Actualités :: Lettre ouverte au gouvernement du Burkina Faso : Rendez-moi ma sœur (...)

Dans la lettre ouverte dont teneur suit, l’auteur, Békuoné Somda, demande la révision du Code des personnes et de la famille. Le présent code méconnaît, selon lui, une forme de l’expression culturelle dagara : le système matrilinéaire.

Messieurs et Mesdames les Ministres, Monsieur le Président du Faso, la célébration de la Semaine nationale de la culture (SNC) m’offre une belle occasion pour apporter ma modeste contribution à la fête de la culture, surtout celle qui se vit au quotidien, la SNC n’étant qu’une vitrine de cette richesse nationale dont regorge le Burkina.

Nous avons félicité et récompensé les artistes à la hauteur de leurs mérites, de leur prestation du moment. Votre attachement à la culture ne souffre d’aucun doute. Mais combien plus authentique serait-il s’il embrassait toute la culture ; toutes les facettes de la culture burkinabè, car il y a des éléments culturels qui n’ont besoin ni d’exposition, ni de compétition.

Souffrez donc que je vous signale un aspect de notre culture que peut-être par mégarde ou par ignorance vous piétinez par le biais du Code de personnes et de la famille. Il s’agit du patronyme et du matronyme dagara, qui font du Dagara ce qu’il est. Ces deux entités sont aussi importantes l’une que l’autre et constituent la spécificité de l’identité dagara.

Elles ont des rôles sociaux indéniables dans le vécu quotidien dagara. De la célébration des funérailles à la médiation, le Dagara se sent vivre à travers son patronyme et son matronyme authentiques.

C’est dire que le tort que nous fait le Code des Personnes et de la famille dans son application, quant à notre identification, est incommesurable. Que !e patronyme qui est foncièrement culturel soit maintenant l’objet d’une loi d’Etat me semble on ne peut plus insolite.

Les Dagara ne doivent pas être des cobayes La culture ne s’impose pas. Les vrais changements culturels viennent et doivent émaner de la conscience communautaire de l’ethnie qui en sent la nécessité. Ainsi en a-t-il été par exemple à travers les siècles pour résoudre les problèmes de mariage quand un groupe se sentait trop isolé et avait des difficultés pour contracter des liens matrimoniaux.

On procédait alors à des rites pour scinder la famille afin de permettre à la vie communautaire de se poursuivre. Rien n’était imposé d’en haut, gratuitement. Le présent Code des personnes et de la famille a certainement des objectifs nobles, mais il pèche par endroits, et il faudrait l’admettre et procéder à sa révision.

Tenez ! Moi, je suis Somda né de mon père Dabiré et de ma mère Somda. Pourtant, je suis le fils de mon père. Ma sœur qui est du même père et de la même mère est devenue subitement Dabiré du fait de l’application du Code, à la faveur de l’établissement d’un jugement supplétif.

Or, si le code avait tenu compte des réalités socioculturelles dagara, ma sœur n’aurait pas pu devenir Dabiré, alors qu’elle a vécu Somda pendant cinquante (50) ans.

Les Dagara n’ont-ils pas le droit d’être tels qu’ils sont ? Différents des autres comme les autres le sont de nous ? je crois, moi, à l’expression plurielle de la culture ; je crois à l’unité dans la diversité.

Je crois que vous pouvez encore manifester votre âme culturelle en faisant réviser ce Code afin qu’il ne continue pas de faire des Dagara, les cobayes d’un objectif national aux contours mal définis.

En attendant d’être convaincu de la nécessité pour le Dagara de porter le matronyme de son père (Dabiré par exemple.

Ce qui est socialement une aberration) au lieu du vrai patronyme (Bèkuonè par exemple), je vous prie Messieurs et Mesdames les Ministres, Monsieur le Président, de me rendre ma sœur :

Somda Nouzawla Marie-Blanche, elle que je connais et aime depuis ma tendre enfance, fille de mon père Dabiré Donkèrè, et de ma mère Somda Nwinyerou. Dabiré Nouzawla Marie-Blanche n’est pas ma sœur.

Au nom du ciel, rendez-moi ma sœur.

Respectueusement vôtre

Bèkuonè Somda Kuuceti

Observateur Paalga

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