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Sortie Nord de Ouagadougou (RN n°2) : En attendant 2025, le calvaire des usagers continue

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Publié le mardi 13 juillet 2021 à 11h55min

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Sortie Nord de Ouagadougou (RN n°2) : En attendant 2025, le calvaire des usagers continue

À Ouagadougou, c’est la croix et la bannière pour les usagers qui doivent rallier chaque jour le centre-ville, à partir des quartiers Bassinko, Yagma, Bissighin, Rimkieta et Kilwin. La congestion de l’avenue Yatenga (route nationale n°2) liée à l’exigüité de l’emprise, entraine un ballet incessant d’accidents souvent mortels.

Élève en classe de 5e au lycée privée « les Étoiles brillantes », Alice (nom d’emprunt) a été victime d’un accident de la circulation en décembre 2020, à la sortie nord de Ouagadougou. La cause : Un stationnement défectueux d’un camion citerne. Malgré la prompte réaction des sapeurs-pompiers, la jeune fille a été amputée de la jambe gauche et a dû arrêter les cours pour poursuivre les soins médicaux au centre hospitalier universitaire Yalgado Ouédraogo.

Des élèves du lycée « Les Etoiles brillantes » traversant la chaussée

D’autres ont été moins chanceux que la jeune Alice. Comme cette élève de la classe de seconde fauchée après un dépassement défectueux avec un excavateur. Ou ce jeune homme de 19 ans arraché à l’affection de ses proches en 2017 par un camion alors qu’il faisait des acrobaties sur la route avec son engin. Un acte pourtant puni par les textes en vigueur.

28 cas mortels en 2020

Selon la Brigade nationale des sapeurs-pompiers, les statistiques en matière d’accidents de la circulation sont édifiantes. En 2018, les sapeurs-pompiers sont intervenus sur 237 accidents contre 308 accidents en 2019 et 357 en 2020. En trois ans, 902 accidents ont eu lieu entre le rond-point de la jeunesse (ex-rond-point de Tampouy) et le nouveau péage. La plupart des accidents foi des pompiers est due à l’exiguïté de la chaussée mais aussi au non-respect du code de la route.

Du côté du service régional de la circulation et de la sécurité routière du Centre, les chiffres sont tout aussi ahurissants. Selon le lieutenant de police Éric Ilboudo, les flics ont effectué 100 sorties par mois donc près de 1 000 sorties par an pour des cas d’accidents. Les données sur les cas mortels donnent froid dans le dos. 32 personnes ont rendu l’âme en 2018 ; 35 en 2019 et 28 en 2020. Le dernier accident mortel en date (le 2 juillet, ndlr) mettait en cause une remorque et un véhicule de tourisme. Bilan : deux personnes décédées.

Lieutenant de police Ilboudo Eric, chef de la section accident du service régional de la circulation et de la sécurité routière du Centre

Des plots lumineux en attendant les passages piétons

Afin de prévenir les accidents de la circulation, les responsables du lycée « les Étoiles brillantes » ont pris attache avec l’Office national de la sécurité routière (ONASER) pour faciliter la traversée de la chaussée par les élèves. Les matins avant 7h, les après-midis et les soirs à 17h, le vigile aidé parfois de quelques surveillants sont à l’œuvre. A défaut de plots lumineux, l’établissement fait parfois usage de plots standards pour permettre aux élèves de franchir la route en toute sécurité. Selon le coordonnateur de l’établissement, Brahima Soro, l’ONASER a également recommandé aux responsables du lycée de tracer des passages pour piétons sur la route, afin d’amener les usagers à lever le pied de l’accélérateur.

Soro Brahima, coordonnateur du lycée « Les Étoiles brillantes »

Ces actions vont-elles porter fruit ? Difficile pour Brahima Soro d’y répondre. Lui qui a coutume de voir les Ouagalais « piétiner » les passages piétons, au nez et à la barbe des agents de police et des volontaires adjoints de sécurité (VADS). D’ailleurs, son vœu est de les voir réguler la circulation devant l’établissement pour désengorger le trafic à la rentrée prochaine.

Une gymnastique

Des embouteillages ? C’est le quotidien des usagers qui ne savent plus à quel saint se vouer. Bessana Zongo en sait quelque chose. Résident de la cité relais de Bassinko, il doit se livrer à une gymnastique quotidienne pour se rendre au travail, au centre-ville, après un détour au quartier Rimkièta pour déposer ses enfants à l’école. « Nous avons été oubliés. Il n’y a pas d’infrastructures socio-éducatives dans la cité relai de Bassinko. Nous sommes obligés d’aller ailleurs pour scolariser nos enfants. Ce qui fait que chaque matin, chacun est pressé. Et la voie est si étroite que l’on est obligé d’aller à la queue leu leu, lentement comme des tortues. Et s’il y a un petit accrochage sur la route, nous pouvons passer près de deux heures sans bouger de la file », raconte Bessana Zongo.

Des études en attendant l’élargissement de la route d’ici à l’horizon 2025

A quand la fin du calvaire, s’interrogent les usagers ? Selon le ministère des Infrastructures, les études socioéconomique, technique et environnementale sont en cours, en vue de la réalisation des travaux d’élargissement de la route d’ici à 2025. Ces études concernent les routes nationales n°2 et n°4 (route de Fada N’Gourma). A en croire la directrice générale de la normalisation et des études techniques du ministère des Infrastructures, Aicha Nabaré, d’autres études sont en cours de réalisation et concernent la route reliant la RN n°22 à la RN n°2 en passant par Yagma derrière le sanctuaire marial.

Les travaux d’élargissement devraient débuter en 2025

Caractéristiques futures de la route

En quoi va consister les travaux d’élargissement de la route ? Selon le ministère des Infrastructures, les routes seront élargies en 2x2 voies de 3,5m avec des pistes cyclables de 3,5 m et des trottoirs de 2 à 3m de part et d’autre. « Il y aura des aires de stationnement, l’éclairage public, un système d’assainissement, la signalisation verticale et horizontale. Si possible, il y aura des voies dédiées au bus et des voies de contre-allées si l’emprise disponible le permet », a expliqué la directrice générale de la normalisation et des études techniques.

Quid du financement ?

Pour le financement de ce grand projet routier, le ministère des Infrastructures affirme avoir adressé une requête à la Banque ouest-africaine de développement (BOAD), en avril 2021. Aussi, selon Aicha Nabaré, un appel de fonds est en cours de négociation avec un pôle d’institutions bancaires basées à Ouagadougou à travers le Fonds spécial routier du Burkina (FSR-B).

L’exiguïté de la chaussée est source d’accidents et d’embouteillages

Les riverains demandent le respect des engagements du gouvernement

« Nous espérons que les autorités vont respecter leurs engagements », a souhaité Bessana Zongo. Pour sa part, cet autre résident de la cité de Bassinko, Aboubacari Barro, estime que l’urgence est double et se trouve aussi bien au niveau de l’élargissement de l’avenue Yatenga qu’au niveau de l’aménagement de la route principale de la cité qui donne accès à la RN n°2. « Cette route est presque impraticable. Nous sommes en saison pluvieuse et il y a déjà des inquiétudes », a laissé entendre Aboubacari Barro.

Aboubacari Barro, résident de Bassinko

En attendant 2025, le calvaire des usagers continue et le ballet des accidents aussi. Le respect du code de la route et des agents chargés de la circulation routière doit être de rigueur. Les usagers doivent lever le pied de l’accélérateur. Avoir la priorité en circulation n’empêche pas de céder le passage ou de jeter un coup d’œil dans le rétroviseur. Après tout, ce n’est pas la route qui tue.

Herman Frédéric Bassolé
Lefaso.net

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