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Général Gilbert Diendéré : « Si un lieutenant est ministre, moi général, je me mets au gardez-vous ; mais dans le commandement militaire, cela est impossible »

17 février 2015, 11:00

Je crois que le Gl Gilbert Diendéré (GGD) tente de ruser avec le Peuple burkinabè comme lui et Blaise l’ont fait 27 ans durant, mais nous ne sommes plus naïfs. Si, par contre, il est sincère, je douterai alors de son patriotisme, particulièrement dans sa capacité à faire passer l’intérêt national avant ses intérêts personnels. Je dis cela parce qu’il y a une grave incohérence dans ce qu’il défend.
- Il dit que « Le RSP est un corps spécial qui dépend de l’Armée de terre qui elle-même dépend de l’État-major général des armées. Ce corps spécial est mis à la disposition de la présidence du Faso pour remplir les missions de protection des institutions républicaines et d’autres missions telles que la lutte anti-terroriste. Au niveau de la présidence, le RSP reçoit les instructions du chef d’État-major particulier de la présidence du Faso. »
- Ainsi, il trouve normal que le RSP qui dépend de l’État-major général des armées puisse recevoir aussi des instructions du chef d’État-major particulier de la présidence. Il y a ici un problème dans la chaine de commandement : si les instructions données au RSP par les deux États-majors (de l’armée et de la présidence) sont contradictoires, à qui le RSP doit-il ou va-t-il choisir d’obéir ? Ce problème n’est pas un simple cas d’école : les 28, 29, 30 et 31 octobre 2014, à quel État-major le RSP a-t-il obéi : à Blaise ou à l’État-major général des armées ? Qui ont-il protégé : Blaise ou la nation burkinabè et son peuple ?
- Il y a une double source au problème que pose le RSP dans sa configuration actuelle :
1- il y a le problème de sa localisation : pourquoi le RSP à la présidence du Faso ? A-t-on besoin d’une telle proximité qui, à mon avis, est une véritable promiscuité très nocive qui permet indûment au RSP de se mettre sous l’ombrelle du Président du Faso, chef suprême des armées, pour échapper à la tutelle normale de l’État-major des armées du Faso. Il est donc urgent de mettre fin à cette promiscuité par la délocalisation du RSP, loin de la Présidence du Faso. D’ailleurs, dans leur communiqué en forme de mémoire en défense, ils ont évoqué le cas des éléments du RSP qui ont été manipulé par le frère du président pour accomplir de basses besognes pour de l’argent dans l’affaire David Ouédraogo et le drame de Sapouy. On sait bien que si le camp du RSP n’était pas à la Présidence du Faso, ni le frère du président Blaise, ni aucun autre civil du clan présidentiel n’aurait pu facilement s’y introduire ou avoir sous la main des soldats de l’armée nationale pour accomplir leur volonté dans le dos de la hiérarchie militaire. Si le RSP ne veut pas de changement et préfère rester et se complaire dans cette promiscuité, cela voudrait dire alors qu’il souhaite rester au service d’intérêts particuliers que l’on pourrait camoufler sous l’appellation "missions spéciales". Le GGD dit qu’il n’y a pas eu d’intrusion dans la salle du Conseil des ministres mais qu’il n’y en aurait eu que l’intention. Je lui fais remarque qu’une telle intention est déjà coupable puisque c’est l’absence du 1er ministre qui, prévenu ne s’y est pas rendu, que les soldats ne l’y ont pas rejoint. Cette intention n’a été possible et réalisable qu’à cause de cette promiscuité entre pouvoir politique et troupes armées. Qu’en sera-t-il quand des soldats du RSP voudront un jour attenter à la liberté et/ou à la vie du président et/ou des membres du gouvernement. Ce corps d’élite n’a pas sa place à proximité de la présidence, sinon il est une source d’insécurité pour toute la nation.
2- il y a aussi l’autre problème lié au fait que le RSP reçoit des instructions de l’État-major particulier de la présidence. Le président du Faso est le chef suprême de toutes les armées, mais il doit travailler avec l’État-major des armées qui assure l’unité institutionnelle et l’unité d’action de la seule et unique armée nationale. L’État-major de la présidence n’est pas une instance de commandement de l’armée, mais une instance de conseil du président du Faso en matière militaire. Le président n’a pas à donner directement des ordres aux troupes militaires sans passer par le commandement normal de l’Armée nationale. Il faut donc que l’État-major de la présidence s’attache à la présidence du Faso et non à un quelconque régiment qu’il commanderait. Il ne doit donc pas commander le RSP et le président du Faso peut alors choisir le militaire qu’il veut, quelque que soit son rang dans la hiérarchie militaire pour être son conseillé militaire particulier, sans que cela provoque un trouble dans la chaine de commandement et de la hiérarchie militaire. Il faut cette réforme qui va préserver le RSP d’un commandement parallèle qui fait de lui "une armée présidentielle" dans l’armée nationale ; et même pire, le RSP est un régiment au service du bon vouloir de celui qui se trouve être élu Président du Faso. On imagine facilement la gravité du problème dans le cas où le PF ferait preuve de dérives dictatoriales, comme ce fut le cas avec Blaise Compaoré. L’armée est une force nationale sous les ordres du PF, mais l’État-major général des armées est un vrai contre-pouvoir républicain au service de la démocratie et qui met toute la nation à l’abri d’éventuelles crises de folie du PF qui voudrait utiliser abusivement la force militaire de l’Armée nationale.
Nous avons besoin d’une armée républicaine encore mieux structurée. Le RSP ne doit pas être la seule trouve d’élite de notre armée : il faut en créer encore, si la défense de la patrie l’exige. Le RSP ne doit pas être la seule troupe garante de la paix nationale : ce serait une injure pour le reste de l’armée nationale qui n’aurait plus de raison d’être. Quelles sont ces missions dites "spéciales" dont l’ordre d’exécution donnée par le PF serait tellement secret au point de pas devoir passé par le chef de l’État-major général des armées, ainsi contourné par le conseillé militaire du PF érigé en chef d’État-major de "l’armée présidentielle". Nous ne sommes pas dans un État d’urgence pour que le PF commande par lui-même des troupes militaires. Sous le régime de Blaise, nous étions en réalité dans un régime d’exception qui ne disait pas son nom et la démocratie et l’État de droit n’était qu’une apparence (trompeuse pour ceux qui n’étaient pas très observateurs). Ce régime-là a disparu, mettons donc fin à ses dérives : que l’État-major de la présidence arrête de commander des régiments militaire et de se prendre ainsi pour l’État-major général des Armées.

D’ailleurs, pourquoi ne pas faire partir le RSP dans un autre camp et céder le leur à l’État-major général des armées dont la mission est de mettre toutes les armées en ordre et de coopérer avec le PF pour le commandement de l’Armée nationale : alors, au lieu d’un RSP de promiscuité, l’État-major général des armées pourra ouvrir en son sein la section "missions spéciales" qui sera mieux encadrée par le commandement général de l’Armée. Il n’y a pas besoin d’un commandement parallèle pour des troupes d’élites. C’est maintenant, pendant la Transition qu’il faut délocaliser le RSP et le mettre sous les ordres uniquement de l’État-major générale des armées et réduit le rôle de l’État-major particulier du PF à son rôle d’expert militaire conseillé du PF sans troupes à commander. Sinon, celui qui sera élu peut être tenté de faire comme Blaise, en s’appuyant sur le RSP. Non, « plus rien ne sera comme avant » et il ne faut laisser aucune chance aux anti-démocrates de reprendre la main.

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