La Justice militaire du Burkina face à ses responsabilités : « Rien ni personne n’est supérieur à la vérité »
Le 28 avril 2016, le Commissaire du gouvernement près le Tribunal militaire de Ouagadougou a obtenu de la Cour de cassation l’annulation pour vice de forme des mandats d’arrêts internationaux émis, notamment contre le Président Blaise COMPAORE et le Président de l’assemblée nationale de la Côte d’Ivoire Monsieur Guillaume Soro, mandats qui avaient été délivrés dans le cadre de la mort du Président SANKARA et de l’enquête sur le putsch manqué du 16 septembre 2015.
Ces annulations, même si elles ne sont pas définitives, induisent des questionnements dont les solutions seront déterminantes pour le devenir de notre pays.
A la suite de cette annulation, le Président du Faso a cru bon de se prononcer sur les suites probables des procédures concernées en de termes qui présagent que les justiciables de la justice militaire ont du souci à se faire de par sa volonté personnelle de les sanctionner. Il peut désormais convaincre difficilement de son impartialité et de l’indépendance de la justice militaire dont il a montré qu’il contrôle le fonctionnement.
Cependant, le Président du Faso devrait avoir de la retenue et devrait s’inquiéter de ces errements incessants de la Justice militaire depuis qu’elle a entrepris des instructions en masse liées au putsch manqué du 16 septembre 2015 et à l’affaire Thomas SANKARA.
Il s’avère que le Président du Faso, Ministre de la défense, est le chef suprême et le premier responsable de la justice militaire au regard des dispositions de l’article 3 du Code de justice militaire. Le 2ème paragramme de l’article 71 ajoute que « Aucune poursuite ne peut avoir lieu, à peine de nullité que sur ordre de poursuite délivré par le Ministre chargé de la Défense ».
Lors de sa conférence de presse tenue le mercredi 4 mai 2016, le Procureur Général Laurent Poda a écarté toute responsabilité de l’ordre judiciaire civil dans ce dysfonctionnement du Tribunal militaire de Ouaga en expliquant que c’est une juridiction d’exception qui a ses compétences et son organisation propre. Il dira également que la Cour d’appel ne connait pas des dossiers qui relèvent du Tribunal militaire et qu’il n’y a aucun lien hiérarchique entre la Cour d’appel et le Tribunal militaire.
Cette mise au point, associée à la conduite actuelle des dossiers en cours finit de convaincre que la Justice militaire est non seulement une juridiction d’exception, mais qu’elle ne fonctionne pas de façon satisfaisante. Nul ne sait par exemple comment ni dans quelles conditions la procédure d’annulation des mandats d’arrêt a pu être engagée par le Commissaire du Gouvernement si l’on sait qu’aux termes de l’article 99 du Code de justice militaire, le délai d’appel d’une ordonnance rendue par le juge d’instruction militaire est de 10 jours au plus après son édiction. L’émission des ordonnances du juge d’instruction militaire ayant lieu aux lendemains de la prestation de serment du Président du Faso, l’on peut légitimement déduire que le délai d’appel était largement dépassé lorsque le Commissaire du Gouvernement près le Tribunal militaire de Ouagadougou dit s’être aperçu des insuffisances de la procédure tel qu’il l’a expliqué au cours de la conférence de presse qu’il a ténu le 8 février 2016.
Une juridiction qui instruit avec tant de légèreté et pour des questions aussi graves ayant trait aux libertés humaines et à la sécurité d’Etat peut difficilement rendre une décision éclairée.
Les difficultés d’exécution du mandat d’arrêt contre Soro
Il nous est parvenu que le 25 avril 2015, soit trois jours avant la décision de la Cour de cassation de Ouaga, INTERPOL avait notifié aux autorités burkinabè son désistement quant aux poursuites contre Monsieur SORO, pour leur adéquation avec l’article 3 du Statut de l’Organisation de coopération policière.
Ce désistement d’INTERPOL explique certainement en partie l’annulation desdits mandats par la Cassation burkinabè.
La présidence ivoirienne se trouve confortée dans ses convictions lorsqu’elle s’était étonnée le 18 janvier 2016 de l’émission de ce mandat au mépris des règles et des us et coutumes en la matière.
Ce revers essuyé par le Burkina Faso (parce que c’en est un) appelle à des interrogations sur la régularité et la conformité du mandat, ce qui nécessite un rappel du mécanisme de fonctionnement d’INTERPOL.
Concernant le mécanisme de fonctionnement d’INTERPOL :
L’Organisation Internationale de Police Criminelle (INTERPOL) comprend 190 pays membres. Contrairement à ce que son nom indique, INTERPOL n’est pas à proprement parler une organisation policière. Il s’agit plutôt d’une structure d’étude et d’analyse sur la criminalité et le terrorisme dont le but est de faciliter la coopération policière internationale même s’il n’existe aucune relation diplomatique entre les pays concernés. L’organisation ne dispose pas de "service action". Ses interventions sont menées par les polices de chaque pays, parfois de manière conjointe (auquel cas un des rôles d’Interpol est de faciliter la collaboration, en améliorant la communication).
Aux termes de l’article 2 de son STATUT, INTERPOL « … a pour but :
a) d’assurer et de développer l’assistance réciproque la plus large de toutes les autorités de police criminelle, dans le cadre des lois existant dans les différents pays et dans l’esprit de la Déclaration universelle des droits de l’homme ;
b) d’établir et de développer toutes les institutions capables de contribuer efficacement à la prévention et à la répression des infractions de droit commun ».
Pour atteindre ses objectifs et assurer la coopération policière, chaque pays désigne un organisme dans le pays comme Bureau central national chargé d’assurer les liaisons avec les divers services du pays. (Article 31)
Le Règlement d’Interpol sur le traitement des données précise en son article 10 consacré aux Finalités de la coopération policière que « Le traitement des données dans le Système d’information d’Interpol ne peut être effectué que pour une finalité déterminée, explicite et conforme aux buts et activités de l’organisation ».
L’article 11 dudit Règlement ajoute que les Bureaux centraux nationaux, doivent s’assurer :
* de la licéité de la collecte et de l’introduction dans le Système d’information d’INTERPOL de leurs données ;
* de leur conformité à l’article 2 du Statut de l’Organisation, en particulier qu’il ou elle est autorisé(e) à les enregistrer au regard des lois nationales et des conventions internationales qui lui sont applicables ainsi que des droits fondamentaux des personnes conformément à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme auquel ledit article renvoie.
* de leur conformité à l’article 3 du Statut de l’Organisation.
Cet article 3 du Statut de l’Organisation dispose que : « Toute activité ou intervention dans des questions ou affaires présentant un caractère politique, militaire, religieux ou racial est rigoureusement interdite à l’Organisation. »
Le rappel de ces dispositions était important pour comprendre le mécanisme d’émission et d’exécution des mandats.
Les textes INTERPOL disposent en effet qu’il revient au pays qui émet le mandat d’arrêt de veiller à sa régularité juridique, à la licéité de son but, et à sa conformité avec le statut et les autres textes de l’organisation. Le respect de ces préalables conditionne la crédibilité de l’Etat envers ses pairs.
Dans le cas du mandat d’arrêt contre Monsieur SORO, le refus d’exécuter a posteriori veut dire que l’organisation policière s’est rendu compte après coup des irrégularités qui entourent le mandat et qui la dispense de son exécution.
Du reste, ce désistement d’INTERPOL donnera du grain à moudre à ceux qui soutiennent que le fonctionnement d’INTERPOL recèle beaucoup d’insuffisances et de légèreté.
De leur avis, le mandat ne devrait pas être accepté dès le départ au regard non seulement du Statut, mais aussi du Règlement relatif au contrôle des informations et à l’accès aux fichiers d’INTERPOL et du règlement d’Interpol sur le traitement des données, textes qui détaillent les conditions et modalités d’émission et d’exécution des différentes notices.
Concernant la régularité du mandat et sa conformité au Statut de l’Organisation :
L’exécution d’un mandat doit se fonder sur des pièces à conviction irréfutables. Or, dans le cas présent, l’écoute téléphonique entre le Général Bassolé et Monsieur SORO constitue la pièce à conviction essentielle, sinon unique, justifiant le mandat d’arrêt contre Monsieur SORO.
Cette écoute, on le sait, pose deux problèmes essentiels :
1. elle ne semble pas avoir été ordonnée par une autorité judiciaire compétente alors qu’une écoute « sauvage » constitue plutôt une faute punissable pour l’auteur en raison de son caractère attentatoire à l’intégrité morale de la victime. Personne n’ose donc prendre la responsabilité de l’endosser.
2. plusieurs experts confirmés sont parvenus à la conclusion que l’enregistrement de l’écoute n’est pas intègre et n’est donc pas fiable. Pour cette raison également, il ne peut faire foi contre les personnes concernées.
Dès lors que l’on n’a pas connaissance d’une autre pièce convaincante justifiant le mandat d’arrêt contre Monsieur SORO en dehors de cette écoute, le mandat contre SORO pourra être difficilement renouvelé en son terme initial, défaut de support légal oblige.
L’on est donc en droit de se demander si l’annulation dudit mandat n’a pas été commandée par celui qui en a autorité, pour bien sûr parvenir à la solution diplomatique préconisée aux premières heures de l’affaire. Dans une telle perspective, le langage de rigueur ne serait que de façade.
La double dépendance de la juridiction militaire à l’égard de l’exécutif civil et de la hiérarchie militaire
Il y a lieu de signaler que la juridiction militaire est une juridiction d’exception dès lors qu’elle ne statue que dans les matières pour lesquelles un texte particulier lui donne expressément compétence.
Ensuite si l’on se réfère au Code de justice militaire et aux us et coutumes militaires, la justice militaire n’est pas indépendante. La référence au Code de procédure pénale qui y est faite ne servirait donc qu’à sauver les apparences.
Le constat est que les procédures et les règles de la justice militaire dérogent du droit commun. Tant pour les militaires que pour les civils qui viendraient à être poursuivis par ces juridictions, un problème de droits humains se posera au regard des grands principes de droit ainsi que des dispositions constitutionnelles.
L’on se rappelle que suite à l’annulation des mandats d’arrêt contre Blaise COMPAORE et Guillaume SORO pour vice de forme, le Président du Faso a déclaré le jeudi 28 avril en marge de la Journée nationale du paysan (JNP) que « …… même dans leurs rêves les plus fous, ni Blaise Compaoré, ni ceux qui ont fait le coup d’Etat ne pensent que nous allons lever les mandats d’arrêt pour donner une suite à l’impunité et à la déstabilisation de notre pays ».
Cette intervention sans retenue et à chaud atteste non seulement qu’il en avait connaissance, mais aussi et surtout qu’il est le véritable chef de la justice militaire tel que cela ressort des textes d’organisation de cette juridiction. Les articles édictent à profusion l’extrême dépendance de la justice militaire à l’égard de l’exécutif par le canal du Ministre en charge de la défense.
La séparation des pouvoirs et l’indépendance de la justice ne valent que dans un contexte civil normal, mais pas entre l’exécutif civil et le judiciaire militaire ou la justice militaire.
L’application de l’ensemble des textes militaires met la justice militaire dans une situation préoccupante, assujettie à une double soumission d’une part à l’égard de l’exécutif par le biais du Ministre de la défense, et d’autre part à l’égard de l’ordre hiérarchique militaire.
Le refus des Hauts gradés de l’armée de répondre aux convocations de la justice militaire est l’expression matérielle de cette dualité structurelle et fonctionnelle de la justice militaire.
La fermeté du Président du Faso, Ministre de la défense à l’égard des personnes
concernées par les mandats d’arrêts annulés devrait également s’exprimer en direction de tous les justiciables de la justice militaire. Il en va pour lui de la maitrise de la situation sociopolitique.
Les obligations D’Etat de droit à la charge du Burkina
Les relations interétatiques ou internationales se fondent sur le respect des engagements des membres, de la hiérarchie des normes, de l’autorité de la chose jugée, des us et coutumes.
Lorsqu’un Etat refuse l’application de dispositions conventionnelles au profit d’autres Etats, il pourra difficilement réclamer le bénéfice d’une disposition identique à son profit au détriment des autres.
Pourtant, en l’espace d’un an, le Burkina Faso a d’abord refusé d’appliquer la décision de la Cour de justice de la CEDEAO du 15 juillet 2015 en violant de surcroit des dispositions Constitutionnelles relatives aux droits politiques. Le Burkina est pourtant membre de la CEDEAO et il est de ceux qui doivent assurer l’autorité de cette organisation par l’application de ses décisions.
Le pays a ensuite refusé au Général BASSOLE le bénéfice de l’application des principes de la liberté du droit de la défense contenus dans la Constitution du 11 juin 1991 et dans l’article 7 du règlement de l’UEMOA sur la liberté de circulation et d’établissement des avocats dans les huit Etats membres, en y opposant des dispositions subsidiaires de l’article 31 du Code de justice militaire. Le Burkina est également membre de l’UEMOA dont il abrite le siège.
Le pays a enfin passé outre la procédure prescrite par l’article 6 du Règlement de UEMOA pour inculper le Bâtonnier Mamadou TRAORE.
Que d’insuffisances qui peuvent être préjudiciables pour notre pays dans le concert des nations.
Si l’on se rappelle que le Président Blaise COMPAORE et les dignitaires de son régime ont été mis en accusation en violation flagrante des dispositions Constitutionnelles et de la procédure prescrite par les textes d’organisation de la Haute Cour de justice, l’on est en droit de se poser des questions sur les fondements du droit positif burkinabè. L’insurrection suffit-elle à s’affranchir de toute obligation ?
Qui ne respecte pas ses engagements court le risque de marginalisation par ses partenaires.
Qui ne respecte pas les règles sera incapable, in fine, de rendre une justice équitable et par conséquent, d’assurer la paix sociale dans un Etat de droit.
Les risques d’application de la réciprocité
Nul à travers le monde n’est à l’abri d’un mandat judiciaire international, parce que tout dépend de l’envergure de la structure qui le lance et les pièces justificatives qui soutiennent la procédure.
Ainsi, en 2010, la justice espagnole a émis des mandats d’arrêt contre le Premier ministre israélien de l’époque Monsieur Benjamin Netanyahou et six de ces ministres pour crime contre humanité et arrestation illégale par des commandos israéliens de trois de ses ressortissants.
A l’époque des faits, six ONG avaient constitué une flottille composée de 750 personnes venues de 37 pays afin de briser le blocus de Gaza et d’y acheminer de l’aide humanitaire.
Des commandos israéliens avaient arraisonné, le navire amiral Mavi Marmara de la flottille constituée, occasionnant la mort de neuf militants et blessant 38 autres. Les trois ressortissants espagnols se trouvaient à bord du bateau le jour de l’assaut ce qui justifie le mandat d’arrêt espagnol.
Nul n’est donc à l’abri d’un mandat d’arrêt. Ce qui peut être en cause, ce sont les conditions qui entourent son émission et son exécution.
Ainsi, l’émission d’un mandat d’arrêt doit être conforme aux règles de droit international pour permettre son exécution et éviter les frustrations, les erreurs et les tensions inutiles avec les autres acteurs de la communauté internationale.
Nous le savons tous, le mandat contre Monsieur SORO a été émis dans des conditions juridiques imparfaites, ce qui explique aujourd’hui les difficultés de son exécution et même le recul de la justice militaire burkinabè qui a procédé à son retrait pour sauver la face.
Une reprise dudit mandat qui ne tiendrait pas compte des erreurs initiales ne manquerait pas d’exacerber les tensions entre le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire au point de donner lieu à une éventuelle réciprocité.
En effet, les relations entre Etats opposent des souverainetés. Il sera donc loisible à la Côte d’Ivoire de donner le change par la réciprocité en émettant des mandats d’arrêt contre des personnalités burkinabè. Des exemples existent.
Ainsi, le Sénégal a usé de cette réciprocité le 22 septembre 2008 à l’égard de la France dans le cadre de l’affaire du Joola, en riposte à des mandats d’arrêts délivrés par un juge français contre des personnalités sénégalaises.
En l’espèce, le juge Jean-Wilfried Noël d’Evry avait lancé neuf mandats d’arrêts internationaux à l’encontre de personnalités sénégalaises dont l’ancienne Premier ministre du Sénégal, Mame Madior Boye, l’ancien chef d’Etat-major des armées du Sénégal le général Babacar Gaye ainsi que plusieurs anciens ministres pour leurs responsabilités présumées dans le naufrage du Joola qui avait fait plusieurs centaines de morts. Le secrétaire général de l’Elysée de l’époque, Monsieur Claude Guéant, avait fait valoir l’indépendance de la justice française pour refuser le règlement du dossier par la voie diplomatique comme le proposait le Sénégal.
Considérant lesdits mandats d’arrêts comme un affront contre la souveraineté sénégalaise, Dakar a de son côté décidé d’appliquer la règle de la réciprocité et de poursuivre pour ‘’forfaiture’’ le même juge français. Le parquet près le Tribunal régional hors classe de Dakar a donc saisi le Doyen des juges d’instruction pour l’ouverture d’une information judiciaire pour ‘’des chefs de forfaiture et actes de nature à jeter le discrédit sur les institutions sénégalaises contre Jean Wilfried Noël.
Le procureur général du parquet sénégalais a soutenu qu’en délivrant, au mépris de toutes les informations à sa dispositions, un mandat d’arrêt international contre un ancien Premier ministre, des anciens membres du gouvernement et des officiers supérieurs de l’armée sénégalais, le juge Jean Wilfried Noël a violé des règles édictées par la Constitution sénégalaise et par le Code de la Justice militaire souligne.
Le 25 septembre 2008, la justice sénégalaise a lancé un mandat d’arrêt international contre le juge français, ce qui a conduit la chambre d’accusation de la cour d’appel de Paris à annuler dans un premier temps les mandats d’arrêt émis à l’encontre de l’ancien Premier ministre, Mame Madior Boye et l’ancien ministre des forces armées, Youba Sambou.
C’est dire que la réciprocité est une arme puissante en relations internationales dont le Burkina Faso gagnerait à éviter l’utilisation à son encontre dans une affaire dont les pièces à conviction ne paraissent pas solides.
Conclusions
Au cours de la conférence de presse qu’il a animée le mercredi 4 mai 2016, le Procureur Général Laurent Poda a déclaré que « Lorsqu’un citoyen est mis en cause, l’utilité et la nécessité de s’expliquer devant la justice, commandent qu’il y réponde et cela, quelle que soit sa qualité ».
Cela est d’autant plus vrai que « Rien ni personne n’est supérieur à la vérité » comme le site WIKISTRIKE l’affiche comme sa devise.
Cet attachement au respect des textes devrait également trouver son écho dans la chaine d’instruction de tous les grands dossiers de la justice militaire ou civile pour que la vérité rapidement se fasse dans l’affaire Thomas SANKARA, celle du putsch manqué du 16 septembre 2015 et bien d’autres comme celle des détournements de la transition attestés par le rapport de l’ASCE-LC.
L’article 71 du Code de justice militaire est clair à propos de l’autorité compétente pour déclencher les poursuites de son ressort lorsqu’il dispose que :
« S’il s’agit d’une infraction relevant de la compétence des tribunaux militaires, le Ministre chargé de la Défense apprécie s’il y a lieu ou non de saisir la justice militaire.
Aucune poursuite ne peut avoir lieu, à peine de nullité que sur ordre de poursuite délivré par le Ministre chargé de la Défense.
Toutes les fois que l’infraction a été dénoncée par un juge d’instruction civil, un procureur du Faso ou un procureur général, le Ministre chargé de la Défense est tenu de donner l’ordre de poursuite.
L’ordre de poursuite est sans appel ; il doit mentionner exactement les faits sur lesquels porteront les poursuites, les qualifier et indiquer les textes de Loi applicables ».
Les insuffisances de la juridiction militaire que nous connaissons aujourd’hui sont celles qui ont conduit certains pays à supprimer les tribunaux militaires.
Ainsi, en France, la loi 82-261 du 21 juillet 1982 relative à l’instruction et au jugement des infractions en matière militaire et de sûreté de l’Etat a supprimé, en temps de paix, les tribunaux permanents des forces armées ainsi que le Haut tribunal permanent des forces armées pour ne maintenir des juridictions militaires qu’en temps de guerre.
L’Allemagne a également supprimé les juridictions militaires en temps de paix pour ne prévoir l’institution de tribunaux pénaux militaires qu’en temps de guerre. Les auteurs d’infractions pénales militaires sont jugés, en temps de paix, par les juridictions pénales de droit commun.
Notre pays devrait également engager des réflexions en vue d’effectuer des réformes visant à instituer un système judiciaire global débarrassé des juridictions d’exception attentatoires aux droits humains et sujette à toutes sortes de pesanteurs.
Certains décisionnaires seront réticents à se débarrasser de tels organes qu’ils peuvent utiliser à leur convenance. Ils ne doivent pas cependant perdre de vue que tout gouvernant redeviendra tôt ou tard le justiciable lambda et que la justice est le dernier refuge du citoyen contre la tyrannie des gouvernants.
Drissa SANOU
Ma plume m’appartient !
sanoudris@gmail.com