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Situation sécuritaire au Burkina : A Dablo, les veuves et les orphelins plient bagages

Publié le mercredi 8 décembre 2021 à 23h05min

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Situation sécuritaire au Burkina : A Dablo, les veuves et les orphelins plient bagages

Après le départ de la gendarmerie fin novembre de Dablo, département et commune rurale de la province du Sanmatenga, dans la région du Centre-nord, c’est au tour de la population de plier bagages. Fuyant les exactions des groupes armés, des habitants de Dablo se sont déplacés massivement à Kaya, chef-lieu de la région du Centre-nord. Des femmes victimes de la barbarie humaine témoignent leur vécu.

Le stade régional de Kaya accueille des milliers de personnes venues de Dablo. Nous avons passé trois jours avec ces personnes vulnérables. Parmi elles, des femmes qui assurent avoir subi des traitements inhumains de la part de groupes armés et qui témoignent.

Justine Ouédraogo a emprunté une charrette pour rejoindre Kaya. Elle raconte son vécu à Dablo : « les groupes armés ont tué mon mari devant moi, à l’église de Dablo. Je m’en rappelle comme si c’était hier. Mon mari fut le premier à être abattu, après le prêtre célébrant. Depuis ce jour, les enfants me demandent où est leur papa ». C’était en mai 2019. Un prêtre et six fidèles de l’église sont alors tués au cours de cette première attaque. Depuis, d’autres attaques ont eu lieu.

Awa Ouédraogo, elle, a rencontré les présumés terroristes au champ. « Nous étions en train de chercher un âne lorsque des individus portant des armes ont fait irruption dans notre champ. Ils nous ont frappé, tout en disant que ce sont nos maris qu’ils veulent », se rappelle-t-elle. Elle poursuit : « Nous avons de la chance. Ils nous ont frappées. D’autres femmes témoignent qu’elles ont été violées par ces bandits », ajoute-t-elle, précisant que ces hommes armés leur ont ensuite intimé l’ordre de ne plus cultiver.

« Après avoir fini de récolter le haricot », poursuit pour sa part Aminata Sawadogo, une autre de ces femmes, « ils nous ont copieusement battues. Trois jours durant, j’étais alitée avec la douleur ». Cette veuve continue : « En ce qui concerne mon mari, ils sont venus le tuer sur place ».

Plus loin, nous rencontrons dame Sibidou Sawadogo, qui se souvient que ces « hommes armés non identifiés » ont fermé les écoles. Les larmes aux yeux, elle ajoute qu’ensuite, son mari a été tué.

Une autre affirme avoir perdu son mari aussi dans la douleur. « Il est allé à Kaya pour son commerce. Il a quitté Kaya aux environs de 19h, mais n’est jamais revenu ».
Beaucoup de femmes que nous avons rencontré affirment que les groupes armés, une fois entrés à Dablo, pénètrent dans les concessions, font sortir les maris et les tuent devant elles et leurs enfants.

Une autorité, qui a préféré garder l’anonymat, confie que Dablo est la commune où les terroristes ont tué presque la majorité des hommes, laissant des veuves et des orphelins. « Que de séquelles psychologiques, tant de peine et de peur, l’homme qui perd sa dignité », lâche un responsable d’une ONG sur la situation de Dablo. Pour lui, il faut vite « redonner de l’humanité à ces personnes qui souffrent ».

Pour rappel, la commune rurale de Dablo, doit faire face, comme d’autres localités du Burkina, à la menace terroriste. Selon un décompte effectué en septembre 2021 par un collectif dit « L’appel de Kaya », du 12 mai 2019 au 6 août 2021, Dablo a été frappé par une douzaine d’attaques, avec pour conséquences une centaine de morts et une soixantaine d’enlèvements.

Gérard BEOGO
Collaborateur

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Vos commentaires

  • Le 9 décembre 2021 à 06:14, par Le sage En réponse à : Situation sécuritaire au Burkina : A Dablo, les veuves et les orphelins plient bagages

    Et jusque là le gouvernement n’a pas envoyé une force spécial pour sauver ces populations ???? Avec ces témoignages poignant de la sorte, c’est une honte pour notre pays. Honte à tous ceux qui sont d’une manière ou d’une autre à une sphère de décision. Il faut donner la voix pour rétablir l’ordre dans cette localité.

  • Le 9 décembre 2021 à 08:02, par kwiliga En réponse à : Situation sécuritaire au Burkina : A Dablo, les veuves et les orphelins plient bagages

    « Que de séquelles psychologiques, tant de peine et de peur, l’homme qui perd sa dignité », lâche un responsable d’une ONG sur la situation de Dablo. Pour lui, il faut vite « redonner de l’humanité à ces personnes qui souffrent »
    Je ne sais qui est ce responsable d’ONG, mais pour ma part et suite aux témoignages qui émaillent l’article, la dignité comme l’humanité, ne manquent point chez ceux qui souffrent.
    Par contre, elle semble totalement absente chez ceux qui assassinent, qui violent, qui cherchent à tout prix à nous imposer la barbarie, se masquant sous des prétextes religieux.
    Hum, Hommes Armés Non Identifiés...? Ailleurs, dans les cas qui sont évoqués ici, on aurait l’honnêteté de les nommer djihadistes.

  • Le 9 décembre 2021 à 09:52, par Curieux En réponse à : Situation sécuritaire au Burkina : A Dablo, les veuves et les orphelins plient bagages

    Triste récit !!!
    Vous faites du bon travail en relatant la réalité du terrain.
    Cependant, la sagesse recommande d’utiliser des noms d’emprunt et éviter d’exposer davantage ces pauvres dames en donnant crument leur identité ou des précisions trop détaillées pouvant permettre de les identifier.

    Le contexte nous impose une autre façon de réfléchir "Ne pas nuire- Do No Harm".
    Cordialement !

  • Le 9 décembre 2021 à 17:41, par ancien En réponse à : Situation sécuritaire au Burkina : A Dablo, les veuves et les orphelins plient bagages

    Puisse Dieu sécher vos larmes.
    Nous sommes tous coupables au moins par notre indifférence. Tant que Ouagadougou tient, on boit la bière et on fait la belle vie comme si de rien n’était. Sachant que quelques km à côté des compatriotes ont tout perdu et ont même perdu gout a la vie. C’est ça le burkindi ?

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