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52ème Sommet de la CEDEAO : La présidence de la Commission sera assurée par la Côte d’Ivoire

18 décembre 2017, 18:21, par KONE

Le Franc CFA et comorien : avantages et inconvénients
La monnaie joue un rôle très important dans la vie économique de tous les jours. Elle permet non seulement de faciliter les échanges de biens et services entre les individus que ce soit avec l’intérieur ou l’extérieur mais aussi de jouer le rôle d’unité de compte et de réserve de valeur.
Au moment où les pays africains étaient amenés à prendre leur indépendance, certains d’entre eux ont choisi de lier leur destin économique et monétaire à l’ancienne puissance coloniale la France à travers ce qu’on appelle communément la Zone Franc en abandonnant leur souveraineté monétaire.
Cette zone est formée de 15 Pays d’Afrique francophone regroupés sous différentes unions monétaires :
L’union monétaire ouest africaine regroupant 8pays : la Cote d’ivoire, le Sénégal, le Togo, le Niger, le Mali, le Benin, le Burkina Faso et la Guinée Bissau
L’union monétaire Est africaine qui comptabilise 6 pays à savoir le Gabon, la Centrafrique,la Guinée équatoriale, le Cameroun, le Congo et le Tchad
L’Union des Comores
Au sein de ces pays, 3 institutions sont chargées de la politique monétaire :
La conférence des chefs d’Etats regroupant les présidents de tous les pays de la zone
Le conseil des Ministres regroupant les Ministres de Finances de ces pays.
Et enfin les 3 que sont : La BCEAO, la BEAC et la BCC.
Quatre principes régissent la Zone Franc :
Le principe de la fixité de parité :
1 € = 655,957 F CFA (franc CFA)
1 € = 494.8538 KMF (franc comorien)
Le principe de la libre convertibilité du franc CFA et comorien en Euro
Le principe de la centralisation des changes (compte courant d’opération) : on oblige les pays à garder au moins 50 % (65% pour le cas des Comores) de leurs recettes en devises (l’euro, le dollar, le yen et le livre sterling) au niveau de ce compte crée au niveau de la banque de France pour garantir la libre convertibilité.
Le principe de la libre transférabilité des capitaux vers l’Europe..
franc CFA : atout ou obstacle au développement ?*
Par Samba Dialimpa Badji
Débat récurrent, la question de la souveraineté monétaire des pays de la zone franc CFA est remise au goût du jour depuis quelques semaines. Un groupe d’économistes africains vient de publier un ouvrage collectif dans lequel il appelle à la fin de la « servitude monétaire » vis-à-vis de la France.
Un peu plus tôt, en début octobre, le secrétaire exécutif de la Commission économique des nations unies pour l’Afrique, Carlos Lopez, dénonçait le caractère désuet du système.
Face aux détracteurs du CFA, quelques économistes – peu nombreux – défendent cette monnaie en instant surtout sur sa stabilité et sa crédibilité.
Africa Check donne quelques éléments pour comprendre le débat.
Qu’est-ce que le franc CFA ?
Le franc CFA est la monnaie commune de 14 pays africains. Ces 14 pays sont regroupés dans deux sous-ensembles que sont l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC).
L’UEMOA comprend le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo. La CEMAC est composée du Cameroun, de la République Centrafricaine, du Congo, du Gabon, de la Guinée Equatoriale et du Tchad.
Chaque sous-ensemble a son propre institut d’émission ou banque centrale. Il s’agit de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest (BCEAO) pour l’UEMOA et de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC) pour la CEMAC.
Sur son site Internet, la BCEAO explique que le franc CFA est né le 26 décembre 1945 et signifiait alors franc des colonies françaises d’Afrique. C’est par la suite qu’il deviendra franc de la Communauté financière africaine pour les pays de l’UEMOA et franc de la coopération financière en Afrique pour les pays de la CEMAC.
A ces pays, il faut ajouter les Comores qui utilisent le franc comorien et qui fonctionne à peu près sur la base du même principe (1 euro = 495 francs comoriens ou KMF).
Chronologie du franc CFA
Comment fonctionne le franc CFA ?
Le franc CFA fonctionne en s’appuyant sur 4 piliers :
• la fixité du taux de change avec l’euro (auparavant avec le franc français)
• la garantie de la convertibilité illimitée du franc CFA (1 euro = 656 francs CFA)
• la centralisation des réserves de change ; c’est-à-dire que les pays de la zone CFA déposent 50 % de leurs réserves de change au trésor français. Cela permet de garantir la convertibilité illimitée du franc CFA.
• la liberté de circulation des capitaux à l’intérieur de la zone.
Quels sont les avantages de cette monnaie ?
Les défenseurs du franc CFA citent essentiellement trois avantages : la stabilité monétaire, la facilité des échanges entre les pays membres d’une même zone CFA et enfin la crédibilité internationale du fait de son arrimage à l’euro.
Pour l’économiste Malamine Mohamed, auteur d’une contribution récemment publiée dans des médias sénégalais, ces avantages font que la zone CFA, plus particulièrement le sous-ensemble UEMOA, est devenue attractive pour les banques étrangères et les investisseurs.
Mais un autre économiste Ndongo Samba Sylla, interrogé dans le cadre de l’émission Arrêt sur Info (un partenariat entre Africa Check et la WADR) relativise l’aspect bénéfique de cette stabilité monétaire.
Le billet de 10.000 (ici celui de l’Afrique centrale) est la plus grosse coupure du franc CFA. Photo BEAC
Selon lui, « on constate que lorsque cela va très bien pour l’Afrique, les pays de la zone franc sont en dessous de la moyenne africaine, ils ne sont pas très performants. Et quand cela va très mal, les pays sont un peu au-dessus de la moyenne africaine ». C’est ce qu’il appelle « une monnaie pour le pire », parce qu’à ces yeux « elle ne permet pas aux pays de la zone de décoller quand la croissance est là pour tout le monde ».
Quels sont les inconvénients ?
Pour les pourfendeurs du franc CFA, le principal inconvénient est la dépendance monétaire vis-à-vis de la France. Ce qu’un groupe d’économistes africains qualifie de « servitude monétaire », dans un ouvrage collectif récemment publié. Ndongo Samba Sylla, un des auteurs de ce livre, estime que « le franc CFA est l’une des meilleures expressions du manque d’indépendance économique des pays qui l’utilisent, parce que la plupart des grandes décisions qui concernent les questions monétaires et la politique de change ne sont pas prises par les chefs d’Etat eux-mêmes, mais par la France ».
L’autre inconvénient réside dans le fait que les gouverneurs des deux banques centrales n’ont pas toute la latitude pour faire varier le cours de leur monnaie et que les représentants de la France au niveau des deux banques centrales ont une voix prépondérante dans le processus de prise de décision.
D’autres économistes soulignent également le fait que les monnaies émises respectivement par l’une et l’autre banque centrale n’ont cours que dans leur zone d’émission. En d’autres termes, un billet émis par la BCEAO ne peut être dépensé dans un pays de la zone BEAC, et vice versa.
Le franc CFA, un frein au développement ?
Les économistes sont partagés sur la question de savoir si le CFA constitue un obstacle au développement. Pour l’économiste togolais, Yves Ekoué Amaïzo, directeur du Think Thank Afrocentricity, interrogé dans le cadre de l’émission « Arrêt sur Info », « le franc CFA favorise surtout ceux qui viennent avec de l’euro pour travailler dans la zone ».
L’Ivoirien Tiémoko Meyliet Koné est le gouverneur de la BCEAO depuis 2011. BCEAO
Ndongo Samba Sylla, qui soutient aussi que le franc CFA est un frein au développement, donne l’exemple des flux de capitaux dans la zone CFA et plus particulièrement le paiement net des revenus. Il révèle que « sur 34 ans, celui-ci est évalué à 212 milliards de dollars. C’est le même montant que l’Inde (or l’Inde pèse 11 fois plus que le PIB de la zone franc CFA). C’est un surplus qui aurait pu être utilisé pour investir dans nos économies ».
Cependant, pour l’économiste congolais Noël Magloire Ndoba, ancien doyen de la faculté des sciences économiques de l’université de Brazzaville, « le développement ne relève pas uniquement de la monnaie ».
« Il dépend aussi des institutions que l’on adopte et des hommes qu’on choisit pour mettre en œuvre une stratégie donnée », martèle M. Ndoba.
Il reconnait tout de même que « le fait de ne pas disposer des réserves de change à leur guise est handicapant pour les pays de la zone CFA ».
Les banques centrales – BCEAO et BEAC – souvent peu loquaces sur le sujet soutiennent que le problème n’est pas le franc CFA. Celui-ci résiste d’ailleurs mieux aux chocs exogènes, si l’on en croit Lucas Abaga Nchama, le gouverneur de la BEAC.
Quelle alternative ?
Noël Magloire Ndoba est convaincu qu’il faudra bien un jour abandonner le franc CFA. Du moins tel qu’il fonctionne aujourd’hui. Mais il invite à « ne pas le faire dans la précipitation ».
A cet effet, il dégage quatre scenarii possibles. Selon lui, il faut d’abord « négocier une coopération monétaire avec l’Union européenne pour que ce soit une relation entre les banques centrales de la zone CFA et la Banque centrale européenne et non plus avec le trésor français ».
Ensuite, l’UEMOA et la CEMAC peuvent créer « une monnaie commune qui puisse avoir un panier de devises comprenant les monnaies internationales (dollar, euro, yuan) ».
Il faut également « avoir une zone monétaire commune entre les pays de l’UEMOA et le reste des membres de la CEDEAO.
Enfin, suggère-t-il, « pourquoi pas, avancer par étape pour aboutir à une monnaie africaine ».
De son côté, Yves Ekoué Amaïzo soutient l’idée d’établir un taux de change avec un paquet de devises en prenant en compte le niveau des échanges commerciaux. Il rappelle qu’aujourd’hui « toute l’Afrique commerce avec la Chine et qu’on gagnerait beaucoup à utiliser le yuan comme devise ».
Son collègue Ndongo Samba Sylla estime que la question de la sortie du CFA est plus politique qu’économique. A son avis, « même s’il était prouvé que le franc CFA est bénéfique pour nous, nous devons avoir la liberté de dire que nous voulons gérer nous-mêmes notre monnaie. C’est une question de souveraineté qui va au-delà des questions économiques et techniques ».
Edité par Assane Diagne


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