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Mme Toussida Ouédraogo, présidente de l’APSB : Une relation de confiance doit exister entre le patron et la secrétaire

Publié le samedi 5 août 2006 à 08h06min

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Toussida Ouédraogo

Elle a trente ans de métier. Assistante de direction à la BICIAB, Mme Toussida Ouédraogo préside aujourd’hui l’Association professionnelle des secrétaires du Burkina (APSB). C’est cette dame qui connaît et aime son boulot qui s’exprime ce mercredi 2 août 2006 sur la vie de l’association qu’elle dirige, de la secrétaire et des patrons...

Sidwaya Plus (S.P.) : Trente ans de professionnalisme dans le secrétariat, que rétenez-vous de cette collaboration avec vos anciens patrons ?

Mme Toussida Ouédraogo (T.O.) : J’ai travaillé avec plusieurs patrons. Je suis secrétaire par vocation. J’ai choisie ce métier après avoir étudié au lycée technique où j’ai eu un BAC G1, ensuite j’ai obtenu un BTS. Naturellement j’ai fait le secrétariat puis j’ai été promue assistante de direction par promotion interne. Etre secrétaire est un travail exaltant et difficile à la fois parce que non seulement vous travaillez avec des patrons mais vous devez gérer et comprendre les usages du service. Il faut jongler tout cela de manière professionnelle.

Je ne dis pas que j’excelle dans mon domaine, mais j’essaie de faire de mon mieux. Les formations à travers l’APSB m’ont donné une ouverture. Je vis de mon travail et tout va bien.

S.P. : Si vous devriez recommencer votre carrière, seriez toujours secrétaire ou bien opterez-vous pour un autre emploi ?

T.O. : Je serai toujours secrétaire parce que le métier est polyvalent. C’est parce que les gens méconnaissent notre cursus, sinon en année de BTS nous étudions l’économie, le droit, la gestion, l’économie générale, l’économie et l’organisation des entreprises, donc nous avons un cursus complet. Souvent, les gens ne voient pas ce volet. Ils ne voient que la saisie et le téléphone. Le secrétariat, c’est avant tout, l’organisation, la méthode. La méconnaissance fait que les patrons sous-emploient leur secrétaire.

Quand vous embauchez une jeune secrétaire de direction, qui est confinée à des tâches d’exécution, elle restera telle pendant X années. Or, elle peut aller à des réunions, prendre des notes. Il faut l’apprentissage car toute formation est composée d’un volet théorique et pratique. Il revient à la secrétaire de faire comprendre à son patron qu’il y a certaines tâches qu’elle est capable d’accomplir.

S.P. : Votre association APSB a actuellement 15 ans d’expérience. Quels sont ses objectifs majeurs ?

T.O. : Notre association a pour objectif premier, le regroupement des secrétaires toute catégorie confondue. On l’a suffisamment dit mais les gens pensent que c’est un regroupement de secrétaires de haut niveau. L’APSB est ouverte à toutes, quelque soit le niveau.

On y dénombre effectivement des secrétaires de haut niveau mais aussi des secrétaires de niveau moyen. Tout cela concourt à l’apprentissage car nous y sommes pour apprendre.

Deuxièmement, l’association vise la valorisation de notre métier par le biais de la formation. Nous apportons également notre appui-conseil à des secrétaires qui sont en difficultés, qui ont des problèmes de communication, ou tout simplement qui ont besoin de stage, ou même de placement (emploi).

La structure de notre association, comprend un congrès qui regroupe tous les membres, le conseil annuel qui regroupe le bureau national et les présidents de sections. Nous avons treize sections réparties sur dix huit provinces.

En ce qui concerne nos relations avec les autres, nous faisons partie de la Fédération africaine des secrétaires et assistantes de direction (FASAD).

Nous assumons la vice-présidence chargée de l’Afrique du Nord, et nous avons un poste de commissariat aux comptes. Le siège de cette fédération est actuellement à Abidjan.

Nous faisons énormément des formations, puisque c’est le but même de notre association. Nous avons fait deux spots majeurs de sensibilisation que vous avez dû certainement voir à la télévision sur l’accueil téléphonique, l’accueil physique et le secret professionnel.

Nous intervenons aussi dans les établissements d’enseignement technique qui enseignent le secrétariat pour donner des conférences. Nous sommes beaucoup sortis dans les provinces pour former nos membres sur l’accueil physique et téléphonique qui est un module important pour le métier.

Nos réunions se tiennent régulièrement ainsi que nos conseils annuels qui visent à faire le bilan de l’année écoulée avec les sections pour connaître nos forces et nos faiblesses.

S.P. : Combien de membres compte votre association ? Et quel est le taux des secrétaires-hommes ?

T.O. : L’association compte de nos jours 500 à 600 membres et nous pensons qu’il y en aura plus. La sensiblisation doit se poursuivre, c’est un travail de longue haleine. Et si l’on ne dispose pas suffisamment de ressources, ce n’est pas toujours facile. Nos cotisations sont modiques. Il faut être toujours sur le terrain alors que nous sommes tous travailleurs.

Donc ce sont nos temps libres que nous utilisons pour exécuter les activités ; c’est-à-dire qu’après le service et pendant les week-end. Comme quoi, notre vie est une suite de boulots.

S.P. : Qu’en est-il du nombre des hommes ?

T.O. : Les hommes représentent aujourd’hui 1 % de nos membres. Cela s’explique aisément par la polyvalence du métier. En fait, beaucoup d’hommes viennent dans le secrétariat, seulement ils n’y demeurent pas longtemps. Voilà pourquoi, on y voit peu d’hommes. Ceux qui viennent font par la suite une virée vers d’autres métiers.

S.P. : L’Association existe depuis 1991 et vous venez de célébrer son quinzième anniversaire. Quel bilan faites-vous ?

T.O. : Je retiens ceci : beaucoup de travail et beaucoup de satisfaction. Je me suis rendu compte que quelque part, moi-même j’ai beaucoup appris ainsi que toutes celles qui sont membres de l’association. Les gens s’intéressent à ce que nous faisons. Les patrons comprennent de plus en plus qu’il faut envoyer les secrétaires en formation, ce qui est une bonne chose. Cela contribue à améliorer le niveau de leurs collaborateurs et collaboratrices.

Tous nos plans quinquennaux ont été jusque-là exécutés à 80 %, cela est un motif de satisfaction. Nous avons pu commencer la construction de notre siège à Ouaga 2000 sur un terrain de 1 800 m2. Cela a été rendu possible grâce à la Tombola que nous avons organisée avec les produits de nos activités et les différents sponsoring. On a vraiment mis les chaussures à nos pieds et nous avons marché. Nous avons pu réaliser la clôture, un bâtiment R+1 en finition.

Le bâtiment comporte un cafétéria, un hébergement de seize chambres, un soubassement (en chantier).Au regard de tout cela, je suis animée par un sentiment de satisfaction. Mais beaucoup reste à faire : des chantiers et la sensibilisation.

S.P. : Pendant longtemps, l’on a pensé que le métier de secrétaire était exclusivement réservé aux femmes. Pourquoi ?

T.O. : Au contraire. Parce que, pendant les indépendances, les commis étaient des hommes, ils tenaient lieu de secrétaire. Vous savez que dans les années 1960, une fille qui arrivait au cours moyen était déjà pubère. Cela a coïncidé avec la parution des premières écoles de dactylographie. Et comme la marché de l’emploi n’était pas comme ce qu’il est aujourd’hui, la fille déjà grande, sachant taper la machine et lestée d’un certificat était déjà embauchée comme secrétaire. C’est ce phénomène qui a inversé la vapeur, sinon qu’au départ le métier était occupé par des hommes. Donc il y a lieu de dire que le métier s’est féminisé par la suite.

S.P. : Le 28 juillet dernier, vous avez élu le directeur général de la LONAB comme le patron de l’année. Est-ce qu’on peut savoir les critères sur lesquels vous vous êtes basées pour désigner le patron de l’année ?

T.O. : Le critère est d’abord le patron qui a formé le plus de secrétaires et qui a aidé l’association de façon significative.

En ce qui concerne la LONAB, depuis 1994 cette institution nous soutient constamment. Nous avons fait notre premier momento, c’est un fascicule remis à tous nos séminaristes lors de nos formation. C’est la LONAB qui nous a aidé. La LONAB a formé plusieurs de ses secrétaires au Burkina comme à l’étranger. Et, à chaque fois que nous avons approché la LONAB pour un besoin, elle a toujours fait quelque chose pour nous. Donc, l’un dans l’autre et comme le secrétaire a une mémoire d’éléphant, nous avons désigné le DG de la LONAB comme patron de l’année.

Mais, indépendamment de cela, il y a huit patrons méritants que nous avons primés au cours de notre soirée. Il s’agit des patrons des institutions suivantes : la direction régionale de la Chambre de commerce, d’industrie et d’Artisanat de Bobo, le Centre Muraz, la Société BTM, le Bureau des Mines et de la géologie du Burkina (BUMIGEB), le Centre national de recherche scientifique et technologique (CNRST), le secrétaire permanent de la Commission de privatisation, la Société nationale burkinabè d’électricité SONABEL) et la Société nationale des postes (SONAPOST).

Ce sont des patrons qui ont tous posé des actes positifs. Et comme l’on ne peut choisir qu’un seul patron de l’année, nous avons décidé à l’occasion de notre quinzième anniversaire qui est un événement très important de notre association, de primer ces patrons et leur prouver notre reconnaissance. C’est une manière de les honorer et de les encourager.

S.P. : Quelles sont les grandes qualités d’une secrétaire ? On dit souvent que la secrétaire ne doit pas avoir la langue légère pour ne pas divulguer les secrets de la maison...

T.O. : La discrétion doit être cultivée par tout travailleur. Bien sûr la secrétaire est au carrefour des informations. Quand on est secrétaire, l’on doit posséder des qualités intrinsèques qui sont intellectuelles. C’est-à-dire qu’il faut connaître son métier. Il faut avoir des aptitudes physiques : ne pas être toujours malade. Quand vous êtes indisponible, vous ne pouvez pas être une bonne secrétaire. Quand vous êtes caractériel (le) vous ne pouvez pas l’être non plus. Il faut que la secrétaire soit capable de travailler sous pression.

Parlons maintenant des qualités morales. Une secrétaire, bonne physiquement, qualifiée, si elle n’est pas discrète, ne pourra pas bien réussir. Car une secrétaire moyenne pourra s’améliorer par le biais de la formation. Mais une secrétaire qui ne peut pas se taire, ce n’est pas bien. Mêmes les petites choses ou anodines qu’elle dit peuvent avoir des conséquences graves sur le service. Raison pour laquelle on recommande la discrétion.

S.P. : Il arrive néanmoins que le secret s’échappe du secrétariat quelque fois dans le domaine des passations de marché par exemple. Que faire ?

T.O. : Nous avons réalisé un spot de sensibilisation pour montrer aux secrétaires et au public aussi qu’il ne faut pas vendre la mèche. Nous avons mis l’accent là-dessus. Mais cela s’adresse particulièrement à des secrétaires qui sont à des postes très sensibles.

Vous savez qu’au niveau des services, il arrive que ce soient les patrons eux-mêmes qui se jettent les peaux de banane pour la course au fauteuil.

Et puis le secret professionnel n’est pas seulement l’affaire du secrétariat. Il y a le secret médical par exemple.

S.P. : Une autorité disait un jour ceci : « Entre la secrétaire et le patron il y a une complicité ». L’idée a été mal interprétée en son temps par le public. Comment la comprenez-vous ?

T.O. : La complicité veut dire la confiance. Si le patron ne fait pas confiance à la secrétaire parce qu’il se dit qu’elle va divulguer ses secrets ils ne pourront pas travailler. C’est pour cela qu’on parle du duo patron/secrétaire.

S.P. : Pourquoi les secrétaires ont tendance à considérer leurs patrons comme leur propriété privée ?

T.O. : Ce n’est pas le cas. Quand vous venez le matin pour travailler, vous avez déjà la feuille de route. La secrétaire note tous les rendez-vous de la journée. Et s’il y a des visiteurs qui se présentent sans rendez-vous, que peut faire la secrétaire ? A la limite elle lui proposera une autre date.

S.P. : Professionnellement parlant, quelle différence y a-t-il entre une secrétaire de direction et une assistante de direction ?

T.O. : La secrétaire de direction est celle qui a le BAC G1 plus un BTS. L’assistante de direction est la personne qui a le BTS ou le DUT, qui après quelques années de profession a été promue.

En parlant de tâches assignées à chacune d’elles, nous pouvons dire que l’assistante de direction fait beaucoup plus de travail de conception.

Généralement, dans les services où il y a l’assistante de direction, il y a aussi une secrétaire de direction. Donc, c’est elle qui coiffe le secrétariat. En plus de ses tâches de routine, elle peut faire un travail de conception. Par exemple, l’assistante de direction est à même de conduire l’organisation du Conseil d’administration du début à la fin pour rendre compte au patron. Elle travaille en collaboration avec la secrétaire de direction.

Il faut noter que tout dépend des structures. Il y a des structures où il n’existe pas d’assistante de direction et c’est la secrétaire de direction qui fait tout.

S.P. : Quelles sont vos perspectives au sein de l’APSB ?

T.O. : C’est continuer la sensibilisation encore et toujours et créer davantage d’autres sections. Nous sommes actuellement dans 18 provinces, mais notre objectif est d’être représentative dans tout le pays. Partout où il y a vingt secrétaires qui ont envie de se regrouper, nous allons les aider. En définitive, je tiens à remercier les Editions Sidwaya qui nous ont toujours soutenus.

Entretien réalisé par S. Nadoun COULIBALY (coulinad@hotmail.com)
Nelson CONGO (Stagiaire)

Sidwaya

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