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PRETS SCOLAIRES : Quand les enfants deviennent des alibis

Publié le vendredi 3 octobre 2008 à 02h38min

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On est tenté de dire que les prêts scolaires, par l’ampleur qu’ils prennent et le rôle qu’ils jouent au niveau de nombreux ménages, sont devenus un mal nécessaire au Burkina Faso pour le travailleur salarié.

Et pour avoir le prêt scolaire, les parents usent de tout, soit pour l’obtenir dans le cas où la feuille de paie comporte déjà "suffisamment chargée", soit en avançant mille et une raisons. En tout état de cause, les enfants sont un alibi en béton et il faudrait que les responsables des maisons de crédit aient une pierre à la place du coeur pour refuser un solliciteur de prêt scolaire, même s’ils sont conscients des difficultés qui s’ensuivront. Les difficultés dont il est question et que les prêteurs exposent clairement au demandeur ne sont pas liées au recouvrement, mais à celles pour l’intéressé de pouvoir faire face plus tard à ses obligations de famille. Mais qu’importe !

Malheureusement, le prêt une fois positionné, touché et dans la poche de celui qui avait évoqué une kyrielle de raisons pour l’obtenir, il y a de fortes probabilités qu’il ne serve pas à résoudre le problème pour lequel il a été accordé. De nombreux parents se sucrent correctement sur le dos de leurs enfants. Ils ont des engagements qu’ils doivent honorer sur ce prêt. Mais surtout leurs obligations relatives aux "3 B" (bière, brochettes et b...) qui deviennent les premières priorités.
Tant et si bien qu’à l’approche de la rentrée, ce sont les questions incessantes des enfants et de leur maman qui deviennent insupportables pour le père de famille : " Papa, où j’irai cette année ? Papa, as-tu payé ma scolarité ?"

De son côté, ne voyant et ne sentant rien venir, la maman va commencer à s’inquiéter :"La rentrée, c’est bientôt, que comptes-tu faire des enfants ? Je veux parler de leurs frais de scolarité. As-tu-des places pour eux ? Dans quels établissements iront-ils cette année ?" Et bien d’autres questions sages que monsieur va trouver insensées. Ce ne sera que le jour de la rentrée que les enfants et leur mère découvriront avec désolation que rien n’a été fait. C’est à ce moment précis que monsieur va commencer la ronde des établissements. Face aux responsables des lycées et collèges, il répétera comme une chanson les mêmes raisons qu’il avait déjà exposées dans les établissements de crédit. Cette fois, il promettra, signera des engagements et assurera avec fermeté qu’il va les respecter.

Mais rien ne sera respecté. Les conséquences sont les expulsions des enfants pour défaut de paiement de leurs frais de scolarité, pour défaut de livres, et parfois de simples cahiers. Tout cela va se ressentir sur leurs études. On peut affirmer que l’échec ou le niveau de certains élèves reflètent le niveau d’irresponsabilité de leurs parents. A côté de ces malheureux cas, il y a des situations où les parents se sont sacrifiés pour que leurs enfants puissent bien étudier.

Dans les villes surtout, ces dispositions pour donner à l’enfant une bonne éducation, côtoient des sollicitations perverses qui égarent les enfants peu consciencieux de leur devenir. Il peut arriver que les sacrifices consentis par la famille soient réduits à néant par le climat général qui prévaut dans l’établissement où il se trouve. Des chefs d’établissements ne recrutent pas des enseignants ayant le niveau requis pour dispenser un enseignement, et ce malgré les textes pertinents du ministère en la matière. D’autres cessent de payer correctement leurs professeurs dès la fin du premier trimestre, prétextant que la majorité des élèves ne se sont pas acquittés de leurs frais de scolarité. Il existe toute une foule d’autres raisons qui peuvent rendre les sacrifices des parents infructueux.

Mais parmi tous ces cas, c’est le comportement du parent qui ne respecte pas ses engagements en payant à temps et en totalité les frais de ses enfants qui est mis en avant. Que doivent et que peuvent faire les structures qui accordent les prêts scolaires ? Afin de ne pas faire un investissement improductif, n’est-il pas possible qu’elles versent la totalité de la scolarité à l’établissement auprès duquel elles se seront assurées que l’enfant y a été inscrit régulièrement ? Elles remettraient alors le reliquat au parent qui l’utilisera comme il veut. Ce serait, nous semble-t-il, un des mille et un moyens de limiter le manque de responsabilité de certains parents dont les effets sur les enfants sont incommensurables.

Et dans la mesure où les prêts scolaires font désormais partie de notre vie, il y a lieu d’entreprendre tout ce qui est possible pour que ledit prêt bénéficie en priorité à celui ou celle au nom de qui il a été demandé et accordé.
En dehors de la mauvaise gestion ou utilisation qu’en font les uns et les autres, les prêts scolaires, en cette période de vie chère, sont un moyen honnête pour financer les études des enfants, en attendant que l’Etat prenne ses responsabilités et toutes ses responsabilités pour éduquer et former ses citoyens.

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