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Education pour tous : Le rêve risque de virer au cauchemar

Publié le vendredi 23 juin 2006 à 07h47min

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Un malheur n’arrive jamais seul. C’est la conclusion à laquelle l’on pourrait aboutir si l’on arrive à égrener tout le chapelet de misères qui frappent de nos jours les Burkinabè. En effet, ceux-ci n’ont pas fini de ruminer leur mauvaise fortune liée à la hausse du coût du carburant, qu’ils doivent faire face à des frais de scolarité encore plus élevés à partir de la rentrée scolaire prochaine.

Le tout se passe dans une atmosphère généralisée de renchérissement du coût de la vie. L’année dernière déjà, une augmentation desdits frais avait été subie par des parents d’élèves désorientés. Comme quoi, les années se suivent et se ressemblent, avec leur cortège de difficultés qui deviennent de plus en plus insurmontables pour certains. Au Burkina, à l’instar de pays voisins, tout ou presque s’achète et se vend très cher.

Livré à lui-même (l’Etat, comme Ponce Pilate, s’étant lavé les mains depuis fort longtemps), le Burkinabè moyen se cherche. Ses cauchemars ne font que se multiplier, lui rendant blanches presque toutes les nuits qu’il passe dans une maison dont il paie le loyer au prix de mille et une acrobaties. Souvent, il est contraint de jouer au chat et à la souris avec son bailleur, lui étant bien entendu dans le rôle très peu flatteur du petit rongeur.

Que faire avec cette annonce d’augmentation des frais scolaires à partir d’octobre 2006 ? Si ce coup de gourdin ne l’a pas laissé totalement groggy, où trouvera-t-il les moyens pour assurer la rentrée scolaire prochaine alors qu’il n’a pas fini de payer le dernier prêt scolaire et celui qu’il a pris pour les fêtes de fin d’année et autres ramadan et tabaski ? La vie étant dure dans tout le Faso, rencontrera-t-il une âme charitable qui lui tendra la main salvatrice pour rembourser les sacs de riz pris mensuellement chez le boutiquier d’à-côté qui, lui aussi, avec ses problèmes, refuse désormais de faire crédit ? Ou alors, osera-t-il en arriver à la solution radicale de ne pas mettre ses enfants à l’école ?

Toutes ces interrogations pourraient trouver réponse si nous avions un Etat qui, sans se "réengoncer" dans son costume d’Etat-providence, se donne réellement comme priorité le mieux-être de ses citoyens. Se nourrir, se loger, se vêtir, se soigner et s’instruire, qui sont généralement considérés comme les 5 besoins fondamentaux de l’homme, devraient constituer les 5 priorités essentielles de l’Etat. Et l’éducation étant la base de tout développement, l’Etat a le devoir de s’engager avec plus de conviction dans ce secteur pour rendre facile à tous les enfants burkinabè, sur toute l’étendue du territoire national, l’accès au savoir. Comme on ne gouverne pas avec des états d’âme, comme le disait en substance et à juste titre le Premier ministre, le gouvernement burkinabè doit s’engager à rendre l’école obligatoire. Ceci passe par la mise en place d’un enseignement de qualité, distillé par des éducateurs de qualité, formés convenablement dans le temps qu’il faut et non en 5, 6, voire un mois.

Dans cette logique, les écoles publiques désertées, pour cause d’effectifs pléthoriques, de manque de matériels didactiques et d’enseignants qualifiés, doivent pouvoir retrouver toute l’attention requise afin de jouer pleinement leur rôle, et contribuer à concrétiser le slogan "l’éducation pour tous". Ainsi, les écoles privées, qui ont fait leurs preuves mais qui ont également leurs limites, viendront en appoint aux efforts de l’Etat. Du reste, les cinq doigts de la main n’ayant jamais été égaux, ces écoles, initialement réservées à une certaine classe, conserveront toujours leur clientèle de choix.

Aucun parent ne voudrait se sentir coupable d’avoir laissé son enfant dans l’obscurantisme en ne l’accompagnant pas sur les sentiers du savoir. Le drame de nos jours est que les parents se saignent pour mettre les enfants à l’école. Mais malheureusement, pour plusieurs raisons scandées constamment par les syndicats, nous avons un enseignement au rabais, le tout couronné par une absence criarde de perspectives d’emploi.

Il urge pour l’Etat burkinabè de trouver les mécanismes pour un équilibre entre la quantité et la qualité dans l’enseignement. Dans ce sens, un plan stratégique devrait être mis en branle, dans la perspective de parvenir à long terme à des résultats probants.

Bien que des instances, telles que l’initiative de Bamako, fassent obligation aux Etats de consacrer 20% de leur budget aux secteurs sociaux comme l’éducation et la santé, la réalité sur le terrain semble être tout autre. L’argent du contribuable est parfois utilisé dans des dépenses de prestige et, pour certains Etats d’Afrique, dans les armements, le reste des secteurs subissant d’éternels colmatages. On bouche un trou en en créant d’autres, dans un mépris total de toute vision prospective. A ce rythme, le développement sera peu ou pas solidaire, ce qui rendra tout progrès difficilement possible.

Le Pays

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