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Santé/Médicaments de rhume déconseillés : « L’utilisation des vasoconstricteurs doit être faite sous contrôle du corps médical », selon Nana Kito Tidiane Ouattara, délégué médical et manager de Ethica propharmed International

Publié le mardi 18 juin 2024 à 21h30min

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Santé/Médicaments de rhume déconseillés : « L’utilisation des vasoconstricteurs doit être faite sous contrôle du corps médical », selon Nana Kito Tidiane Ouattara, délégué médical et manager de Ethica propharmed International

En octobre 2023, des médicaments de rhume ont été déconseillés par l’Agence nationale de régulation pharmaceutique. Selon l’ANRP, certains médicaments vasoconstricteurs à base de pseudoéphédrine, dont le but est donc de déboucher le nez seraient en effet susceptibles de causer entre autres, des accidents cardiaques et vasculaires cérébraux. Dans cet entretien, Nana Kito Tidiane Ouattara, délégué médical et manager de Ethica propharmed International, affecté sur un certain nombre de laboratoires qui dépendent de cette agence, revient sur le rôle des vasoconstricteurs dans la prise en charge du rhume. Pour lui, les vasoconstricteurs ont leur place dans la prise en charge de l’état grippal, mais doivent être utilisés sous contrôle médical et pas en automédication comme on le voit sous nos cieux.

Lefaso.net : En octobre 2023, des médicaments contre le rhume à base de pseudoéphédrine, des vasoconstricteurs, ont été déconseillés par l’Agence nationale de régulation pharmaceutique parce qu’ils provoqueraient des effets indésirables comme des AVC. Vous en tant que représentant d’un certain nombre de laboratoires, comment avez-vous accueilli cette note ?

M. Ouattara : Cette information de l’ANRP qui date d’octobre 2023, n’a fait que venir compléter une série d’informations ou d’actes dont nous avions connaissance. Il faut savoir que depuis 2022, un de mes laboratoires, UPSA, avait pris sur lui déjà d’attirer l’attention des professionnels de la santé sur la sensibilité de l’utilisation des vasoconstricteurs. A cet effet, On a mis en place un groupe d’experts africains. Il y avait dans ce groupe deux Burkinabè, un pédiatre, Pr Fla Kouéta et un ORL, le Pr Moustapha Sérémé. Ces experts africains ont sorti un document à l’intention des prescripteurs de l’Afrique noire francophone.

Une fois que ce travail a été fait, nous étions au deuxième semestre de l’année 2022. Nous avons pris sur nous de financer un certain nombre d’ateliers avec des médecins, des pharmaciens, des auxiliaires en pharmacie pour que ces experts viennent expliquer ce que c’est qu’un vasoconstricteur, un antihistaminique, un rhume, les rhinites et l’état grippal. Aussi à quel moment donner tel ou tel médicament. Parce qu’on avait déjà eu vent qu’en Europe, il y avait une surconsommation de certaines molécules qui peuvent poser des problèmes au niveau cardiaque et vasculaire.

C’est quoi un vasoconstricteur ? et pourquoi l’utilise-t-on, s’il présente des risques ?

Dans l’organisme, le sang est véhiculé par les vaisseaux sanguins. Ces vaisseaux parfois, lorsqu’on consomme certains aliments, certains médicaments peuvent se relâcher ou se contracter. Lorsqu’il y a trop de relâchement, ça peut poser des problèmes pour l’équilibre de l’être humain. Lorsque ces vaisseaux sont comprimés, parfois, cela passe inaperçu mais à long terme, cela peut jouer sur certains organes, tel que le cœur, le cerveau, les reins, etc. C’est pour cela, que l’alerte a été donnée sur l’utilisation des vasoconstricteurs. Ce qui avait inquiété la communauté scientifique, c’est surtout l’utilisation des vasoconstricteurs chez les enfants (qui ont des organes immatures).

On utilise les vasoconstricteurs, parce que lorsqu’il y a un rhume, soit il est d’origine allergique, soit il est d’origine virale, dans tous les cas, l’organisme va réagir à travers la production d’un certain nombre de substances. Ces défenseurs de l’organisme vont venir sur le lieu où il y a l’agression. L’afflux des défenseurs de l’organisme entraîne des perturbations (fièvre, douleurs, écoulement nasal, etc.) le sujet se sent mal. Mais c’est l’organisme qui se défend. Face à l’exagération de certains symptômes (gonflement des vaisseaux et rétrécissement des voies respiratoires aériennes) on fait recours aux vasoconstricteurs pour soulager le malade. Cependant, l’utilisation des vasoconstricteurs doit être faite sous contrôle du corps médical (médecins, infirmières, pharmaciens…)

A côté des vasoconstricteurs, il y a des médicaments contre le rhume qui sont à base d’autres molécules, notamment les antihistaminiques. La plupart du temps, le rhume, l’état grippal sont provoqués par un problème allergique. Il vaut mieux mettre juste un antiallergique un peu de paracétamol et de la vitamine C. Le Fervex par exemple est constitué d’un antihistaminique pour régler les problèmes de congestion en bloquant la production de l’histamine, puis il y a du paracétamol dosé selon les recommandations de l’OMS et de la vitamine C.

Ces vasoconstricteurs ont des effets secondaires, n’y a-t-il pas d’autres alternatives ?

Pour la prise en charge de l’état grippal, du rhume et des rhinites il y a plusieurs écoles. Il y’a ceux qui disent de ne pas traiter le malade. L’organisme réagira et les symptômes finiront par disparaître. Si c’est viral, l’organisme va mener le combat et se libérer. On va être affaibli mais avec le repos l’on se remet sur pied. C’est une alternative. L’autre alternative, est de prendre un antihistaminique.

Les vasoconstricteurs ont leur place cependant. Notre propos ici, ce n’est pas de dire de bannir les vasoconstricteurs, la note de l’ANRP est d’ailleurs claire là-dessus, il faut juste les délivrer avec précaution. Aucun médicament n’est neutre. Il faut juste administrer le bon médicament au malade. Nous laboratoires, nous informons les professionnels. A ce propos, le Burkina Faso est un pays très à cheval sur la règlementation.

Le ministère de la Santé fait un excellent travail. D’ailleurs, beaucoup d’experts viennent se former dans notre agence de régulation qui fait référence en Afrique. L’ANRP est très soucieuse de la santé des populations, très sérieuse, dans le travail qu’il abat. Ce que je recommande aux malades, c’est de voir toujours un médecin pour avoir une prescription et aller en officine pour se faire délivrer ou conseiller son médicament.

Le combat que nous menons en tant que laboratoire dans le cadre de la santé publique, c’est d’apporter la bonne information aux professionnels de santé, mais aussi d’inviter les uns et les autres à consommer des médicaments recommandés et homologués par l’ANRP. Les médicaments de la rue sont à bannir.

Propos recueillis par Justine Bonkoungou
Lefaso.net

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