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Société Burkinabè de droit constitutionnel : Regards constitutionnalistes et politistes sur la transition

Publié le dimanche 22 février 2015 à 23h22min

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Société Burkinabè de droit constitutionnel : Regards constitutionnalistes et politistes sur la transition

La Société Burkinabè de droit constitutionnel a animé un panel ce samedi 22 février à l’université de Ouagadougou. C’est un présidium costaud composé de Me Frédéric Pacécé Titinga comme modérateur, les Pr. Abdoulaye Soma et Mahamadé Savadogo en conférenciers, qui a porté des « regards constitutionnalistes et politistes sur la transition insurrectionnelle au Burkina Faso ». La société savante entendait apporter sa contribution à l’avenir politique et constitutionnel du Burkina et pour un meilleur encadrement juridique et constitutionnel pos-insurrectionnel.

Le professeur Abdoulaye Soma, président de la société burkinabè de droit constitutionnel abordant le droit constitutionnel dans la transition insurrectionnelle au Burkina, a noté que le pays vit une des équations les plus complexes de son histoire politique et constitutionnelle.

Le bloc de constitutionnalité dans la transition est composé de deux éléments (la constitution du 2 juin 1991 et la charte de la transition) alors que sous la 4e république jusqu’à sa chute, avait un seul bloc de constitutionnalité, fait de la constitution. Cependant, a noté le conférencier, des deux instruments constitutionnels, c’est la constitution qui prévaut même si elle n’est pas entièrement appliquée, certaines de ses dispositions ayant été désactivées parce que incompatibles avec la conduite de la transition. La charte de la transition vient en complément de la loi fondamentale et ne saurait se substituer à elle.

De la constitutionnalité du déroulement de la transition

Le Pr. Abdoulaye Soma regrettera les frictions entre la pratique et le droit. La transition a connu des dérapages qui constituent des entorses au droit constitutionnel. Il a ainsi évoqué la suspension de certains partis politique du front républicain sur laquelle les autorités sont vite revenues. L’autre dérapage concerne la déclaration des biens des autorités de la transition. « On se rend compte que c’est une disposition qui n’est pas respectée. On a vu quelques publications des biens de certains personnalités de la transition, mais dans une forme qui est contraire aux prescriptions de l’article 10 de la constitution. Aucune autorité d’aucune institution de la transition n’a respecté cette obligation constitutionnelle ». Mais globalement, la conduite de la transition est conforme aux dispositions de la constitution.

Reformer l’actuelle constitution ou rédiger une nouvelle ?

Il y a nécessité de reformer la constitution, tant il est vrai que l’insurrection a été, parce que la loi fondamentale a été utilisée avec abus. Le contexte de la transition est d’ailleurs favorable à une réforme. « La neutralité politique et institutionnelle actuellement au Burkina est favorable à la réforme de la constitution. On ne peut pas préjugé des personnes qui ont vocation à diriger les institutions futures. En 1991, le Burkina était dans un contexte de déterminisme personnel et institutionnel et la constitution rédigée était influencée », a argumenté le conférencier.

Il y a deux options dans ce cas. Celle de la modification. Elle est plus simple, mais ne semble pas pour le constitutionaliste, intéressante. « J’ai des réserves », préviendra-t-il. Et pour cause, la présente constitution a été rédigée dans un contexte de déséquilibre politique. La donne a pourtant changé. Le Burkina est actuellement dans un contexte d’équilibre politique. « Imaginer qu’à l’issu de l’élection présidentielle, la coalition politique qui gagne soit différente de la coalition politique qui gagne les élections législatives. On va se trouver dans l’hypothèse avec un président qui définit une politique libérale qui doit être appliqué à l’hypothèse par un gouvernement d’obédience socialiste. Le gouvernement aura raison de ne pas appliquer la politique du gouvernement, puisque le premier ministre est nommé dans cette majorité parlementaire ».
La deuxième hypothèse qu’offre la loi organique sur la commission de la réconciliation nationale et des réformes est la rédaction d’une nouvelle constitution. Selon le Pr. Abdoulaye Soma, cette hypothèse est idéale. Seulement dans ce cas, il faudra l’onction référendaire. Il a donc émis la possibilité de tripler les élections présidentielle, législative et référendaire. Un moyen techniquement possible et qui reviendra moins cher.

Reconnaitre au peuple, le droit à l’insurrection

La deuxième partie du panel a été animée par le Pr. Mahamadé Savadogo. Il a partagé avec l’auditoire, les paradigmes politiques de l’insurrection populaire au Burkina Faso. Avec lui, on a apprendra qu’il y a différents types d’insurrection en fonction des acteurs engagés, des moyens utilisés et des objectifs visés. Il y a une typologie des insurrections et celle du Burkina était populaire d’envergure nationale et non armée, même si violente. Elle tout de même a montré ses limites à cause de sa spontanéité. Une des leçons de cet événement selon le Pr, c’est que le peuple a découvert sa force.

Le philosophe reconnait en l’insurrection, la légitimité d’un mode d’action qui de prime abord, apparait peu conventionnel. Mais elle mérite d’être érigée en droit, différente du droit à la désobéissance civile qui est très limitée. Cela ne sera pas une première puisque, notera le communicateur, les révolutionnaires français depuis 1793 avaient déjà inscrit le droit à l’insurrection dans leur constitution. Un pas est déjà franchi, se réjouira-t-il puisque, « la démarche de la société burkinabè de droit constitutionnel qui invite à une réflexion sur l’insurrection, constitue un pas vers la légitimation de l’insurrection en tant que mode de changement constitutionnel » a-t-il conclu sous les applaudissements nourris de l’auditoire constitué en majorité d’étudiants.

Tiga Cheick Sawadogo
Lefaso.net

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