El hadj Salifou Ouédraogo : L’homme au pari fou de 35 mille pieds de baobabs en 56 ans et Kuuri d’or, édition 2024
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Révélé au monde entier par le film documentaire du cinéaste burkinabè Michel K Zongo, El Hadj Salifou Ouédraogo, natif de Titao (région Nord du Burkina), est un autre Yacouba Sawadogo, (prix Nobel alternatif 2018 décédé en 2023). Lauréat du Kuuri d’or édition 2024, El Hadj Salifou Ouédraogo ou l’homme qui défie les superstitions a réalisé un pari fou de planter 35 mille pieds de baobabs en 56 ans dans les Banwa, dans la Boucle du Mouhoun. Portrait d’un octogénaire, dont le parcours force l’admiration.
Ils ne sont pas allés à l’école occidentale, mais ils ont le sens de la « vision ». Ces hommes qui domptent ces terres et sols infertiles du Burkina. Ces amis de la nature cachés dans les hameaux de culture du Burkina. Leurs voix ne se font pas entendre, mais leurs actions parlent d’elles-mêmes au-delà des frontières.
Installé dans les Banwa, dans la Boucle du Mouhoun, depuis 1968, ce fils de Titao (province du Loroum, région du Nord au Burkina Faso), El Hadj Salifou Ouédraogo, puisque c’est de lui qu’il s’agit, a réalisé une prouesse dans la plantation de baobabs. Un pari réussi devenu une bouée de sauvetage et un héritage pour sa communauté. A 81 ans, il a mis en terre plus de 35 mille pieds de baobabs, en 56 ans, sur un espace de près de 100 hectares. Des vergers à perte de vue de baobabs pour le bien de sa communauté et de la nature, raconte le film documentaire de Michel Zongo et les reportages réalisés par le Salon international de l’agriculture et de l’élevage (SIAEL), édition 2024, dont il a été le Kuuri d’or.
Avant d’atteindre cette prouesse qui fait écho au-delà du Burkina, El Hadj Salifou Ouédraogo est d’abord passé par l’échec dans la culture des mangues, et son rêve de devenir un cheick musulman. Mais pourtant le fils du Yatenga ne baissera pas les bras et décide d’être utile à sa communauté. Il se lance alors dans la plantation du baobab. Après un essai de trois plantes pour la consommation familiale, l’homme est convaincu d’être sur le bon chemin et décide de retourner sur ses terres à Titao à la recherche de graines de baobab. C’était alors le pari d’une aventure réussie que le monde entier découvrira des dizaines d’années plus tard.
Pour la petite histoire, comme dans tous les exploits, l’homme a été déconseillé de planter des baobabs au risque d’y laisser sa peau. Car selon certains mythes, planter un baobab est synonyme de « mort ». Mais malgré ces avertissements, l’homme poursuivra son aventure avec les baobabs, il est aujourd’hui un acteur clé dans la lutte contre l’avancée du désert au Burkina Faso.
Ce qui a été au départ produit pour la consommation familiale est devenu, en plus de lutter contre l’avancée du désert, un business pour ce grand père écologue. Il dit réaliser dans ces sites d’exploitations (Boucle du Mouhoun et Sud-ouest) trois récoltes par an et commercialise les pieds de baobabs qui varient entre 2 000 et 5 000 FCFA, avec des clients du Burkina Faso et d’ailleurs.
Yvette Zongo
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Crédit photo : Sidwaya