Actualités :: Lutte contre la corruption : Une citoyenne propose des recettes

La croisade anti-corruption doit nécessairement passer par l’éducation. C’est Céline Sika, citoyenne de son état, qui le dit.

"Cette éducation doit se faire dès le berceau, lorsque le cerveau est encore comme un disque dur où l’on peut aisément graver tout ce que sera et fera l’enfant demain, et pas à 60 ans lorsque l’homme s’est déjà fait, et continuer dans les établissements scolaires avec l’instauration des cours d’éducation civique, de morale". Dans l’écrit qui suit, Mme Sika propose une démarche méthodique pour lutter contre "ce fléau qui freine le développement des nations et des peuples".

Il y a quelques semaines - le 11 avril dernier plus précisément- la Banque Mondiale, à travers son Directeur Paul Wolfowitz, a dévoilé son plan stratégique de lutte contre la corruption, véritable frein au développement des nations et des peuples.

Ces mesures comportent, entre autres, la bonne gouvernance, la réforme judiciaire, et de la Fonction publique, la décentralisation de la prestation des services publics, l’appui aux organisations de la société civile, pour qu’elles fassent le contrepoids et promeuvent la responsabilisation des administrations publiques, la mise sur pied des équipes de lutte contre la corruption dans les bureaux extérieurs de l’institution, la publication des stratégies de lutte contre la corruption dans le cadre des projets sur le web, collaboration avec les pays riches pour éviter que des fonds volés soient déposés sur des comptes bancaires étrangers et pour tenir les sociétés privées responsables si elles exportent la corruption dans les économies émergentes, etc.

Toute une batterie de mesures qui, d’après ses concepteurs, devraient permettre d’en finir une fois pour toutes avec cette gangrène. Ces mesures, à quelques exceptions près, ne sont pas très différentes de celles que s’efforcent de mettre en œuvre, même si c’est très souvent le couteau sous la gorge, les gouvernements depuis qu’ils ont pris conscience de la puissance destructrice de ce fléau qui étend ses tentacules partout.

Je salue les efforts des uns et des autres, mais ne peux m’empêcher de faire un constat simple : aucun d’eux n’a malheureusement pris en compte l’Homme dans ce combat. Pour qu’il y ait corruption, il faut qu’il y ait des corrompus et des corrupteurs, et ceux-ci ce sont des hommes et des femmes, des êtres humains. Pourquoi sont-ils corrompus ou corrupteurs ? Je crois qu’il faudrait commencer le combat par là. De prime abord, toute personne est corruptible. Maintenant, c’est le prix qui fait la différence.

Mais lorsque je parle de prix, je ne me réfère pas uniquement à l’argent. Alors que les uns tombent facilement sans glisser pour une bière ou même moins qu’une bière, d’autres feront tout ce qu’on leur demande pourvu qu’on ne touche pas à un seul cheveu de leur fille ou de leur femme, ou alors pour qu’on ne les bouge pas de leur poste. Pour que ces hommes et femmes ne cèdent pas à la tentative de corrompre ou de se laisser corrompre, il faut qu’ils aient une barrière solidement implantée dans leur tête ; sinon, ils ne résisteront pas, parce que la tentation est trop forte.

"Eduquer et former, c’est développer durablement"

Un fonctionnaire qui entend ses enfants affamés crier des jours durant parce qu’il n’a même pas de quoi leur acheter un bout de pain ne réfléchira pas une demi seconde avant de prendre le billet de cinq cents francs que lui tend un entrepreneur pour faire disparaître un dossier d’un concurrent plus solide que lui. Il demandera même d’ailleurs lui-même que le corrupteur fasse le geste qui sauve comme ils disent couramment. Cette barrière dont je parle n’est possible que grâce à l’éducation qui la leur installe une fois pour toutes parce que, éduquer et former, c’est développer durablement.

En d’autres termes, la lutte contre la corruption dans laquelle se sont jetés nos dirigeants et toutes les agences de coopération et autres institutions internationales doit impérativement commencer par l’éducation des populations pour les doter d’outils et leur transmettre les valeurs dont elles auront besoin pour, non seulement résister à la tentation, trop grande surtout en ces temps de pauvreté et de misère galopantes, mais aussi dénoncer la pratique de ce fléau.

Ces outils, ces valeurs sont le sens de l’honneur, l’intégrité, le respect du bien public, l’amour du travail parce que c’est grâce à celui-ci et celui-ci seulement que l’Homme s’élève, la persévérance, le goût de l’effort. Aujourd’hui, plus personne ne veut travailler, souffrir, mourir, encore moins vieillir. Tout le monde veut tout avoir, vite, maintenant, avant tout le monde et, pour cela, on est prêt à tout, à vendre son âme au diable ou même à coucher avec sa propre mère comme c’est de plus en plus le cas dans certains cercles.

Cette éducation, précisons-le, doit se faire dès le berceau, lorsque le cerveau est encore comme un disque dur où l’on peut aisément graver tout ce que sera et fera l’enfant demain, et pas à soixante ans lorsque l’Homme s’est déjà fait, et continuer dans les établissements scolaires avec l’instauration des cours d’éducation

civique, de morale.

Lutter contre la corruption c’est aussi mettre en place le cadre nécessaire à un développement sain, robuste et durable. C’est assurer aux citoyens et citoyennes d’une nation un minimum de bien-être : habitat décent, soins de santé, au moins un bon repas par jour, une bonne éducation, bref des conditions nécessaires pour le plein épanouissement de tous.

Si les choses sont envisagées de cette manière, on n’aura pas besoin de mobiliser un seul franc pour lutter contre la corruption parce qu’elle n’existerait pas, ou alors dans une très petite proportion, et l’on consacrera nos efforts et notre argent pour mener d’autres guerres.

Céline SIKA

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