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Secteur publicitaire au Burkina : Les choses évoluent dans le bon sens, selon Abdoul Azize Bamogo, président de Publicitaires Associés

Publié le mercredi 28 juin 2017 à 15h19min

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Secteur publicitaire au Burkina : Les choses évoluent dans le bon sens, selon Abdoul Azize Bamogo, président de  Publicitaires Associés

A la présidence de Publicitaires Associés, association professionnelle des agences de communication du Burkina Faso, depuis deux ans, Abdoul Azize Bamogo est en fin de mandat. Celui qui est par ailleurs directeur de Cité Com, a décidé de ne pas rempiler pour un nouveau contrat. Sous son autorité, le monde de la publicité s’est doté de nouveaux textes pour être en phase avec les exigences du moment et surtout assainir les pratiques. Dans cette interview, le futur ancien président fait son bilan. Il n’hésite pas tacler les agences qui foulent aux pieds la règlementation, sous le regard indolent et coupable de l’autorité compétente.

Lefaso.net : Vous avez donné de la voix ces derniers temps en interpellant la municipalité sur certains manquements dans le domaine de la publicité, de quoi s’agit-il exactement.

Abdoul Azize Bamogo : Il s’agit particulièrement de la gestion des panneaux publicitaires dans la ville de Ouagadougou. Cela a d’ailleurs occupé une partie importante de notre mandat. Nous avons travaillé avec les agences de communication, les régies publicitaires (membres ou non de Publicitaires Associés), pour qu’on discute ensemble dans l’optique de voir comment travailler pour que les panneaux implantés dans la ville soient rentables. Nous sommes à un taux d’occupation très faible et à des prix qui sont actuellement très bas, proposés par certaines personnes de façon incompréhensible.

La mairie nous fait payer les taxes à hauteur de 35 000 F CFA par mois et par panneau, alors qu’il ya des gens qui louent des panneaux en dessus de 35 000F CFA, là on ne comprend pas. En réfléchissant ensemble, on s’est rendu compte qu’il y a beaucoup de panneaux qui sont implantés de façon irrégulière et les responsables de ces panneaux ne payent pas des taxes, ce qui leur permet de proposer des prix très bas.

En ne payant pas de taxes, ils peuvent vendre des espaces à 20 000 F CFA et c’est tout bénef pour eux. Alors ceux qui payent des taxes ne peuvent vendre à ce prix et ne sont pas concurrentiels. Du coup, ce sont les entreprises sérieuses qui en pâtissent et c’est l’Etat qui n’a pas de recettes fiscales. Alors, nous avons dit qu’il faut que la mairie fasse son travail. D’abord que sur chaque panneau, le nom du propriétaire soit indiqué. Les textes le préconisent. Il y a beaucoup de panneaux dans la ville qui ne sont pas identifiés, c’est le premier travail à faire.

Deuxièmement, il faut qu’il y ait un travail entre la marie et Publicitaires Associés pour faire le répertoire des panneaux de la ville. Il faut qu’on sache combien de panneaux il y a dans la ville, à qui ils appartiennent afin qu’on soit sûr que tout le monde paye des taxes. Il ne faut pas que des gens qui ne payent pas de taxes, implantent des panneaux au hasard et que la mairie laisse faire.

C’est à la mairie de faire le travail, si un panneau est implanté à un mauvais endroit, il doit être enlevé. Si tout le monde paye, cela va aider à structurer le marché. Sinon dans cette situation, ce sont ceux qui respectent la loi qui payent les taxes et là ils sont perdants.

Pensez-vous qu’il ya un désordre dans le domaine ?

C’est un vrai désordre, il faut le dire. Il y a des panneaux implantés à des endroits où ils ne devraient pas y être. Des intersections, devant des centres hospitaliers, des écoles. Souvent on est arrêté au feu tricolore, on ne voit ni à gauche, ni à droite. Mais c’est à la mairie de faire son travail, on entend souvent les services techniques dire qu’ils vont enlever des panneaux. Mais ça y est toujours là. Les textes disent par exemple que la distance entre les panneaux, c’est 50 m, mais à certains endroits, il y a cumul de panneaux.

Le 10 Juin dernier, vous avez célébré les 10 ans de Publicitaires Associés. Pourquoi cette initiative ?

10 années d’existence d’une structure, c’est très important. Publicitaires Associés est née avec beaucoup de difficultés. Au début, ce n’était pas simple de mettre les gens ensemble, mais pendant 10 ans, nous avons pu travailler ensemble, la structure continue de fonctionner. Cela méritait qu’on célèbre. Par ailleurs, il s’agissait pour nous de rendre hommage aux prédécesseurs, à ceux qui ont travaillé depuis 2006-2007 pour mettre en place la structure. C’est dans ce cadre que nous avons décerné des cartes de membres d’honneur à nos anciens présidents que sont Joachim Baky, Désiré Komboïgo, Hyacinthe Zouré.

Il s’agissait aussi de faire en sorte que la grande famille de la publicité se retrouve pour partager des moments de convivialité.

Au cours de cette soirée, vous avez déclaré que vous ne rempilerez pas pour un nouveau mandat…

J’ai choisi de ne pas me présenter pour un nouveau mandat, parce que je pense qu’une organisation comme celle-là demande la contribution des uns et des autres. Sur deux années, j’ai apporté ma contribution, j’ai fait ce que je pouvais et je pense que c’est bon que d’autres personnes prennent le relai pour continuer. C’est bien d’avoir des apports différents.
Aussi, être président de Publicitaires Associés, apporte quelque chose d’intéressant dans le Curriculum Vitae, et il faut savoir laisser la place à d’autres de bénéficier de ce privilège…

Juste un mandat, et vous rendez le tablier, est-ce que ce n’est pas aussi le poids des responsabilités qui vous pousse à ne pas vouloir vous représenter ?

Il y a cela aussi, il faut le dire. Pendant le temps que j’ai été président de Publicitaires Associés, j’ai quand même délaissé un peu mon agence de communication. C’est une grande charge, surtout quand on voit le travail que nous avons fait, c’était quelque peu au détriment de mon agence. J’ai fait ma part de sacrifice et c’est bon que d’autres viennent faire leur part aussi.
Par contre je pense que ce serait bien, pour l’avenir, que nous travaillions à fixer un mandat de trois ans. Cela permet de faire quelque chose de substantiel, deux ans c’est vite passé.

Venons-en maintenant à votre mandat. Quelles sont les réalisations phares que vous avez à votre actif ?

Je pense que les principales réalisations sont surtout les textes ; parce que nous nous étions donné comme objectif de travailler à la structuration du secteur de la communication publicitaire au Burkina. Et cela commence par l’adoption des textes. Avec le ministère de la communication, nous avons travaillé à adopter le nouveau code de la publicité. C’était un premier pas très important parce que l’ancien texte ne répondait plus aux attentes du monde de la publicité.

Après cela, nous avons travaillé avec l’actuel ministre en charge de la communication Rémis Fulgance Dandjinou, à adopter le décret d’application du code de la publicité. Là aussi, c’était un pas très important qui signifie que le gouvernement prend l’ensemble des dispositions pour que la loi soit appliquée.

Au niveau de publicitaires Associés, nous avons également adopté trois textes professionnels. Une charte qualité pour garantir la qualité de notre travail, pour mettre en confiance nos annonceurs et fournisseurs. Pour dire que nous nous engageons à octroyer de meilleures conditions de travail à nos annonceurs, que nous nous engageons dans une dynamique d’amélioration continue. Celui qui est membre de Publicitaires Associés doit se distinguer par la qualité de son travail.

Ensuite, nous avons adopté un code de déontologie. Quand on est membre de Publicitaires Associés, on doit s’obliger à respecter les règles professionnelles de travail qui fondent notre métier, il doit y avoir une certaine discipline dans notre façon de travailler.

Nous avons également adopté un code d’éthique qui nous oblige à être dans une certaine moralité quand nous faisons notre travail. Il y a ce que la loi nous oblige, il y a ce que notre profession nous oblige, mais nous-mêmes en tant que travailleurs, citoyens du Burkina, nous devons développer notre démarche de publicitaires en nous basant sur la moralité. Notre travail doit contribuer à quelque chose de bien.
Il y a donc cinq textes sur lesquels nous avons travaillé qui, aujourd’hui sont le soubassement de la structuration de notre secteur.

Outre tout cela, ce que nous pouvons estimer comme étant un gain pour notre mandat, c’est le fait que nous avons pu raviver la flamme, le membership au niveau de Publicitaires Associés. Des membres qui ne participaient pas aux activités se sont réveillés et sont devenus actifs. Il y a beaucoup de sollicitations pour être membre de l’organisation. Les gens ont senti l’intérêt d’être dans Publicitaires Associés. On s’est davantage rapprochés, on s’est davantage rencontrés et cela va nous permettre de travailler ensemble pour gagner ensemble.

Il y a aussi la liste des membres sur laquelle nous avons travaillé. Nous avons sorti la liste des membres 2017, et fait la carte de membre. Ceci, pour que nos agences membres qui vont vendre des annonces dans les médias, soient reconnues comme agences et qu’on leur donne des commissions d’agence. A nos membres, nous avons décerné des attestations, ils peuvent les joindre à leurs dossiers quand ils vont postuler à un marché, pour certifier qu’ils sont membres de Publicitaires Associés.
Nous estimons que ce sont des acquis que le prochain bureau devra travailler à pérenniser.

En tant que structure faitière, pensez-vous que les textes adoptés à l’interne sont appliqués par les membres ? Les manquements dont vous avez fait cas plus haut, ne sont-ils pas aussi l’œuvre des membres de Publicitaires Associés ?
C’est pourquoi je pense que le travail du prochain bureau doit surtout être l’application des textes. Pendant notre mandat, nous nous sommes surtout investis à l’adoption des textes. Ce sont des nouveaux textes, et nous n’avons pas vraiment travaillé sur le suivi et le contrôle. On a d’abord mis le cadre en place. Le bureau à venir devrait donc veiller à ce que ce cadre soit respecté.

Et ceux qui ne respectent pas seront sanctionnés. On a déjà posé les bases de la mise en place d’un organe de veille, de surveillance, pour regarder si les agences (membres ou non membres) respectent les textes. On voudrait même que cet organe soit indépendant de Publicitaires Associés pour surveiller la vie publicitaire au Burkina Faso, interpeller les agences, saisir les autorités compétentes.

En dehors de l’application des textes, quels sont les futurs défis du monde de la publicité et singulièrement du prochain bureau de Publicitaires Associés ?

Je pense que les prochains bureaux doivent aussi beaucoup travailler sur deux aspects. Les aspects de renforcement des capacités techniques, rehausser le niveau de compétence de nos agences membres. On remarque sur le terrain qu’il y a des sociétés étrangères qui viennent pendre le marché de communication ici. La nouvelle loi protège les agences installées au Burkina. Mais il faut que nous travaillions à avoir un niveau de compétence qui est tel qu’une société qui est ici ne veuille pas aller chercher une société de communication à l’étranger.

Il faut deuxièmement former nos entreprises sur les aspects commerciaux. Une chose est d’être compétente, une autre est de pouvoir lever les marchés. Avec l’ouverture des barrières douanières et avec les Technologies de l’information et de la communication, le marché est totalement ouvert. Il faut renforcer nos capacités commerciales pour que nous soyons capables de lever des marchés au niveau international, dans les autres pays de la sous-région ; quitte à ce qu’on puisse promouvoir le rapprochement entre plusieurs agences et des pôles de compétences, créer des groupes plus forts et compétitifs à l’international.

En fin de mandat, avez vous le sentiment d’un devoir accompli ?

Je crois que c’est aux autres de dire si ce que nous avons fait est satisfaisant. On pense avoir joué notre rôle, apporté notre contribution. Il reste à faire en sorte que ce qui a été engrangé comme acquis durant ce mandat, soit consolidé. Qu’il y ait une sorte d’héritage à sauvegarder.

Qu’est-ce que vous auriez voulu faire et qui n’a pas été fait, à cause peut-être du manque de temps ou de l’environnement de façon générale ?

Nous aurions voulu organiser la Semaine nationale de la communication. Sur le reste, ce sont des chantiers. On ne peut pas vouloir tout réaliser avant de partir.
Par contre, la chose particulière que j’ai vécue sous mon mandat, c’est l’affaire du Conseil supérieur de la communication (CSC) avec Désiré Komboïgo. Lorsqu’il y a eu le problème, Publicitaires Associés a essayé d’intervenir, mais c’était vraiment difficile parce que les bords étaient tranchés dans cette querelle. Cela nous a mis mal à l’aise parce que tout au long de notre mandat, c’était tendu entre Désiré Komboïgo qui est notre représentant au CSC et les autres membres.

Cela fait que nous n’avons pas beaucoup profité d’une bonne collaboration avec le Conseil supérieur de la communication. Mais je suis satisfait et content de remarquer que les choses ont commencé à évoluer dans le bon sens. C’est ce qu’on peut souhaiter, parce que dans la division, on ne peut rien construire. Si on met les efforts, les intelligences ensemble, c’est sûr qu’on va faire des choses extraordinaires.

Interview réalisée par Tiga Cheick Sawadogo
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