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Alerte contre les levées de milices : La République menacée

Publié le vendredi 14 mars 2008 à 11h21min

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La crise consécutive à la vie chère qui secoue actuellement le pays est riche en enseignements. En effet, elle aura montré que les décideurs n’entendent et ne réagissent que sous la pression des violences et de la rue.

Les actions empreintes de vandalisme des " sans culottes " ont finalement amené le gouvernement à prendre un arrêté portant suspension des droits de douane sur certains produits tel le riz, le lait, le sel…et ce, pendant une période de 3 mois.
Cette mesure susceptible d’apaiser un temps soit peu la tension sociale comporte néanmoins d’énormes insuffisances qui de ce fait risque de ne pas avoir d’incidence sur les prix de ces produits et donc sur le coût de la vie.

Dans le commerce et dans les affaires, l’on sait que la bonne foi est souvent la chose la moins partagée. Il s’avère donc utopique de croire que certains commerçants vont requalifier les prix de leurs produits en fonction des avantages qu’ils viennent de bénéficier au prix du vandalisme. Déjà dans certains milieux commerçants, l’on se laisse convaincre que seuls les grands opérateurs économiques qui ont une surface financière considérable pourront bénéficier de cette aubaine. Mais chacun sait qu’ils sont rares ceux qui ont un tel gabarit sans avoir une quelconque connexion avec les milieux mafieux de la ploutocratie régnante.

C’est alors la prime au copinage pour amasser et encore amasser !
Un autre enseignement de la crise vient de l’incarcération de Nana Tibaut, cette icône des gens en mal de repère et de leader. Le ministre de l’Administration territoriale et de la décentralisation Clément P. Sawadogo à coup de communiqués a sensibilisé l’opinion sur l’inexistence légale du fameux " Rassemblement des jeunes patriotes révolutionnaires " qui revendique l’agitation autour de la vie chère et dirigé par Nana Tibaut. Pourtant, c’est ce même Nana Tibaut et sa structure " fantôme " qui auraient été à l’origine -avec d’autres acteurs- de la haie d’honneur qui a " galvanisé " le président Compaoré pour les négociations de Marcoussis en 2003. Il n’est venu à l’idée d’aucun légaliste à l’époque de dire que Nana Tibaut n’a pas le récépissé de sa structure.

L’autre enseignement de cette crise et le plus effroyable d’ailleurs, est la tendance criminelle à la levée de milices dans la ville de Ouagadougou. Le maire de Nongremassom M. Zakaria Sawadogo a organisé des " éléments " pour contrer et casser les manifestants du 28 février dernier. " En tant que premier responsable élu de l’arrondissement de Nongremassom et sentant venir les choses, j’avais par avance organisé des jeunes volontaires qui le 28 février ont tenté de barrer la route à ces casseurs et brûleurs de pneus. " Extrait de l’interview accordée par le maire Zakaria Sawadogo au journal le pays du lundi 03 mars 2008. Les propos de ce maire d’arrondissement ont été appuyés par le maire central de la ville de Ouagadougou. Ainsi donc, des gens auraient à leurs services des " éléments " prêts à tout faire. Et justement, un de ces fameux " éléments " du maire a été accusé d’avoir poignardé un manifestant lors des événements. Sommes nous dans une république ? Les éléments légaux et attitrés commis par la république au maintien de l’ordre sont-ils devenus si impuissants au point que des individus fussent-ils maires s’arrogent le droit de lever des milices ?

La république court vraiment un véritable danger avec de telles pratiques. En effet, les textes fondamentaux stipulent que nul n’a le droit de se faire justice lui-même. Il est donc inconcevable que dans une république, des autorités se comportent en hors la loi et en toute impunité. Il n’est point besoin de faire remarquer que ce sont ces genres d’agissements qui sont à l’origine des guerres civiles qui plongent généralement les pays dans le chaos. Ce qui est étonnant c’est que les auteurs de ces pratiques dignes des Etats d’exception s’en vantent et évoquent leur ignominie à qui veut les entendre. Il faut se méfier des adeptes de telles méthodes qui sont prompts à opposer les Burkinabé entre eux pendant que eux s’enferment dans leur tour pour boire leur petit lait. Chaque crise révèle la réalité de la gouvernance, de la cohésion sociale mais met aussi à nu la bestialité qui sommeille en chaque homme.

Il faut transcender les passions, les ressentiments divers, les misères et l’abondance pour se consacrer sérieusement à la lutte contre la pauvreté et pour l’épanouissement des citoyens.
Car comme le dit si bien le président de l’Assemblée nationale de la RDC, Vital Kamerhe," la paix sans pain ne vaut rien." Qu’on se le tienne pour dit.

Par Bendré

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