Nayala : La relance des activités du LUMASSAN sonne la fin d’un « arrêt technique »
Course cycliste, défilé de masques, lutte traditionnelle, ont été les activités phares marquant la relance du LUMASSAN (Lutte et masque en pays San). C’était le 10 mai 2014 à Toma, chef-lieu de la province du Nayala, en présence du président du Conseil économique et social (CES), P. Ernest Yonli, du député Léonce Koné représentant le président de l’AN, du Pr Joseph Paré, du Directeur de cabinet du président du Faso, Sané Topan, et de bien d’autres personnalités.
Initialement lancé en 1997, le LUMASSAN aura, au fil des ans, réussi la prouesse d’instaurer en la culture san, une dynamique – artistique surtout – particulièrement expressive. Et ce, jusqu’en 2003. Depuis, plus rien ; en tout cas, ‘’la fête de Jean-Baptiste’’ comme on l’appelle dans le terroir, aura connu une ‘’hibernation’’ dix ans durant. Pour certains, c’est la ‘’mort’’ du LUMASSAN. Mais pour son promoteur, le député Jean-Baptiste Dala, il s’agit d’un « arrêt technique ». Un arrêt qui, à l’en croire, aura été maintes fois marqué par « la forte pression de la jeunesse du Nayala » désireuse de revivre l’événement. Toute chose qui a fini par imposer de « repenser et de voir comment relancer les activités de LUMASSAN ». D’où les activités de ce 10 mai 2014, dont la plus attendue était de toute évidence, la lutte traditionnelle.
Il était 14 heures, lorsque l’arène de lutte commençait à accueillir du monde. Ni le soleil de plomb, ni l’horizon annonciateur de pluie, n’a joué négativement sur l’affluence. Une foule d’une taille rare, du moins à Toma. Certains sont venus de loin, même de très loin. Forte passion pour la lutte, ou capacité de mobilisation du promoteur ? Pour qui connaît ce dernier et le peuple san, ce sont les deux.
Quelques allocutions livrées juste après un défilé de masques, place à la démonstration de musculature, mais surtout de technicité dans l’adversité. Des combats sans merci, mais emprunts du sens élevé de camaraderie ; chacun des lutteurs voulant retourner chez lui avec la toute neuve moto ‘’Symba’’. Au niveau de l’arène, l’on se veut offensif et prudent à la fois. Du côté des spectateurs, l’on est pressé de voir l’issue de chaque combat. C’est donc une attention toute particulière qui se lisait sur tous les visages. Même la tornade qui a commencé seulement quelques minutes après l’ouverture de la lutte, n’a pu faire fuir la foule ; seulement l’on cherchait à s’abriter un tout petit peu. Visiblement, personne ne veut se faire conter l’issue de cette compétition tant attendue. D’âpres et interminables combats, il y’en a eus ; sous une pluie interminable elle aussi, et que l’autre qualifierait de ‘’bienfaisante’’. En tout cas, c’est sous la pluie que les deux finalistes de la poule ‘’toutes catégories confondues’’, Romaric Kawané et Eloi Zerbo, ont été déclarés tous deux vainqueurs. Conséquence - heureuse évidemment -, chacun d’eux a reçu une moto doublée de la somme de 300 000 CFA, le prix le plus élevé qui devrait normalement revenir au seul vainqueur. En effet, l’issue de ce dernier combat tardant à se dessiner jusque-là sous la pluie alors que la nuit noire s’installait, le co-parrain de LUMASSAN 2014, Ernest Yonli a, séance tenante, fait la promesse d’offrir le même prix (moto plus 300 000 CFA) à l’autre des deux finalistes. D’où l’arrêt de ce combat, au bonheur de l’éventuel défaillant. Tout comme eux, une dizaine d’autres lutteurs ont reçu de l’argent d’un montant compris entre 200 000 FCFA et 40 000 FCFA en fonction des poules et du classement avec en plus – pour certains – une charrue.
Signalons que cette séance de lutte a fait suite à l’épreuve de course cycliste au cours de laquelle le jeune Bassirou Paré s’est imposé en courant 70,5 km en 1h56mn. C’est donc à lui qu’est revenu le premier prix de cette compétition, un prix composé d’une moto ‘’Symba’’ et de la somme de 100 000 FCFA. Mieux, séance tenante, le promoteur de LUMASSAN, en signe d’encouragement, a doublé ce montant qui a, en outre, été renforcé par d’autres primes. Là également, quatre autres coureurs ont reçu une enveloppe dont le contenu varie entre 100 000 FCFA et 40 000 FCFA.
C’est parti pour des éditions régulières de LUMASSAN
Cette édition de relance de ‘’LUMASSAN nouveau départ’’ a ainsi refermé ses portes après avoir fait de nombreux heureux parmi les cyclistes, mais surtout au rang des lutteurs. Une édition qui aura non seulement été - selon son promoteur - l’expression culturelle de toute la population du Nayala, mais aussi bénéficié de soutien placé, foi du co-parrain P. Ernest Yonli, « sous le signe de la solidarité avec le peuple san ». Ce dernier a saisi l’occasion pour exprimer son admiration à l’endroit de ce peuple qui a su perpétuer la lutte traditionnelle, cette valeur ancestrale. La lutte traditionnelle telle que pratiquée surtout dans les provinces de la Boucle du Mouhoun, du Sanguié et du Nayala, M. Yonli dira y voir une « activité hautement conviviale, hautement initiatrice de l’élévation des jeunes garçons à la maturité ». Pour lui en effet, la lutte traditionnelle est « le concentré de trois valeurs : c’est la coutume, c’est le sport, mais c’est aussi la modernité ». Et d’ajouter, « C’est quelque chose de très symbolique pour notre jeunesse, à savoir que pour être fort demain, il faut aller puiser des valeurs dans notre coutume, dans nos traditions. Ça magnifie le corps, ça donne de l’élégance. C’est aussi une valeur d’éducation à la détermination. C’est une leçon que nos ancêtres nous ont léguée et nous devons continuer à valoriser cette vertu ». Et, tout en relevant être « content » de ce que la jeunesse san « continue à vouloir garder, préserver et améliorer cette valeur ancestrale qu’est la lutte », le président du CES a lancé un appel « à toute la jeunesse du Burkina Faso de suivre l’exemple de détermination, de croyance aux valeurs ancestrales, de valorisation de notre patrimoine culturel que fait la jeunesse du Nayala ». En effet, et comme le précise le député Dala, « la force de LUMASSAN, c’est la jeunesse. Le LUMASSAN repose sur cette jeunesse, et la jeunesse croit aussi au LUMASSAN ». Et le maire de la commune de Toma, Bonaventure Toé, de dire que la renaissance de LUMASSAN est venue galvaniser la jeunesse.
Les couleurs des prochaines éditions …
S’adressant particulièrement à cette jeunesse, M. Dala dira en langue locale san, « il vous appartient de faire en sorte que désormais, personne ne puisse bloquer la tenue régulière de LUMASSAN ». Mais l’on ne saura pas, qui l’avait bloquée de 2003 à 2013. Pour sa part, la volonté de tourner définitivement la léthargie d’une dizaine d’année est clairement affichée. C’est du moins, l’assurance qu’il a exprimée. On peut donc espérer que le LUMASSAN aura une longue suite, en beaucoup d’autres éditions.
Pour cette suite, le président du CES préconise de dépasser la lutte des jeunes seuls, pour organiser un gala de lutte des anciens. « Ce sont les anciens qui vont ouvrir l’édition de l’année prochaine », a-t-il déjà annoncé. Et le promoteur de promettre, « L’année prochaine, nous allons faire avec toutes les disciplines de LUMASSAN ».
En attendant, c’est un promoteur particulièrement comblé, qui a tenu à « remercier sincèrement » tous ceux qui ont aidé à la tenue de la présente édition, en particulier Soungalo Ouattara, le président de l’Assemblée nationale et président de la présente édition de relance, ainsi que les parrains P. Ernest Yonli et François Compaoré.
Fulbert Paré
Lefaso.net