eglises), avec l’ODE (Office de développement des églises évangéliques), avec un certain nombre d’institutions (ministères de l’Action sociale et de l’Enseignement de base). Nous avons eu beaucoup de contacts pour fonctionner afin qu’ensemble nous puissions apporter une contribution significative à la lutte contre le Sida.

S. : Pourquoi avoir choisi la bande dessinée (B.D.) comme moyen de lutte contre le Sida ?

J. S. : Nous avons choisi la B. D parce que nous nous sommes dit qu’il y a assez de littérature déjà. Dans beaucoup d’institutions et de livrets, ce qu’on trouve aujourd’hui, c’est essentiellement de la littérature, des grands textes. Or, en Afrique nous lisons peu. Les jeunes lisent encore très peu. Ainsi, nous nous sommes dit qu’il faut un support qui intéresse d’abord ceux qui lisent très peu, qui intéresse les jeunes et même les enfants. C’est pourquoi nous avons dans ce livret fait un mixage de B.D et de textes.

Donc un livret pour tous. Nous avons même choisi une B. D en quadrichromie parce que nous voulons susciter au maximum l’attraction du lecteur pour qu’il soit touché par l’information. En langage communicationnelle, c’est ce qu’on appelle un choc positif, dans la lecture et le regard pour amener les populations à lire cet ouvrage.

S. : En combien d’exemplaires cet ouvrage est-il tiré ?

J. S. : 5 000 exemplaires, juste pour le lancement promotionnel. Maintenant, nous sommes en train de regrouper les commandes par pays. Nous avons parcouru déjà 5 pays en Afrique sans compter l’Allemagne et la France qui sont elles aussi impliquées. Nous savons que plus la commande est importante, moins cela va coûter. Nous ne sommes pas dans une logique commerciale, nous voulons livrer beaucoup d’ouvrages. L’éditeur prendra ses frais. Quant aux droits d’auteur devant nous revenir, ils serviront à financer des écoles en milieu rural. Pour le prochain tirage, nous comptons aller à 100 et 200 mille exemplaires.

S. : Quels sont les grands messages véhiculés par ce livret ?

J. S. : Le premier message est que le Sida nous concerne tous, le deuxième, c’est que le Sida n’est pas une fatalité, le troisième est que le Sida ne tue pas seulement les personnes infectées mais il tue aussi notre éducation, notre économie, etc. Le quatrième est qu’il faut un peu plus d’éducation pour que nous puissions vaincre cette pandémie. Le cinquième est que l’Afrique est vraiment atteinte.

Et la question est de savoir si une fois encore nous allons nous croiser les bras comme on l’a fait pour le développement pour attendre l’aide des Européens. Nous disons non. Car nous pouvons, grâce à la prévention, à la sensibilisation, à une éducation qui brise un peu les tabous liés au sexe, faire quelque chose contre le Sida. Le sixième message fort est qu’il y a plusieurs voies de contamination. Parlant du Sida, on ne doit pas voir rien que le sexe, la prostitution. On doit également faire attention aux autres voies de transmission. Le septième message appelle l’action. Nous pouvons agir à l’école, en famille, au service, etc.

Ensemble, nous devons nous mobiliser pour vaincre cette pandémie. En attendant les médicaments et le vaccin, nous pouvons chacun de son côté, tout au moins, sensibiliser, informer, éduquer pour réduire le taux de séroprévalence en Afrique. Nous voulons que ce livret parvienne à tous les pauvres, à tous ceux qui constituent des populations où le risque est élevé.

Pour cela, nous sollicitons la solidarité des ONG, des institutions internationales, etc. pour qu’elles commandent ce livret pour les pauvres.

S. : N’avez-vous pas rencontré des difficultés face à la philosophie de la religion chrétienne quant à la conception et la fabrication du livret ?

J. S. : Des difficultés. C’est oui et non. Oui parce que tout le monde ne comprend pas encore. Non parce que, en tant que mouvement de rénovation pédagogique, l’éducation, c’est d’abord l’ouverture. Alors nous avons même un chapitre dans le livret qui est intitulé : Religion et Sida. Là, il y a eu des positions protestantes, des positions catholiques, des positions musulmanes, mais il faut une ouverture. Le livret est très ouvert. On sait que dans certaines Eglises, il n’est pas question de parler du préservatif. Nous avons abordé toutes les positions permettant à tout individu de se protéger contre cette maladie.

Mais, nous disons aussi que la prostitution n’est pas une bonne chose, que la dépravation n’est pas une bonne chose. Toutefois, après avoir dit tout cela, on donne le choix à chacun de vivre sa vie en toute responsabilité. Le message ici est que le jeune, l’adulte sache que la sexualité est un acte responsable.

Nous ne voulons pas faire de l’enfermement, mais nous voulons que chacun comprenne et agisse en toute responsabilité parce que c’est l’autoresponsabilisation qui peut conduire l’individu à un réel développement, de même que la société. Nous sommes allés même jusqu’à demander aux gens quelles sont les positions adaptées dans leur entourage. Cela permet au lecteur qui, peut-être ne partage pas l’opinion de livret, de prendre lui-même sa position conformément à son milieu. C’est ce qu’on appelle une attitude de libération. Nous devons nous libérer des préjugés pour être des gens indépendants.

Propos recueillis par
Charles OUEDRAOGO
Sidwaya

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