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Photographie : « Que la mort n’arrête pas nos rêves », exalte Siaka Sawadogo dit Champy la mélodie

Publié le dimanche 20 août 2023 à 22h07min

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Photographie : « Que la mort n’arrête pas nos rêves », exalte Siaka Sawadogo dit Champy la mélodie

Le Burkina Faso compte des prodiges dans le domaine de la photographie. Des talents polis à force de travail. Siaka Sawadogo, alias « Champy la mélodie », fait partie de cette jeunesse qui bouscule le destin et casse les codes dans sa façon de se vêtir mais surtout de figer l’instant à travers ses clichés. A l’occasion de la journée mondiale de la photographie, célébrée chaque 19 août, il s’est ouvert à nous dans un entretien express.

Lefaso.net : Présentez-vous à nos lecteurs.

Siaka Sawadogo : Je suis Siaka Sawadogo à l’état civil, et Champy la mélodie sur les réseaux sociaux, concepteur de bonne humeur.

A quel moment êtes-vous arrivé dans l’univers de la photographie ?

Déjà, il faut dire que je suis de la radio, journaliste de formation. La photographie est venue avec le temps. J’avais un cousin à la maison qui le faisait très bien. Mais en 2017, il est décédé. Et je me suis dit qu’il fallait continuer ce qu’il avait commencé. C’est comme ça que tout est parti.

Racontez-nous votre premier contact avec un appareil photo.

Ça remonte à 2016. Il y avait un ami au quartier qui faisait de la photographie avec mon cousin et qui me demandait souvent de l’accompagner sur le terrain, pour prendre deux, trois photos. C’est comme ça que tout a commencé. Je crois que j’ai toujours la photo en question sur mon ordinateur et c’est une photo de lui.

Vous souvenez-vous de votre premier ‘‘gombo’’ de photographe ?

Pour moi un gombo, c’est un marché qui te permet d’avoir assez d’argent. Sinon les shootings, les prestations de concert sont pour moi des prises de contact. Mon premier excellent gombo, c’était à un mariage. C’était une dame qui m’avait contacté sur les réseaux sociaux. Bon, à l’époque, ce n’était vraiment pas trop ça. Je lui avais déjà souligné que je venais de commencer. Je lui ai dit de ne pas s’attendre à un résultat à 100% bien, mais je lui ai promis de faire de mon mieux pour lui offrir quelque chose de bien. C’est Madame Kiema, je crois. On est toujours en contact, on s’appelle souvent et elle voit souvent mes publications sur les réseaux.

Combien avez-vous reçu pour cette prestation ?

Je pense que c’était 400 000 F CFA.

400 000 F CFA pour un début ? C’est énorme !

Oui, 400 000 F CFA pour un début en tout cas, c’est énorme. C’est pour ça que je dis que c’était mon vrai premier gombo. Il y en a qui commencent des mariages avec 25 000, 30 000 F CFA, etc. Le fait d’avoir fait de la radio m’a beaucoup aidé à mes débuts, car il y en a qui me connaissaient déjà bien. Donc, quand j’ai commencé la photographie, c’est parti très vite. Je remercie Dieu pour cela.

Et qu’avez-vous fait avec ces 400 000 F CFA ?

Déjà, il faut dire qu’au début, je n’avais pas le matériel. Je n’avais pas de caméra. J’étais obligé d’emprunter les caméras de mes amis, à gauche à droite. Il y avait une maison de production à Ouagadougou qui me sollicitait souvent pour ses prestations. Je prenais le matériel et je travaillais pour eux. Ils ne me payaient pas, mais en retour je pouvais utiliser leur matériel pour gérer mes gombos. Donc, quand j’ai eu les 400 000, je me suis offert une nouvelle caméra. Je remercie M. Cheick Omar qui, au début, m’avait aidé avec un Canon 800D. Avec aussi l’aide de certains aînés, tout est parti.

Décrivez-nous un peu une journée de shooting pour un mariage.

Il y a beaucoup de communication entre le client et le photographe. Il faut déjà arriver à savoir ce que veut le client, ce que veut la mariée, ce que veut le marié. Et puis essayer de combiner tous les deux besoins pour produire un bon résultat. Une organisation de mariage, c’est beaucoup de stress parce que ta matinée commence déjà à partir de 3h. Il faut faire le tournage au salon de coiffure, les photos de maquillage et tout ce qui va avec. Tu as une équipe entière qu’il faut gérer.

Pour la couverture d’un mariage, j’ai une équipe de six personnes : deux photographes, deux vidéastes et deux assistants. Je ne travaille qu’avec des jeunes. C’est un gros boulot pour avoir ces jeunes, très tôt le matin. Après le maquillage, il y a le shooting, la mairie. A Ouaga, ce n’est pas très souvent bien organisé dans les mairies. Il y a la maman, les cousins, les oncles… Il faut savoir bien gérer tout ce stress jusqu’au soir. Il y a des mariages qui durent jusqu’à 23h.

Y a-t-il des gens qui minimisent votre travail ?

Avant hier, il y a une dame qui m’a contacté pour un mariage. Elle m’a dit qu’elle a un mariage à Saponé et qu’elle a juste besoin de 150 photos. J’ai répondu qu’il n’y a aucun souci. Je lui ai dit que je ne vends pas une photo mais une prestation. Je lui ai dit qu’il y aura un nombre de photos que je vais retoucher mais qu’elle aura tous les rushs. Quand je lui ai donné le coût de la prestation, elle m’a répondu : “Juste pour les photos-là ?” Elle m’a dit qu’il y en a qui le font moins cher. Je lui ai dit que je peux lui recommander des photographes qui font deux fois moins cher que moi. On a tous notre manière de travailler et nous n’avons pas le même résultat en termes de qualité. Il y a des photographes qui ont des studios où ils font la photo à 1000 F CFA ; mais chez moi quand tu viens pour une photo d’identité, c’est autre chose. C’est ma prestation que je vends, je ne vends pas de photo. Donc, si tu es prêt à payer ma prestation, il n’y a aucun souci. On discute.

Quelles sont les qualités d’un bon photographe ?

Curiosité, patience, sensibilité. Il faut beaucoup de patience, beaucoup de communication, beaucoup de savoir-vivre aussi. Si tu n’arrives pas à bien communiquer avec les clients, à être doux avec toi-même, une question va se poser : « Est-ce que tu arrives à mettre de la bonne humeur dans le coeur de tes clients ? Est-ce qu’ils sont bien ? Est-ce que tes partenaires peuvent te recommander à d’autres personnes ? ».

Et à ce propos, est-ce que tu as une anecdote à raconter ?

Il y a une dame qui m’a déjà dit « Champy, tu as sauvé mon mariage ». Nous sommes allés faire un shooting chez elle à la maison avec elle, son mari et le reste de la famille. J’arrivais toujours à faire sourire les gens. Je ne savais pas qu’il y avait eu un décès dans la famille. Après la séance shooting, j’ai regroupé tout le monde et c’était la bonne humeur. Pourtant, le matin à mon arrivée, tout le monde était calme. Ça n’allait pas entre la dame et son mari. Après, elle m’a envoyé un message pour me dire « Champy, tu as sauvé mon mariage ». Jusqu’à présent, je me demande pourquoi ? Mais, elle n’arrive pas à me le dire. Et jusqu’à présent, c’est resté dans ma tête.

As-tu déjà voulu tout abandonner ?

Oui. Quand tu commences, il y a toujours des moments où tu vas te demander : « Est-ce que c’est excellent pour moi ? Est-ce que je vais continuer ? Est-ce que ce n’est pas mieux que j’arrête et que j’apprenne quelque chose d’autre ? » Après la radio, il y en a qui me demandaient pourquoi j’ai quitté la radio alors que j’étais bien. Au début, je n’avais pas totalement lâché la radio. Je faisais du 50-50. Mais à un moment donné, j’ai décidé de faire 90% dans la photo et 10% dans la radio.

Exerces-tu une autre activité en dehors de la photographie ?

Oui, je mène d’autres activités que je n’affiche pas sur les réseaux sociaux. Je suis à 45% dedans. Je fais de mon mieux pour ne pas lâcher.

Dans quelle activité es-tu, si ce n’est pas indiscret ?

(Rires) On va garder ça pour l’après interview.

Quels sont tes rapports avec les autres photographes burkinabè ?

J’ai de très bons rapports avec tous les photographes. On se voit, on discute. Hier, j’étais avec un ami et on a passé toute la journée à bosser, à partager certaines choses. On ne finit jamais d’apprendre dans la photographie.

Quelles sont tes perspectives ?

Il faut dire que je suis plus dans la photographie de mariages, les shootings, l’événementiel et l’institutionnel. Je rêve de faire des photos de voyage. C’est bien de rester à Ouaga, mais c’est encore mieux de voyager, de découvrir beaucoup de choses et d’amener mes confrères à s’ouvrir au monde, ouvrir des structures dans d’autres pays comme la France, les Etats-Unis. Tout en étant fier d’être un Burkimbila qui travaille pour le Burkina Faso et l’Afrique toute entière.

As-tu des conseils à l’endroit des jeunes photographes ?

Patienter et ne pas lâcher.

Un mot de fin à l’occasion de la journée mondiale de la photographie ?

Bonne fête de la photographie à tous mes confrères d’ici et d’ailleurs et que même la mort n’arrête pas nos rêves.

Lefaso.net

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