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Saccage d’équipements à Nadiagou : Les prévenus et les témoins ont été entendus

LEFASO.NET | Par Soumaila Sana

Publié le vendredi 2 juin 2017 à 13h20min

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Saccage d’équipements à Nadiagou : Les prévenus et les témoins ont été entendus

Ce mardi 30 mai 2017, s’est ouvert au Tribunal de grande instance (TGI) de Fada N’Gourma, le procès des 27 prévenus, poursuivis pour rébellion, destruction volontaire de biens mobiliers et immobiliers, suite aux émeutes violentes des 17 et 18 avril derniers à Nadiagou dans la province de la Kompienga. Les manifestants avaient alors détruit par flammes le campement du buffle rouge (du vieux Lazare Tapsoba) et le poste du service départemental des Eaux et Forets.

Les 17 et 18 avril 2017, la mort d’un présumé braconnier dans une réserve faunique dans la province de la Kompienga dans l’Est du Burkina a entrainé la destruction du campement du Buffle rouge et du poste de service départemental des Eaux et Forêts de Nadiagou. Pour tirer cette affaire au clair, 27 prévenus sont à la barre au Tribunal de grande instance (TGI) de Fada. Au début du procès, le tribunal a tenu à relever l’exception de deux prévenus mineurs que sont notamment Rachidou Ouédraogo et Kaboré Lassané. Ils seront entendus comme témoins mineurs.

Le président du tribunal assisté de deux juges et du procureur du Faso près le Tribunal de grande instance de Fada N’Gourma, a donné le ton pour un procès équitable. La partie civile était représentée par maitre Alexandre Daboné, avocat à la Cour qui assistait le vieux Lazare Tapsoba.

Les 27 prévenus ont tous comparu pour rébellion et destruction volontaire de biens mobiliers et immobiliers. Parmi eux, certains ont reconnu avoir été sur les lieux mais ne se reconnaissent pas dans les faits. Combary Mambaré, prévenu, a lui reconnu les faits qui lui sont reprochés : « que je dise la vérité ou mentir cela ne va pas me libérer. Le défunt était mon voisin ; donc c’est ce qui m’a poussé à participer à ces actes de vandalisme afin que son âme ne me demande pas des comptes ».

Ce procès a été suspendu aux environs de 17heures pour une reprise le mercredi 31 mai avec 8 prévenus en attente de comparution.

A la reprise le mercredi à 8h, parmi les 8 prévenus restants, Onadja ancien membre du groupe d’auto-défense Kogl-wéogo venait d’épuiser une peine de 8mois il y a environ 3mois. A la barre, il a nié les faits affirmant avoir été victime de dénonciation de ses anciens collègues membres des groupes d’auto-défenses kogl-wéogo. « Je reconnais que je vole, mais je suis allé sur les lieux pour filmer », a-t-il confié.

Après la comparution des 8 prévenus, place a été donnée aux témoins. Le premier à la barre était le gérant du campement OnadjaYandja. A la question du président du Tribunal de savoir s’il y a un lien entre lui et le vieux Tapsoba Lazare, il a répondu : « oui il est mon employeur, je suis le gérant du campement ». Avant de renchérir qu’il était présent ce jour-là au campement avec son patron Lazare dans la matinée. Mais dans la nuit du 17 au 18 avril, ils se sont enfuis afin de se réfugier car ayant senti le danger venir. Il affirme que c’est après les actes de vandalismes qu’il est revenu au campement, mais seule la cuisine était intacte, le reste a été brulé. « Un policier m’a indexé un jeune qui aurait été le premier à consommer les boissons », a-t-il ajouté.

Georges Sankara, chef de poste forestier de Nadiagou, lui aussi à la barre comme témoin a expliqué que c’est après l’enterrement du défunt braconnier, le sieur Mady Sana que la population est allée au campement. « Nous avions l’information qu’elle était armée de machettes et avait des bidons d’essence. C’est en ce moment que nous nous sommes retirés avec le concessionnaire du campement hors de la zone d’environ 5km. Quand je partais au campement, j’avais laissé mon adjoint au poste. A mon retour j’ai constaté qu’ils ont cassé et tout volé avant de bruler le service », a-t-il témoigné. Il précise qu’il s’était rendu au campement afin que les autres corps de la sécurité puissent faire le constat du corps du défunt. « En ce moment Idrissa Kaboré,le beau-frère du défunt a été appelé pour identifier le corps. Après identification du corps, il a émis un appel demandant à la population de se préparer pour faire quoi, je ne saurais le dire », a-t-il soutenu.

A la question de la partie civile de savoir le nombre de Forces de défense et de sécurité (FDS) qui étaient sur le lieu, George Sankara a répondu, qu’il y avait 4 gendarmes et 10 forestiers. C’est ainsi que l’avocat a demandé la comparution de toutes ces FDS.

Le troisième témoin à la barre a été le directeur provincial de l’environnement de la Kompienga, Bernard Bingo. « Monsieur le président, je suis triste car nous les Burkinabè nous n’aimons pas la vérité. Je déplore le mensonge des uns et des autres.J’ai vécu l’évènement en live », a-t-il d’emblée dit. Et de poursuivre que le nommé Yougbaré Saydou tenait bel et bien des bidons d’essence et que les 4 meneurs sont Yougbaré Sayouba, Combary Sambaré, Kaboré Idrissa (beau-frère du défunt) et Kafando Mahamoudou. « Ouango Noufou, le responsable du bar Doala à la Kompienga, a été le meneur de l’équipe de la Kompienga, c’est lui qui a conduit les gens aux saccages en payant du carburant pour sa délégation. Quand la scène s’est produite, ils se sont mis en tenues Kogl-wéogo car le défunt était un Kogl-wéogo », a-t-il ajouté.

Selon Blaise Bazié, procureur du Faso près le TGI de Fada, ce procès est une audience extraordinaire compte tenu du nombre des prévenus et de la gravité des faits. A l’entendre, « Nous avons choisi de saisir le Tribunal correctionnel au lieu donc de saisir le juge d’instruction compte tenu de la gravité des faits parce que c’est des faits criminels, plus l’incendie volontaire que nous voulions ignorer pour aller dans le sens de l’efficacité en les poursuivant simplement pour destruction volontaire de biens et rébellion ». Il regrette que tous les prévenus qui étaient à la barre pendant les deux jours aient manifesté une « mauvaise foi sans précédent ».

Pour lui, « Le rôle du procureur, de son parquet, c’est d’arriver à démontrer que ce sont des prévenus de mauvaise foi et arriver à les confondre, je crois que pour l’instant, sans préjuger de la décision du tribunal, nous avons pu faire quelque chose d’important pour montrer que c’est des prévenus qui sont entièrement impliqués dans les faits bien que pour l’ensemble, ils tentent de nier les faits ».

L’audience a été suspendue pour être reprise le 12 juin 2017 pour permettre à certaines personnalités de la ville de Nadiagou et de Pama qui ont dû intervenir pour apaiser la situation, d’être présentes pour témoigner.

Me Lassané Alex Daboné, avocat à la Cour, représentant la partie civile, le campement du buffle rouge, dit avoir constaté que l’audience se déroule normalement. « On ne s’attendait pas à autre chose. Il y a des personnes qui ont été impliquées dans ce qui est arrivé au campement du buffle rouge qui ont reconnu les faits et d’autres non. Cela fait que l’audience a été suspendue le premier jour pour être reprise le second jour », a-t-il dit. Malgré tout, a-t-il renchéri, les prévenus persistaient dans la mauvaise foi bien qu’il y ait des éléments accablants les concernant. Il se dit toutefois satisfait du renvoi parce qu’il y a des noms qui ont été cités à plusieurs reprises, comme ceux du chef de Nadiagou et de l’ancien maire de Pama. « Toutes ces personnes ont été identifiées parce qu’ils auraient été sur les lieux. Leur présence sera nécessaire pour que la vérité puisse jaillir », a précisé Me Daboné. Le campement du buffle rouge a subi d’énormes pertes, a-t-il estimé, et « nous ne sommes pas pressés du moment où nous allons être indemnisés par les personnes qui nous ont fait subir tous ses torts », a conclu l’avocat.


Lire aussi : Nadiagou : Des infrastructures forestières incendiées suite à la mort d’un présumé braconnier


Soumaila Sana
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