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Libérations d’otages : Deal opaque ou humanisme ?

Publié le vendredi 27 juillet 2012 à 00h50min

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Et de cinq pour l’Enfant terrible de Ziniaré. Connu jusqu’ici comme un talentueux médiateur, Blaise Compaoré s’essaye, ces derniers temps, avec succès, à une autre activité : la libération d’otages. Les dernières personnes à être sorties des griffes des terroristes grâce au Blaiso sont deux Espagnols, Enric Gonyalons et Rinhoa Fernández Rincon, et une Italienne, Rossella Urru. Ils étaient aux mains du Mouvement pour l’Unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO) depuis octobre 2011. Avant eux, il y a eu, le 17 avril 2012, la libération de Maria Sandra Mariani, elle aussi de nationalité italienne, enlevée le 2 février 2011 en Algérie par Aqmi, suivie, le 24 avril 2012, de celle de la Suissesse Béatrice Stockly, enlevée le 15 avril 2012 à Tombouctou.

Pour tous ces cas, ce fut le même scénario : des émissaires, militaires pour l’essentiel, partent de Ouagadougou, parlementent avec les terroristes et ramènent les otages. Et comme toujours, c’est Golf qui est à la manœuvre. C’est dire qu’en plus d’être liés par les événements encore pleins d’ombre du 15 octobre 1987, le Blaiso et Diendéré partagent désormais les secrets de négociations pour la libération d’otages des mains de terroristes. Pour qui connaît ce milieu, il est aisé de savoir que ce n’est pas une mince affaire.
Quand on observe les résultats, on ne peut que saluer les efforts et la disponibilité de l’Enfant terrible de Ziniaré. Grâce à lui, des pays et des familles ont retrouvé le sourire. Le retour des otages à la maison a été source de bonheur pour leurs proches parents, voire pour leur gouvernement.

N’empêche, d’incontournables questions se posent aux Burkinabè. Ceux-ci voudraient comprendre les tenants et les aboutissants de ces succès à répétition de Blaise Compaoré avec les terroristes. Y avait-il une connexion entre Compaoré et les leaders de ces mouvements “islamistes” avant l’occupation du Nord-Mali ? ou est ce seulement depuis février que “barbus” et Kosyam se sont trouvé des atomes crochus ? Au cas où il s’agirait d’une vieille amitié, quels en sont les fondements, les centres d’intérêt, les projets conjoints ? N’est-il pas vrai que toute amitié tient à un fil conducteur avec des valeurs communes ?

Qu’en est-il alors des contacts établis avec le Mujao, par ricochet avec Aqmi, et plus loin avec Al-Qaïda ? Il semble que ce sont les caïmans d’un même marigot. Du reste, le Mujao réclame sans ambages sa relation avec Aqmi qui, comme on le sait, est le bébé, au Sahel, d’Al-Qaïda.

Si c’est seulement depuis qu’il a été désigné médiateur de l’Afrique de l’Ouest que cette confiance s’est établie entre le chef de l’Etat burkinabè et ces mouvements, on pourrait l’accuser de détournements d’objectifs, car la feuille de route que la Cedeao lui donnée est relative à la libération du Nord-Mali et non celle d’otages occidentaux. Et certains Etats commencent à s’inquiéter car, grâce à ces libérations les terroristes s’enracinent dans le Nord-Mali, et les y déloger sera désormais un travail d’Hercule.

Il est en effet question de paiement de rançons en millions d’euros, quinze selon des sources du Mujao. Avec ces milliards de francs, les “islamistes” pourraient s’équiper davantage en matériels militaires de haute précision pour faire mal. Et bien sûr être tentés de rééditer des prises d’otages si “fructueuses”. Et justement parce qu’il est question de paiement de rançons, ces succès pourraient avoir des effets boomerang, car, si par malheur les terroristes se fâchent avec leurs anciens potes en deal, ils ne feront pas de quartier. Dans l’immédiat, c’est l’image du président du Faso qui pourrait en prendre un coup, parce que le Burkina peut être perçu (à tort ou à raison) comme porteur de valises de sous qui servent à financer le terrorisme.

Adam Igor

Journal du Jeudi

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