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Effondrement d’un bâtiment à Tan Aliz : 2 morts, 6 blessés

Publié le lundi 19 juin 2006 à 07h26min

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Ce qui s’est passé le jeudi 15 juin 2006 vers 16 heures, avec la chute d’un bâtiment en construction à la succursale n°2 de la Société Tan Aliz (face à la MACO), est un fait rarissime dans notre pays. Il a fallu 17 heures aux sapeurs-pompiers pour extirper des décombres 2 corps inanimés et 6 blessés.

« J’ai entendu un bruit assourdissant lorsque je m’apprêtais à mettre mon engin au parking pour rejoindre mes camarades, surtout Félix Kaboré, qui m’attendait ». Ces propos sont ceux d’un veinard, Adama Zoungrana, qui avait fait un tour chez lui pour suivre le match Equateur # Costa Rica. De Tampouy, quartier où il réside, à la succursale n°2 de Tan Aliz, l’homme a « perdu » plus d’une quinzaine de minutes qui se seront révélées, par la suite, précieuses pour sa vie.

Ce maçon, à l’arrivée des sapeurs pompiers vers 16h, a fait œuvre utile en donnant un coup de main aux secouristes pour sauver ses camarades, dont il connaissait le nombre, emprisonnés sous le béton. Il nous confiera donc que 3 personnes ont été sauvées dès les premières interventions ; puis ce fut le tour de Pascal Ki, dont on a dû sectionner, avec une machette, le bras gauche pris en tenaille par une masse importante de ciment.

Ensuite, deux personnes sortiront indemnes du bâtiment écroulé à l’heure de la descente tandis que deux autres étaient toujours prisonnières des décombres. Il s’agissait, selon notre informateur, de Macaire Sawadogo, dont le corps avait été repéré, et de Pascal B. Kaboré, porté disparu. C’est là que la longue bataille commença vers 19h avec compresseur, cisailles, burins et autres outils, sous une ambiance morose et pleine d’émotions.

La presse était l’indésirable de cette tragédie. En effet, dès les premières prises de vue, des dames de la société Tan Aliz s’opposèrent. « Non, arrêtez et revenez demain, nous ne pouvons pas vous permettre de faire ça », commandèrent-elles. Le substitut du Procureur, Etienne Yé, accompagné de son collègue, Sékou Traoré, intervint promptement pour que les journalistes puissent faire leur travail.

Des sauveteurs sans matériel approprié

Heureusement qu’il y a encore des gens comme eux ! Excepté le vrombissement du compresseur, un silence de mort régnait chez les secouristes qui continuaient à piocher, à l’aide de projecteurs prêtés par le réalisateur Idrissa Ouédraogo. Un véritable travail de fourmi pour la vingtaine de personnes qui étaient mobilisées. Vers 21h, une équipe du Génie militaire viendra en renfort.

Celle-ci, par manque de carburant pour démarrer ses machines, se tourna vers les responsables de la société, auprès desquels elle eut gain de cause. Le manque de matériel approprié pour ce genre d’intervention était perceptible ; par moments, des voix s’élevaient du haut des ruines : « Envoyez nous deux burins,... Est-ce qu’on peut avoir des cisailles ? ». Vite, on courait dans tous les sens pour satisfaire les demandeurs.

Entre-temps, le maire de Ouagadougou, Simon Compaoré, débarqua sur les lieux et on lui fit le point de l’opération de sauvetage. L’édile, consterné, secoua la tête et resta songeur un bon moment, avant de s’éclipser. Puis, ce fut le tour du maire de l’arrondissement de Bogodogo, Zénabou Drabo. Idrissa Ouédraogo, un « envoyé spécial » du ministre Benoît Ouattara, après avoir pris le pouls de la situation, tenta de joindre ce dernier au téléphone.

Devant l’entrée principale de la succursale n°2 ceinturée par des barrages policiers, les commentaires et supputations allaient bon train et condamnaient, sans répit, l’entreprise chargée de l’exécution des travaux. « Comment peut-on construire un bâtiment de cette hauteur (à un niveau) et longueur sans prendre toutes les précautions ? », pouvait-on entendre.

Retour à l’intérieur, où les sauveteurs perforaient toujours des parois pour atteindre Macaire Sawadogo à moitié enseveli. Finalement, le corps sans vie de ce dernier fut retiré des débris vers 5 heures, à l’aube du vendredi 16 juin. Quant à celui du porté disparu, Pascal B. Kaboré, il fut déterré plus tard aux environs de 9 heures. Ouf ! Les secouristes prirent enfin un repos bien mérité sous un arbre, après 17 heures de lutte, tandis que pelleteuses, camions benne, et autres engins de terrassement, travaillaient à déblayer le terrain du sinistre.

Mystère sur l’identité de l’entreprise

Vendredi 16 juin 2006, 12h 40, le directeur général, Mahamadou Ouédraogo, déclare à la presse que la société est en train d’enterrer ses morts, de soigner ses blessés, et qu’une enquête sera diligentée sur les raisons du drame pour situer les responsabilités.

Il invoquera des problèmes de santé pour justifier l’absence de la patronne de la société, Alizèta Ouédraogo dite Alizèt Gando, sur le lieu de la tragédie. « Malgré cela, elle appelle toutes les 15 à 20 minutes pour s’enquérir de l’évolution de la situation », ajoutera-t-il. Mais quelle est l’entreprise chargée de la construction du bâtiment puisqu’aucun panneau indicatif n’est visible ? Le directeur général refusera de donner le nom de l’entreprise avant la fin de l’enquête.

Pour ce qui est des blessés, deux personnes séjournent toujours au service de traumatologie de l’hôpital Yalgado, les quatre autres ayant été libérés. Il s’agit de Pascal Ki, qui a eu le bras gauche amputé et était nourri à la bouillie par une femme lors de notre passage ; de Sylvain Ouangré, touché au visage et à la tête. Mais, même dans les moments difficiles, il y a en qui ne manquent jamais d’humour, comme cet agent de santé qui demanda à sa collègue si elle n’avait pas encore reçu une enveloppe d’Alizèt Gando. Et cette dernière de lui rétorquer que les blessés sont arrivés la veille de sa garde.

Cyr Payim Ouédraogo

Observateur Paalga

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Vos commentaires

  • Le 19 juin 2006 à 12:53 En réponse à : > Effondrement d’un bâtiment à Tan Aliz : 2 morts, 6 blessés

    Mes condoleances aux familles éplorées et prompt rétablissement aux bléssés.
    Mais il y a une vérité que je vais dire, le manque de rigueur sur le suivi les chantiers de construction est un véritable problème sérieux au Burkina. Les normes sont bafouées et personne ne s’en émeuve, et j’ai toujours dit à qui veut l’entendre que nous avons la chance de ne pas être sur la ceinture sismique, sinon, nos "beaux" bâtiments allaient presque tous s’écrouler à la moindre sécousse.

    Je ne veux pas jouer à l’oiseau de mauvais augure, mais je sens que des catastrophes plus graves dans des chantiers de construction sont à venir si les services compétents ne sévissent pas. N’importe quel poseur de brique se proclame entrepreneur de bâtiment tout simplement parce que son frère ou parent est un haut placé dans le milieu et peut lui octroyer des gros marchés de construction. Ce qui m’étonne dans tout ça, c’est que le bâtiment effondré en question appartient à l’une des plus grandes entreprises immobilières "spécialisée" dans le bâtiment. Si leur bâtiment s’écroule, que dirions-nous de l’état des nombreuses cités construites (par cette entreprise) où n’importe quel passant peut déjà voir les fissures lézardées sur leurs villas flambant neuves ?

    La majorité de ceux qui y habitent ne me diront pas le contraire.....

    • Le 21 juin 2006 à 22:04 En réponse à : > Effondrement d’un bâtiment à Tan Aliz : 2 morts, 6 blessés

      Le problème c’est que Mme La Directrice ne peut pas être partout. Je crains fort que les détournements de ciments à l’origine du manque de dosage conséquent ne soit à l’origine de ce type de sinistre. Alors j’espère que chacun, en ce qui le concerne mettra du sien pour aider cette femme, bâtisseur à poursuivre les actions de développement. Il y va de notre intérêt à tous. Mon identité importe peu.

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