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Les jeunes et la voiture : « France au revoir », un mal nécessaire

Publié le samedi 7 octobre 2006 à 08h51min

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L’acquisition d’une voiture d’occasion entraîne d’autres dépenses supplémentaires (carburant, pannes mécaniques parfois intempestives) et des a priori vis-à-vis des jeunes acquéreurs. Mais pour eux, une « France au revoir » en dépit des problèmes est un mal nécessaire.

Finie l’époque où la voiture était seulement l’affaire des nantis. Depuis quelques années, grâce au « boom » des véhicules d’occasion ou de seconde main en provenance d’Europe, beaucoup de jeunes aspirent à une « quatre roues ». Ainsi, fonctionnaires, commerçants... tournent le regard vers ces véhicules communément appelés « France au revoir ». Si leur ambition est la même, les raisons divergent d’un jeune à un autre.

M. Saïdou Zongo, un jeune cadre a acheté sa « France au revoir » pour parer aux situations d’urgence. Selon lui, il a dû solliciter la voiture d’un voisin et ce, en pleine nuit, afin d’évacuer sa femme à l’hôpital. « Mieux vaut avoir sa propre voiture quand on peut s’en acheter. Cela permet d’éviter des situations de ce genre », confie-t-il.

Thomas Ily chargé de marketing dans une société de la place a, quant à lui, une autre motivation. Pour lui, la voiture est une marque de confiance de la part de ses interlocuteurs. « Ailleurs je m’habille en conséquence », ajoute-t-il. Si la voiture permet à M. Ily de rehausser son image, pour d’autres par contre, cela relève d’un simple plaisir. C’est le cas de M. Boukaré Sawadogo, un commerçant. Il préfère une petite voiture pour ses sorties. C’est un besoin de jeune. Maintenant je passe mes week-ends sans problème, se réjouit-il à bord de son véhicule aux vitres teintées. Un plaisir certes, mais que d’efforts fournis. Il a dû faire plusieurs mois d’économies afin de se procurer ladite « coche ». A l’image de ce dernier, beaucoup d’autres consentent des sacrifices. Pour d’autres c’est la croix et la bannière.

Ainsi pour s’acheter une voiture d’occasion, certains prennent des crédits bancaires ou s’endettent auprès d’amis. Il y en a qui vont jusqu’à vendre des biens familiaux telles que les parcelles. Mais, selon le sociologue Daouda Kouma, cela ne change rien à la donne. Les jeunes ont en priorité la maison. « Mais parfois la voiture permet de fructifier les affaires et construire rapidement » explique-t-il.

Faire le bon choix

Une fois l’argent en poche, les jeunes sont confrontés à un dilemme. Ils ont l’embarras du choix d’un point de vente à un autre mais également d’une marque à une autre. Comment trouver la voiture en meilleur état, « qui fait jeune » ! Alors ils doivent faire le choix entre les nombreuses marques et leurs séries. On y rencontre des Toyota Corola, des Nissan Sunni, de OPEL... et de toutes les couleurs. « Certains sont regardants sur la couleur considérée comme attrayante, repoussante. Pour d’autres la couleur rouge bordeau est féminine et le bleu masculin », fait remarquer N. Y., un vendeur de véhicules.

Les RAV IV, Jaguard, Golf ou encore les véhicules décapotables constituent le rêve de bon nombre de jeunes. Cependant, pour faute de moyen, la grande majorité se contente du véhicule à la hauteur de leur pouvoir d’achat. « J’aurais souhaité une Golf III, c’est par manque de moyens que j’ai dû me contenter d’une autre voiture » note M. Ily, préférant acheter sa voiture au comptant. L’achat par tempérament est également possible affirme N.Y., vendeur de véhicules d’occasion. Aussi, le payement se fait sur la base de la confiance.

Pour un véhicule de trois millions de F CFA, un acompte d’un million est nécessaire. « Lorsque le véhicule n’est pas immédiatement disponible, il suffit d’une semaine maximum pour la ramener du port de Lomé (Togo) » atteste N.Y. L’achat d’un véhicule se passe suivant la règle de tout marché noir. Le client apprécie l’apparence, puis l’intérieur de la voiture, écoute ensuite le bruit du moteur puis s’engagent toutes les formes de négociations.

Les supplications, la parenté à plaisanterie, les invocations divines et les petites colères sont alors légion sur ces aires de vente. L’essentiel est de trouver un terrain d’entente. Toutefois, certains évitent cette démarche et choisissent de faire le déplacement au Togo ou au Ghana avec un mécanicien. C’est le cas de Eric Drabo. Il a acheté un véhicule « Tout-terrain » à Lomé, « moins cher et en bon état », estime-t-il.

Un casse-tête chinois

En bon état ? Pourtant, il n’est pas rare de voir en pleine circulation ces « quatre roues » s’arrêter brusquement pour panne technique. Alors on pousse, on pousse... Quelquefois, elle preinnent feu. A ces incertitudes s’ajoutent d’autres angoisses telles la consommation excessive de carburant ou la vétusté des pièces. Cette situation fait le bonheur des nombreux garages et magasins de pièces de rechange en plein essor.

Malgré tout, la voiture reste un luxe, un signe de richesse pour bon nombre de personnes. « Posséder une voiture fait de vous un homme fortuné. Vous êtes sollicité de toutes parts par des personnes convaincues que vous êtes aisé », déplore M. Zongo.
Mais au regard du profit qu’il en tire, il estime que sa « France au revoir » est un mal nécessaire.

Hamadou TOURE (hatoure@yahoo.fr)

Sidwaya

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