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Premières journées du Burkina au Canada : Les paris et enjeux d’une relance diplomatique

Publié le jeudi 6 mai 2004 à 11h23min

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Juliette Bonkoungou

Du 14 au 25 avril, la mission du Burkina Faso au Canada a tenu promesse en organisant pour la première fois des Journées culturelles dans deux villes essentielles que sont les cités de Québec et de Montréal. Cette démarche à elle seule, apparaît comme une témérité dans un environnement qui n’est pas souvent ouvert au changement.

Or, toute innovation, toute remise à niveau d’une institution entraîne une modification de manières de faire qui ne sont pas sans conséquences sur les habitudes de routine et d’immobilisme. Pourquoi chercher à changer quand l’opinion en général retient qu’une chancellerie c’est une retraite dorée où on est couvert d’honneurs et de minauderies avec les flonflons et les civilités de protocoles bouffons.

Assurément, cette forme de représentation ne cadre pas avec certaines préoccupations de Julie la Bosseuse qui, d’entrée de jeu, a campé le décor sans ambages en déclarant à ses collaborateurs : "Je ne suis pas au Canada pour perdre mon temps. Je crois au Burkina Faso, notre pays, je respecte la grandeur de son peuple dont je suis issue et tant que je vivrai, où que je vivrai, j’utiliserai la plus petite de mon énergie à me battre pour le servir au mieux de ses intérêts et je compte sur vous pour m’accompagner dans cette tâche. Dans l’immédiat, je vous exhorte à vous investir pour consolider et promouvoir l’image de marque de notre pays quelque peu écornée ces dernières années. Je refuse que notre pays soit toujours situé par rapport à des pays tiers. Le Burkina Faso ne doit plus être une toponymie métèque nous devons travailler à exister par nous-mêmes, ne pas être au Nord, au Sud ou à l’Est de tel ou tel pays. Le Burkina au Canada doit pour les Canadiennes et Canadiens, devenir une partie ciblée du globe".

Il y a lieu effectivement qu’il y ait du répondant car, en général, les chancelleries à force d’être affables, ont laissé faire au point que, bien des fois, des partenaires avec qui elles travaillent et qui sont censés planifier et animer la coopération ignorent eux-mêmes comment camper géographiquement le Burkina.

Il y a donc une nécessité à effectuer une introspection, à nous remettre en cause en tant que fraticier d’un secteur aussi névralgique qui fonctionne au pouls des intérêts d’entités nationales. Il est difficilement admissible de se sentir ignoré du monde.

Dans notre cas, nous pouvons nous prévaloir d’être le Hollywood africain, deuxième producteur de coton dans la région. Et comment comprendre que les nôtres qui ont donné leur sueur à la floraison du café et du cacao soit si méconnus dans un monde où le café et le cacao ouest-africains sont assez présents au monde ? Assurément, s’il n’est pas question de revanche à prendre, il faut un rééquilibrage.

En prenant les rênes de la chancellerie d’Ottawa il y a à peine huit mois, on faisait le constat que bien des représentations étaient inconnues au bataillon. Là commençait l’élaboration des objectifs stratégiques qui fixaient les priorités de la mission dont la finalité est de donner davantage de lisibilité à notre pays avec laquelle tout commence en diplomatie.

Le Burkina Faso a des intérêts à engranger au Canada, un des rares pays du G-8 à se faire l’avocat de l’Afrique pour s’en convaincre, il faut rappeler que cette fédération n’a pas de passé colonial, ce qui la met naturellement dans les grâces de sympathie des pays africains dont on sait combien ils ont souffert des affres de la domination. Le Canada fait preuve d’équité dans une attitude de visionnaire.

En parrainant le Népad à Kananiskis, il a plus fait que de se positionner comme un accompagnateur des pays émergent dans un monde où les rhéteurs de la globalisation sont les premiers à se dédire des principes et règles du libre échange qu’ils ont eux-mêmes édictés. Là encore, il faut se féliciter de la position adjuvante du Canada dont le soutien n’a pas fait défaut au Burkina Faso qui a pris la tête d’une croisade internationale contre les subventions dans la guerre du coton.

En peu de temps, les échanges commerciaux entre ce pays et le Burkina Faso sont passés du simple au double, un pays qui s’investit dans l’éducation, la recherche minière et le soutien aux économies de base qui, s’engage dans la promotion de nos productions culturelles ainsi que le cinéma qui fête avec Vues d’Afrique vingt (20) ans de partenariat.

D’autre part, nous notons l’affluence des accords. Au cours des journées eulhrelles du Burkina à Québec, la Fondation des parlementaires québécois a signé une entente qui prévoit la formation d’ouvrages adamiques à structures d’enseignement au Burkina. De plus, au cours du premier trimestre, le Québec a presque doublé le volume des bourses d’exemption allouées à notre pays.

Comment ne pas admettre qu’il y a un changement, qu’il y a un regard nouveau reconsidéré pour notre pays qui se bat pour accélérer son émancipation ? En décryptant des signes évidents, nous évoquons le fait que ces derniers mois il y a un flux d’échanges institutionnels rarement égalé depuis l’instauration de nos relations diplomatiques à l’aube des indépendances.

Aujourd’hui, un pan de notre diplomatie dans le Nord américain est amorcé. Il mérite soutien et suivi pour la simple raison que le Canada constitue une alternative. Cela interpelle de notre part un effort d’accompagnement afin de permettre à la mission d’Ottawa de jouer pleinement son rôle.

Aussi longtemps qu’il sera question des intérêts du Burkina, il serait salutaire de ne ménager aucun répit pour favoriser la mise en œuvre de programmes rédempteurs susceptibles de créer un mur pour nos besoins. On ne récolte que ce que l’on a semé. C’est pourquoi on verra de plus en plus des initiatives audacieuses. Pour reprendre l’ambassadeur Bonkoungou Yaméogo Juliette, "Il n’y a pas de petite nation, il n’y a pas de petite diplomatie. Bien des nations au monde sont là pour l’enseigner. Il n’y a que la conviction qu’on se fait de son destin. C’est le nom du lion qui garde sa maison".

Jacques Prosper BAZIE
Attaché de presse,
ambassade du Burkina au Canada

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