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Pr Joseph Drabo : "Il faut amener les populations à faire le dépistage du diabète"

Publié le mardi 7 août 2007 à 06h38min

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Pr Joseph Drabo

Maladie silencieuse, le diabète gagne de plus en plus de terrain. Au Burkina Faso, les estimations donnent 2% de la population souffrant de cette maladie. Dans l’entretien qu’il a accordé à Sidwaya, le professeur Joseph Drabo, chef de services médecine interne au Centre hospitalier universitaire Yalgado Ouédraogo (CHU-YO) aborde les différents contours du diabète et donne des conseils fort utiles pour le prévenir.

Sidwaya (S). : Qu’est-ce que le diabète ?

Professeur Joseph Drabo (J. D.) : Il faut toujours préciser diabète sucré car lorsqu’on parle de diabète sans précision, il s’agit surtout du diabète sucré. C’est une maladie se traduisant par une augmentation anormale du taux de glucose dans le sang. On dit alors qu’il y a une hyperglycémie. Cette hyperglycémie est délétère pour certains organes de l’organisme humain et peut entraîner des complications assez graves.

Le diabète sucré se caractérise par un taux de glucose élevé. Aujourd’hui on établit le seuil à 1,26 g de sucre par litre de sang. Donc, tout patient qui a un taux de glucose supérieur ou égal à 1,26g/l à jeun est considéré comme diabétique.

S. : Existe-t-il alors d’autres types de diabète en dehors du diabète sucré ?

J. D. : Oui. Il existe d’autres types de diabète. Celui qui est le plus connu après le diabète sucré est celui appelé insipide. Il est lié au fait que l’organisme n’a pas la capacité de concentrer les urines parce qu’il lui manque une hormone appelé hormone antidiurétique. Son absence fait que le sujet ne peut plus concentrer les urines. Ce qui l’amène à se soulager beaucoup. Ainsi, on l’appelle diabète parce qu’il y a une élimination exagérée, insipide parce que les urines sont pâles et sans goût. Mais il est rare. En tout état de cause, quand on parle de diabète sans préciser, le plus souvent, il s’agit du diabète sucré.

S. : Situez-nous sur l’importance de cette maladie dans le monde, en Afrique et au Burkina Faso ?

J. D. : Il est prouvé aujourd’hui, que le diabète est une maladie en pleine expansion dans le monde, plus encore dans les pays du Tiers-monde où on pense que la prévalence va être de plus en plus élevée. Présentement, il y a plus de 100 millions de diabétiques dans le monde et les projections donnent des statistiques alarmantes puisqu’elles estiment le nombre de diabétiques à presque 300 millions à l’orée 2015. Quand on connaît le coût de la prise en charge de cette maladie, on se rend compte qu’elle constituera un grave problème de santé publique.

En Afrique, si dans les années 60, on soutenait qu’il n’y avait pas de diabète, aujourd’hui, il est connu qu’il augmente à un rythme important. Cela est valable aussi pour le Burkina Faso où il côtoie les problèmes de malnutrition, mais également des problèmes de maladies infectieuses : paludisme, diarrhées, maladies respiratoires et VIH/Sida. Malheureusement, s’ajoutent à cette liste déjà sombre, les maladies métaboliques comme l’hypertension artérielle et le diabète sucré. Au Burkina Faso, nous n’avons pas de chiffres exacts mais nous pensons qu’il y aurait entre 2 et 3% de diabétiques.

S. : Comment se fait la prise en charge médicale de cette pathologie au Burkina Faso ?

J. D. : Comme partout dans le monde, le traitement du diabète passe par plusieurs étapes. Il y a d’abord une prise en charge hygiéno-diététiques c’est-à-dire que, étant donné que l’organisme est incapable d’utiliser le sucre qui s’accumule, il faut que l’alimentation apporte le moins de sucre possible. Ainsi, il faut établir un régime qui va apporter le moins de sucre possible à l’organisme pour son bon fonctionnement.
De ce fait, on expliquera au patient sa diététique en lui faisant exclure les aliments trop riches en sucre, contrôler et diminuer les quantités de ceux qui sont moyennement riches en sucre, donc mettre l’accent sur les aliments qui en sont très pauvres.

Le deuxième élément de ce volet hygiéno-diététique est qu’il faut faire des activités physiques. Cela est d’autant nécessaire parce qu’il y a un diabète appelé type 2 qui est souvent associé à l’obésité. Les activités physiques alliées au régime, suffisent parfois à contrôler la glycémie chez certains diabétiques. Et lorsque le régime associé à l’activité physique ne suffit pas, on apporte alors des médicaments. Il y a deux groupes de médicaments. Les comprimés que l’on peut prescrire, mais également les injections, précisément l’insuline que l’on prescrit.

Certains diabétiques ne peuvent pas avoir une glycémie équilibrée sans l’insuline. On dit alors qu’ils sont insubino-dépendants. Ils vont nécessiter une injection d’insuline tous les jours. Pour les autres, les seuls comprimés associés au régime alimentaire suffisent très souvent à contrôler leur glycémie. Ce sont là les différents protocoles proposés dans la prise en charge. Mais, il faut noter que cette prise en charge ne peut pas être faite par un personnel non qualifié, non formé à cet effet. C’est pour cette raison qu’on a besoin que des médecins, des infirmiers soient bien outillés pour la prise en charge des patients.

S. : Pourquoi Sanofi-Aventis a organisé les 30 et 31 juillet 2007 un atelier sur la prévention et la prise en charge du diabète ?

J. D. : La prise en charge d’un diabétique requiert une certaine compétence. C’est une maladie qui a des répercussions physiques et nécessite un traitement à vie. De ce fait, il faut avoir du tact, savoir agencer les pièces du puzzle pour pouvoir proposer aux malades, la meilleure prise en charge. Par ailleurs, la prise en charge du diabète dure toute la vie. Les médecins spécialistes, vu leur nombre, ne sont pas capables de gérer tous les diabétiques du Burkina Faso. Il est donc nécessaire que d’autres médecins généralistes puissent avoir un bagage leur permettant de prendre en charge en amont les diabétiques sans complications.

C’est pourquoi Sanofi-Aventis a décidé de donner, grâce à cet atelier, des compétences aux médecins généralistes, premiers à diagnostiquer les patients afin qu’ils puissent apporter une prise en charge adaptée. Une prise en charge adaptée évite les complications et la prise en charge spécialisée. Au demeurant chacun des participants à cet atelier a reçu gratuitement un glucomètre et une boîte de bandelettes afin de pouvoir mesurer la glycemie de leurs patients.

S. : Des conseils en rapport avec cette pathologie

J. D. : Ce sont des conseils relatifs à la prévention et à la prise en charge. Si nous constatons que dans le monde, le nombre de diabétiques ne fait qu’augmenter, c’est parce qu’il y a un changement de mode de vie, une occidentalisation du mode de vie, une tendance à l’obésité, des habitudes alimentaires avec une consommation excessive de graisse et de sucre. Le premier comportement à adopter est d’agir sur ces facteurs que nous appelons à risque. Il faut que les gens apprennent à faire des activités physiques, à faire du sport, à consommer sainement. Eviter l’obésité pour ceux qui ont un excès de poids.

Par ailleurs, du fait que le diabète évolue silencieusement, à bas bruit, et que très souvent, les gens ne sont dépistés que déjà confrontés aux complications, il est nécessaire qu’on amène les populations à faire le dépistage. En tous les cas, cela éviterait les complications. Une fois le dépistage fait et que le diabète avéré, il faut que le malade se fasse suivre par un personnel qualifié qui saura donner les informations justes et le traitement adapté. Ainsi, on pourra éviter les graves conséquences qui en déroulent.

Entretien réalisé par Charles OUEDRAOGO

Sidwaya

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