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Coup d’État du 15 octobre 1987 : Un ancien agent de renseignements déplore l’« attitude irresponsable » des "grands" de l’époque

Publié le vendredi 17 décembre 2021 à 14h19min

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Coup d’État du 15 octobre 1987 : Un ancien agent de renseignements déplore l’« attitude irresponsable » des

Yaya Dramé, agent de renseignements en service à la DST (division de la surveillance du territoire) au moment des évènements tragiques du 15 octobre 1987, s’est dit convaincu que le pire pouvait être évité entre les deux leaders de la révolution, Thomas Sankara et Blaise Compaoré. C’est ce qu’on peut aussi retenir de sa déposition, ce vendredi 17 décembre 2021 devant le tribunal militaire.

Pendant environ 1h30 minutes, l’ancien agent des renseignements, du haut de sa forme imposante, né en 1963 à Bobo-Dioulasso et résidant à Ouagadougou, a dit tout ce qu’il sait des évènements du 15 octobre 1987 qui ont entraîné la mort du président Thomas Sankara et de douze autres de ses compagnons. Bagarreur, comme lui-même se reconnaît, Yaya Dramé retrace : "Jeudi 15 octobre, j’étais à la maison (j’habitais dans un celibaterium : cour commune), en train de causer avec mes voisins. C’est pendant ce temps que nous avons entendu les coups de feu. C’est là une dame (une voisine) a dit que ces coups de feu-là sont étranges. J’ai dit que ce sont certainement les CDR-là (comités de défense de la révolution) qui sont en train de s’amuser comme d’habitude. Mais la dame a dit non, que ces coups de feu-là sont sérieux. Je me suis levé, me doucher et je suis sorti. Je signale que j’habitais Ouidi. Au fur et à mesure que j’avançais vers le centre-ville, je croisais une foule qui s’affolait, chacun rentrait chez lui".

Le témoin explique que c’est à ce moment qu’il s’est ravisé pour repartir à la maison se mettre en tenue et regagner la FIMATS, d’où il apprendra la mort de Thomas Sankara.

Il constatera également l’absence du commandant des lieux, Sigué.

« ...En tout cas, Jean-Pierre Palm jubilait même »

Yaya Dramé affirme que les éléments de la FIMATS (Force d’intervention du ministère de l’Administration territoriale et de la Sécurité) étaient prêts à en découdre avec tout corps étranger, mais les adjoints du commandant Sigué et lui ont rapidement calmé la situation, car, pour eux, une réaction était sans objet avec la mort de Thomas Sankara et en l’absence du commandant.

"D’habitude, quand c’est comme cela, on ne peut que participer à la sécurisation de la ville", se résigne le témoin.

Fort de ces renseignements, Yaya Dramé déclare que des informations montraient que ça n’allait pas entre les deux leaders de la révolution et que des officiers étaient cités d’être d’un ou de l’autre camp. Il dit avoir appris par exemple, et avec confirmation, que Jean-Pierre Palm était du côté de Blaise Compaoré. "Il (Palm) est venu le lendemain matin à la FITMATS. En tout cas, il jubilait même", décrit le fonctionnaire de Police à la retraite.

Un projet de remplacer le Burkina par la « République du Mandingue » ?

Par la suite, Gilbert Diendéré les a rencontrés (les éléments de la FIMATS), dit le témoin. Il dit ne pas avoir en souvenance que Diendéré ait parlé du coup d’État, mais plutôt d’un "projet machiavélique" de Sigué. Ce projet, révèle-t-il, consistait en un coup et si ça réussissait, l’appellation Burkina allait être remplacée par la « République du Mandingue ».

Le témoin précise que Diendéré leur a confié que des documents ont été trouvés chez Sigué à cet effet.

Retour sur le contexte du drame, Yaya Dramé dit avoir, avant même le 15 octobre, expliqué à ses proches que cette situation de tensions entre les deux leaders pouvait se régler et devait d’ailleurs être réglée, étant entendu que ça se passe dans un milieu d’armes.

"Si j’étais à un grade supérieur, en tout cas, j’allais m’imposer, trouver une solution au problème. (...). Je regrette cette attitude irresponsable de beaucoup de grands à l’époque", denonce Yaya Dramé.

Le témoin révèle ici que le premier responsable de la DST à l’époque détenait dans la matinée du 15 octobre 1987, des informations par rapport à l’après-midi et qu’il a vainement cherché à rencontrer le président Thomas Sankara. Ce qu’il dit ne pas comprendre car, de son avis, il suffisait "de distraire" Thomas Sankara en cet après-midi pour l’envoyer hors du conseil et le drame aurait pu être évité.

O.L.
Lefaso.net

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