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8 mars 2022 : « L’autonomie de la femme ne doit pas affecter son foyer », exhorte Béatrice Sanon, policière à la retraite

Publié le mercredi 9 mars 2022 à 12h17min

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8 mars 2022 : « L’autonomie de la femme ne doit pas affecter son foyer », exhorte Béatrice Sanon, policière à la retraite

Officier de police, Béatrice Sanon, âgée de 62 ans, est aujourd’hui à la retraite. À l’occasion de la célébration de la journée internationale de la femme ce 8 mars 2022, la parole lui est donnée pour partager son expérience professionnelle avec l’ensemble des femmes en général et les jeunes policières en particulier.

Née le 15 octobre 1959 à Bobo-Dioulasso (capitale économique du Burkina Faso), Béatrice Sanon, est une policière à la retraite. Elle effectue tout son parcours scolaire dans la ville de Sya où elle obtient ses diplômes du primaire et du premier cycle. Elle fréquente d’abord l’école primaire Hamdalaye, où elle obtient son CEP. Elle poursuit ensuite ses études au collège Avenir (6e et de 5e) avant d’obtenir son BEPC au Cours normal de Tounouma en 1977. Elle fait ainsi, son entrée à la police nationale à l’âge de 18 ans, juste après avoir réussi à son examen du Brevet d’études du premier cycle.

Son amour pour “la tenue” naît en voyant des aînées dans le corps de la police. « En voyant mes aînées de la première promotion défiler lors de la fête nationale du 11 décembre 1976, j’ai apprécié la façon dont elles étaient vêtues dans leurs tenues, la fierté qu’elles affichaient d’appartenir à ce corps… Tout cela m’a inspiré et m’a conduit à embrasser le métier de policier. Chose qui a étonné mes parents qui s’attendaient à me voir poursuivre mes études du second cycle », explique Béatrice Sanon.

À l’occasion de la célébration de la journée internationale de la femme, Béatrice Sanon est admirative de tous les efforts consentis par la gent féminine pour s’offrir une place au soleil. « Je suis fière de voir que les femmes s’en sortent très bien de nos jours, tant au niveau de l’administration publique que du secteur informel. Je les invite à se faire confiance tout en s’éloignant des mesquineries », a-t-elle exhorté.

« Les peaux de banane que j’ai reçues […] j’ai pu les surmonter avec l’aide de Dieu », confie Béatrice Sanon, officier de police à la retraite

Parlant en effet d’efforts, Mme Sanon a dû en fournir pendant toute sa carrière jalonnée d’épreuves. La chose la plus difficile à faire pour elle, se résume essentiellement à sa formation. « Parce qu’on faisait tout ensemble : les mêmes exercices que les hommes. De la théorie à la pratique jusqu’au champ de tirs, nous avons été à la même école », a-t-elle indiqué.

Ce qui la fatiguait le plus, ce sont les patrouilles de nuit qui se faisaient à pied. Car il arrivait, confie-t-elle, de tomber souvent sur des voleurs dans certains quartiers qui prenaient la poudre d’escampette. En pareilles circonstances, l’équipe de patrouille réveillait les propriétaires des concessions pour les informer afin qu’ils prennent leurs précautions, laisse-t-elle entendre.

À cela s’ajoute la régulation de la circulation routière en plein centre-ville, avec une quasi-inexistence de feux tricolores surtout au niveau du rond-point des Nations Unies, rappelle Béatrice Sanon avec une certaine nostalgie. « Il arrivait que tu transpires au point que la sueur coule jusqu’aux pieds. À l’époque, il y avait la section de la CRS et celle des gardiens de la paix, en plus des assistants de police », renchérit-elle.

Certains hommes non plus n’auront pas facilité la tâche à Béatrice Sanon à un certain moment de sa carrière professionnelle. « Jai été confrontée à des hommes qui m’ont mis des battons dans les roues mais je suis arrivée à les surmonter et heureusement que cela n’a pas duré tout au long de ma carrière professionnelle. J’ai bravé cette épreuve pour que cela ne pollue pas l’atmosphère du service. Ce qui a fait et continue de faire ma force, c’est Dieu. Car la prière m’a aidé à déjouer certains complots parce qu’on cherchait à tout prix à me faire commettre des erreurs en vue de me relever de mon poste », a-t-elle révélé.

Sa prise de fonction à l’aéroport sera des plus éprouvantes, précise-t-elle. « Ce que j’ai vécu là-bas, c’est terrible ! Les peaux de banane que j’ai reçues du fait d’être une femme et pour avoir été affectée par la hiérarchie afin de seconder le chef de service de l’époque sans son avis. Cela m’a créé toute sorte de problèmes que j’ai pu surmonter avec l’aide de Dieu ».

« Béatrice Sanon est une femme battante et travailleuse », laisse entendre Elisabeth Yoni/Ibrango, commissaire de police à la retraite

Pour l’avoir connue dans les années 1977, une de ses promotionnaires, Elisabeth Yoni, commissaire de police à la retraite, témoigne de la détermination et de l’amour du travail bien fait de Béatrice Sanon. Une femme “battante”, “travailleuse”, voici les qualificatifs qu’utilise Mme Yoni pour la présenter. « Pour son ardeur au travail elle a été décorée de la médaille d’honneur de la police nationale », indique-t-elle.

Mme Yoni affirme également apprécier Béatrice pour son intégrité et le respect de la hiérarchie. Ce qui lui a valu d’ailleurs d’être nommée commissaire adjoint à l’aéroport de Ouagadougou. Rien d’étonnant, selon elle. « Après avoir appris que c’est une dame qui a été à l’origine de l’arrestation de Sia Popo Prosper grâce à sa vigilance et sa compétence. Lorsqu’il s’est avéré que c’était Béatrice Sanon, j’ai dit que je m’y attendais », exprime-t-elle avec fierté pour celle qu’elle considère comme une petite sœur.

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Lire aussi Braquage de la BCEAO en 2002 : Béatrice Sanon, la policière à l’origine de l’arrestation de Sia Popo Prosper n’a pas été décorée

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Malgré tous les coups durs encaissés, Béatrice Sanon reste une femme épanouie. Elle milite dans un mouvement de femmes dénommée “Association des voisines solidaires”. Une association qui s’est assignée pour mission de promouvoir la solidarité à travers des œuvres sociales.

Son conseil à l’endroit des femmes en ce jour de 8 mars, est que l’indépendance financière de ces dernières ne devrait pas leur donner un sentiment de supériorité vis-à-vis de leur époux. « Il est bon que la femme soit financièrement indépendante mais cela ne doit pas affecter son foyer. Ce n’est pas parce qu’elle a “percé” que la femme doit manquer de respect à son homme ou vouloir se comporter d’égal à égal avec son époux. Quoi qu’on dise, madame et monsieur ne peuvent pas être sur le même pied d’égalité. Il faut un chef de famille et c’est l’homme », prodigue-t-elle.
Quant aux femmes policières, Béatrice Sanon les invite au strict respect de la hiérarchie bien qu’il peut y avoir quelques fois des divergences.

Béatrice Sanon est mère d’une fille et grande mère d’un garçon. Très sportive, elle était membre d’une équipe de volleyball de la police nationale à l’époque. Ses loisirs sont le cinéma et la lecture. Ses plats préférés sont le tô accompagné de la sauce de feuilles de baobab, les pâtes alimentaires, le poulet et le poisson.
Mme Sanon dit détester le mensonge et l’hypocrisie, toutes choses qui l’emmènent à être beaucoup exigeante en matière d’amitié. « On dit que la vérité rougit les yeux mais ne les crève pas », conclut-elle avec un sourire.

L’argent est pour elle ce que l’essence est pour le moteur du véhicule. Il ne doit pas être placé au-dessus de l’homme. Quant à la réussite, elle représente selon elle un ensemble d’éléments qui concourent à la stabilité, la paix et l’épanouissement de l’être humain. « Car une personne peut être financièrement riche et à la fois malheureuse », dit-elle.

Hamed NANEMA
Lefaso.net

Crédits photos : Auguste PARÉ

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