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La spiruline : une algue aux multiples vertus

Publié le mercredi 12 novembre 2003 à 10h01min

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Situé à l’entrée de Loumbila sur l’axe Ouaga-Kaya, le centre Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus s’occupe des enfants déshérités. Il a introduit dans ses activités la culture de la spiruline, une algue microscopique pluricellulaire, pour pallier le manque en protéines dont souffrent généralement les pensionnaires du centre. Au-delà, il la commercialise également.

"Tout le monde consomme la spiruline ici au centre Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus". Ces propos de la sœur Marie Claire Tio, responsable du Centre, traduit l’importance accordée à la spiruline dans le repas quotidien des habitants de Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus. En effet, poursuit sœur Marie Claire, "tous les matins, nous utilisons la spiruline dans la bouillie des enfants. Sa consommation nous a permis de pallier la malnutrition de beaucoup de nos enfants".

Cultivée dans 4 bassins, la spiruline dont la production journalière est de 1 kg de pâte sèche, est en partie auto-consommée et en partie commercialisée. A 17 000 FCFA le kg, cette algue est vendue au centre et à l’Eau Vive. Elle est aussi exportée en France chez un acheteur agréé du centre.

Un prix que sœur Marie Claire trouve abordable car dit-elle, le prix du kg de spiruline en Côte d’Ivoire vaut 50 000 FCFA.

Par ailleurs, à l’Eau Vive, la spiruline est assaisonnée à de petits mets comme les gâteaux pour sa commercialisation.

Lamine Ouédraogo est l’un des 130 pensionnaires du centre.

Agé de 2 ans, il présente aujourd’hui une physionomie acceptable. "C’est grâce à la spiruline que Lamine a repris un peu sa forme. Il en raffole et la consomme sans l’aide d’un autre aliment. Sinon, à son arrivée, il était vraiment très affaibli", note sœur Marie Claire Tio. La spiruline peut être consommée directement. Mais compte-tenu de son odeur, beaucoup de personnes préfèrent l’assaisonner à un aliment. Pour cela, elle doit être utilisée quand le repas est prêt. Dans la sauce par exemple s’agissant du tô, dans le yaourt, etc. Ce qu’il faut éviter, c’est de l’utiliser au moment de la cuisson de la nourriture. Selon la sœur Tio, la culture de la spiruline dans le centre répond au souci de pallier la malnutrition dont souffrent la plupart des enfants à leur arrivée. En effet, les 130 enfants du centre âgés de moins d’un mois (Marguerite, l’une des pensionnaires le 22 octobre 2003, n’avait que 8 jours, sa maman ayant succombé à l’accouchement) à 20 ans sont généralement des enfants abandonnés ou orphelins.

La spiruline est une algue microscopique pluricellulaire. Elle fait partie de la classe des cymophycceae et de la famille des oscillatoriaceae et du genre spirulina, dont le nom scientifique est arthrospira plantensis. Elle se développe par photosynthèse comme les plantes et prospère naturellement dans les lacs salés et alcalins des régions les plus chaudes du globe. Nourriture traditionnelle des Aztèques du Mexique et des Kanembous du Tchad, plus riche en protérines que la viande, la spiruline est maintenant cultivée dans de grandes fermes en Amérique, en Inde, en Thaïlande, etc., car on lui découvre chaque jour plus de qualités intéressantes pour l’alimentation et la santé tant pour les hommes que pour les animaux. Par exemple, un enfant souffrant de kwashiorkor peut être rétabli rapidement si on lui donne une cuillerée à café de spiruline par jour. Selon des études, de par ses propriétés, la spiruline est un excellent complément alimentaire pour tous surtout très efficace dans les cas de malnutrition et d’anémie grâce à sa teneur en acides aminés, minéraux et acides gras essentiels. C’est un aliment idéal des végétariens du fait de sa teneur élevée en protéines (60 %). La spiruline attire de plus en plus l’attention des scientifiques. De nombreuses études ont montré des effets positifs de sa consommation sur la réduction du cholestérol et le renforcement du système immunitaire.

De façon empirique, note Sœur Noëlie Ouédraogo du Centre Sainte Thérèse,"la consommation de la spiruline par les enfants infectés par le VIH leur permet de reprendre des forces. On peut alors espérer qu’elle empêche le virus de progresser". Le constat de cette sœur pourrait engendrer des études plus approfondies car, il est déjà reconnu que la consommation de la spiruline renforce le système immunitaire. Comment ? C’est la question à élucider. La spiruline apparaît comme une algue de l’espoir qui aura un rôle de premier plan à jouer pour relever le défi alimentaire et pour servir de remède à certaines maladies qui touchent en particulier les pays en voie de développement.

Charles OUEDRAOGO


Encadré 1

Malnutrition infantile, anémie

Des effets remarquables sont observés à partir d’une prise de 2 à 5 g/jour selon le poids de l’enfant. La durée de la cure sera de l’ordre de 3 à 4 semaines, mais les premiers résultats apparaîtront normalement au bout de quelques jours. La spiruline peut être prise au moment des repas dans une petite quantité de bouillie, de sauce ou de riz. Pour un enfant en bas âge la spiruline doit être donnée en début de repas, lorsque l’enfant a suffisamment faim. Passés les premiers moment de surprise à cause de la couleur verte de la spiruline, elle est très bien tolérée et assimilée par les enfants.


Encadré 2

Santé préventive des adultes et des sportifs, des femmes enceintes et celles qui allaitent

Procéder par cure de 3 semaines, à raison de 5 à 10 g/jour (1 à 2 cuillerées à café par jour au moment des repas) sans interruption. La spiruline s’accommode parfaitement avec les crudités, les sauces, le riz, les pâtes, le yaourt. Elle peut aussi être mélangée avec l’eau, des sirops ou du jus de fruits (dissoudre auparavant dans un peu d’eau). Les doses peuvent être augmentées selon le souhait jusqu’à 40 g/jour.

N.B. : Pour profiter de toutes ses qualités nutritionnelles, la spiruline ne doit pas être cuite. La spiruline doit être conservée à l’abri de l’humidité, la lumière, de la chaleur.

Bien refermer l’emballage après utilisation.

C.O


La spiruline accroît les chances d’éviter la transmission mère-enfant du VIH", selon l’expert Vincent Guigon

Vincent Guigon, responsable technique d’Antenna technology, séjourne au Burkina Faso avec pour mission, d’intensifier la culture de la spiruline. Antenna technology est une structure franco-suisse spécialisée dans la culture de cette algue. Elle collabore depuis longtemps avec le Centre Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus.

Sidwaya (S.) : Comment cultive-t-on la spiruline ?

Vincent Guigon (V.G.) : La culture se fait d’abord en bassins de faible hauteur d’eau (20 cm de hauteur d’eau).

L’algue pousse très vite dans ces conditions. Ainsi, on arrive à une production supplémentaire de 20 % par jour. Cela veut dire que la quantité de spiruline mise en bassin double toutes les semaines.
C’est un des intérêts de la culture de la spiruline. Ensuite, elle est récoltée par filtration compte tenu du fait que ce sont des micro-organismes qui poussent par photosynthèse et qui sont de très petite taille. On obtient une espèce de boules vertes que l’on presse pour faire partir l’eau qu’elles contiennent. On les sèche pour les réduire en poudre qu’on conditionne dans des sachets.

S. : Il n’y a pas de produits chimiques qui interviennent dans la culture de la spiruline ?

V.G. : Tout dépend de ce qu’on appelle produits chimiques. Pour que la spiruline pousse, il faut qu’elle puise de la nourriture dans son milieu qui est l’eau. Donc, elle a besoin de carbone, d’azote et d’un certain nombre d’autres éléments en plus petite quantité comme le calcium, le potassium, le fer, le phosphore, etc. Pour l’obtention de ces éléments, il faut lui donner du sel marin, du bicarbonate, puis un certain nombre de sels, de potassium et de magnésium sous forme de nitrate. Il lui faut également une source d’azote qui est la plupart du temps, l’urée.

Ce sont des produits naturels mais on peut dire aussi qu’ils sont chimiques.

S. : N’importe qui peut-il cultiver la spiruline au Burkina ?

V.G. : Non. Bien sûr, on peut imaginer de petites cultures que j’appellerai cultures villageoises, c’est-à-dire qu’une famille ou un village peut décider de la cultiver.

On a quelques exemples qui ont été positifs. Par contre, on n’a pas mal d’exemples négatifs. C’est quand même une culture délicate, demandant pas mal de soins.

De ce fait, il peut y avoir des accidents de parcours dans sa culture.

Elle peut brutalement tombée malade, elle peut arrêter de croître, elle peut avoir un problème d’excès ou de manque de soleil, etc.

Donc, il faut une formation initiale non négligeable pour la cultiver.

S. : D’aucuns affirment de façon empirique que la spiruline lutte contre le Sida. Qu’en dites-vous ?

V.G. : Il faut faire très attention à la façon dont on formule les choses. On a effectivement prêté plein de qualités et de vertus à la fois nutritionnelles et thérapeutiques à la spiruline.

Concernant le Sida, je dirai que comme la spiruline a pour effet d’accroître les défenses immunitaires de l’organisme, il est vrai qu’elle peut aider un organisme infecté par le virus à se défendre contre les maladies opportunistes. Vu de cet aspect, elle peut contribuer à aider la personne infectée à mieux se porter. Mais elle ne guérit pas le Sida.

Par contre, il y a une composante dans la spiruline qui aide à ce que le virus ne soit pas transmis de la mère à l’enfant. Si la femme séropositive enceinte utilise la spiruline, elle accroît les chances d’éviter de contaminer son enfant.

C.O.

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