Contrat d’intérim Burkina Faso : La ligue des consommateurs dénonce une pratique ‘’mafieuse’’
LEFASO.NET | Maxime Jean-Eudes BAMBARA (stagiaire)
Le monde du travail burkinabè connait de plus en plus un accroissement notable des contrats d’intérim. Ce type de contrat qui était rarissime jadis, est sur le point de devenir la règle sur le marché du travail au Burkina. Une situation qui arrange bien les agences intérimaires qui se sucrent sur le dos des travailleurs. Interpelée plusieurs fois par des travailleurs vivant sous des contrats d’intérim, la ligue des consommateurs du Burkina en a fait son objet étude ces derniers temps afin de mieux cerner la situation. Dans une interview qu’il nous a accordée, le président de la ligue, Gilbert Hien Somda dénonce une ‘’pratique mafieuse, néfaste, dégradante’’ des agences intérimaires vis-à-vis des employés.
Lefaso.net : Quels sont les activités que vous menez de façon générale au sein de la ligue des consommateurs du Burkina ?
M. Somda : A la ligue des consommateurs, on mène des activités qui entrent de façon générale comme vous le dites bien dans le cadre de la protection des droits des consommateurs. Donc, c’est essentiellement des activités qui vont dans le sens de la sensibilisation des consommateurs sur leurs droits et devoirs. C’est ainsi que nous sommes amenés parfois à parler de la qualité des biens et des services pour démontrer au consommateur en quoi est-ce de par son exigence, qu’il peut amener les services publics ou privés à respecter ses droits.
La ligue est composée d’un bureau exécutif national dirigé par ma modeste personne. Nous sommes présents dans les 45 provinces du Burkina et à Ouagadougou nous avons la section du Kadiogo, à Bobo nous avons la section du Houet et à Banfora également. Nous avons aussi des sous sections dans certaines villes. Si bien que quand il se passe quelque chose au marché de Tenkodogo, c’est la section de Tenkodogo qui suit le dossier et qui nous rend compte.
Généralement, ils interviennent directement mais quand ça nécessite l’intervention du bureau exécutif national, nous n’hésitons pas de le faire aussi. Nous sommes bien implantés et il y a parfois des sous sections dans des établissements primaires et secondaires. En tout cas, notre ambition c’est d’être un peu partout de manière à ce que rien ne nous échappe sur le territoire national. Ce que nous faisons, c’est dans le sens des intérêts des consommateurs, de la population et il faut forcement le concours de cette population qui nous aide à savoir qu’il existe des produits de mauvaise qualité ; donc il faut que ses populations dénoncent quand ça ne va pas, il faut que ces populations nous aident à faire cesser certaines pratiques qui sont nuisibles à leur santé.
Quelle est la démarche que vous adoptez à la ligue lorsque vous constatez ou êtes informés d’une imperfection quelque part ?
En général, la procédure à la ligue c’est d’abord la voie diplomatique, la négociation pour faire savoir à l’auteur de cette imperfection ce qui ne va pas et qu’est-ce qu’il faut faire pour arrêter cela. Ce n’est que lorsqu’il refuse qu’on fait intervenir les médias. On passe l’information au niveau des médias pour que les consommateurs sachent qu’il existe un produit dangereux ou un service impropre à sa consommation et prendre ses dispositions. Il nous est arrivé également de traduire certaines personnes physiques devant les tribunaux quand c’est nécessaire. Donc pour me résumer, dans un premier temps c’est la négociation, la voie diplomatique. C’est uniquement lorsque ça ne marche pas que nous passons par la manière forte qui consiste à dénoncer publiquement et parfois à intenter un procès. Souvent nous sommes mal compris par les populations parce qu’en réalité notre rôle, ce n’est pas de nuire bien au contraire.
La ligue des consommateurs du Burkina a pour mission de veiller à la protection des consommateurs mais quand on se rend compte que les produits contrefaits tendent à devenir le quotidien des populations on se demande si la ligue est vraiment efficace sur le terrain ?
Vous savez que la perfection n’est pas de ce monde. La ligue fait ce qu’elle peut. Personne n’est permanent à la ligue. Nous sommes tous chacun à son boulot, et c’est pendant nos temps libres que nous menons les activités de la ligue si bien que si des gens constatent qu’en dépit de notre existence il y a encore pas mal de produits impropres à la consommation, c’est tout simplement dommage. C’est dû au fait qu’on devrait être beaucoup plus dynamique que ça, beaucoup plus efficace et cela nécessite peut-être qu’il y ait beaucoup plus de monde et que la ligue soit dotée de beaucoup plus de moyens. Pour l’instant, c’est le bénévolat et le bénévolat aussi a ses limites.
Au-delà de l’aspect purement alimentaire, vous militez également à ligue des consommateurs du Burkina pour le respect des droits des travailleurs. Et suite à plusieurs plaintes enregistrées, vous avez mené des enquêtes sur le contrat d’intérim, dont beaucoup de travailleurs se plaignent de l’application. Déjà qu’est-ce qu’un contrat d’intérim ?
D’abord, un contrat, comme le définit le code civil, c’est une convention par laquelle deux ou plusieurs personnes conviennent de faire ou de ne pas faire. Maintenant, il y a plusieurs types de contrat, je ne saurai vous les détailler. Mais, nous sommes en train de travailler sur les contrats d’intérim qui permettent à des agences de placement de prendre des gens et les placer dans des sociétés moyennant rémunération. Ces agences courtisent les grandes entreprises du pays et leur propose des contrats de partenariat en vertu desquels les agences d’intérim mettent à leur disposition des travailleurs qui effectuent des tâches sous leurs ordres mais qui ne relèvent pas de leurs effectifs. Ainsi, ces contrats d’intérim qui relevaient d’une situation exceptionnelle ont commencé à devenir la règle surtout concernant l’embauche des jeunes dans les grandes entreprises du pays. Ce genre de contrat est en train de se généraliser dans les secteurs des industries, des banques, de la télécommunication et même dans les mines.
Qu’est ce qui favorise la prolifération de ces contrats d’intérim ?
La prolifération des contrats d’intérim s’explique essentiellement par les raisons suivantes :
– les contraintes budgétaires : l’intérimaire ne relève pas des effectifs de la société où l’on le voit travailler. Cela permet à la société de mieux faire face à ces contraintes budgétaires car les sommes versées pour rémunérer les intérimaires ne vont pas apparaitre dans les charges du personnel ;
– la gestion des conflits individuels et collectifs : l’entreprise n’a plus à gérer directement les conflits sociaux (grèves et autres débrayages) car elle n’a pas de contrats avec les agents intérimaires mais avec l’Agence d’intérim ;
– la gestion administrative du personnel : l’entreprise n’a plus à s’occuper des questions de calcul et de reversement des cotisations à la CNSS et de prélèvement de l’IUTS.
Quels sont les avantages et les inconvénients liés à ce type de contrat ?
Est-ce qu’il y a des avantages liés à ce contrat ? On pourrait peut-être de façon superficielle dire que l’avantage de ce contrat c’est qu’il permet au citoyen d’avoir du travail. Ce type de contrat a plutôt des inconvénients. Et l’inconvénient de ces contrats d’intérim tels qu’ils sont appliqués dans notre pays, c’est que bien qu’ils permettent aux personnes d’avoir du boulot, ils ne leur donnent pas l’occasion de s’épanouir pleinement dans la mesure où ces contrats profitent plus aux agences de placement ou aux agences d’intérim beaucoup plus qu’aux travailleurs. Je m’explique. Suite à des plaintes qui ont été déposées par des gens de la ligue qui sont concernés, nous avons mené notre propre enquête et nous nous sommes rendu compte qu’en réalité ces agences sont un peu partout et tendent à se généraliser d’ailleurs dans le domaine minier, dans le domaine bancaire et même dans les brasseries.
Alors lorsque les différentes sociétés que je viens de citer tout à l’heure ont besoin du personnel, elles s’adressent aux agences d’intérim qui procèdent aux recrutements et leur fournit ce personnel. Mais ça se passe comment ? C’est l’agence qui signe un contrat avec la société et en vertu de ce contrat il fournit le personnel qualifié à la société si bien que quand vous regardez dans l’effectif des sociétés dans lesquelles travaillent les agents intérimaires, ils ne font pas partie de l’effectif. Ça fait que la société qui les emploie ne paie pas la CNSS (Caisse Nationale de Sécurité Sociale), elle ne paie pas la TPA également et ça fait que le travailleur lui-même ne paie pas l’IUTS, ne paie pas les 5,5% de la CNSS et donc n’a pas de retraite. Il ne cotise pas pour sa retraite.
Et l’avantage pour la société d’intérim, c’est que par exemple lorsque la société paie le travailleur, par exemple le journaliste à 600.000 FCFA par mois, la société d’intérim lui file seulement 200. 000 ou au maximum 300.000FCFA et tout le reste avec la fameuse société. Il se trouve que la petitesse des revenus est telle que ces gens qui travaillent en réalité vivotent. Donc c’est l’un des inconvénients de ce type de contrat. Le travailleur ne gagne pas suffisamment bien pour pouvoir s’en sortir. Ceux qui vont être directement recrutés par la banque peuvent gagner 600.000 FCA mais lui qui est passé par une agence d’intérim ne va gagner que 200.000FCFA.
De deux, il n’y a pas de plan de carrière puisque c’est un intérimaire. Troisièmement, le contrat étant à durée déterminée, il ne peut pas prendre un bon prêt bancaire pour faire des réalisations par exemple acheter une parcelle ou envisager de construire.
Il y a également absence de couverture sociale et médicale : dans la plupart des cas les agents sous intérim ne bénéficient pas d’une prise en charge médicale comme leurs collègues. Ils ne sont pas éligibles pour la plupart des avantages consentis aux autres agents (primes diverses, remboursement des frais médicaux, indemnités de transport et autres). En réalité ces personnes ne travaillent que de nom mais ne servent à rien. Est-ce qu’on va construire le Burkina avec des jeunes qui vivotent ?
Non, moi je pense que ce sont des gens aussi diplômés que nous et lorsqu’ils finissent, s’ils sont dans une situation d’intérim et connaissent le travail, il faut les intégrer et leur payer le salaire normal ! Mais on se rend compte que les CDD (Contrat à durée déterminée) sont renouvelés de façon indéfinie parce que ça arrange les sociétés d’intérim d’avoir des gens comme ça. Le gars est chaque fois sous pression, il bosse tout le temps, il fait attention mais son contrat ne dépassera pas un an. Après un an, il faut encore renouveler le contrat. Et c’est ça le côté néfaste.
Les inconvénients de ce contrat existent aussi pour l’Etat du Burkina pace que ces travailleurs qui devraient en principe payer l’impôt ne le font pas parce qu’ils n’en ont pas les moyens. Ils ne paient pas les IUTS, ils ne cotisent pas pour leur retraite parce qu’ils ne gagnent pas grand-chose. Et ça ce n’est pas intéressant.
Malgré ces inconvénients, le contrat d’intérim ne cesse de prospérer et on se demande à qui la faute ?
La faute c’est peut-être… à l’Etat. La faute est partagée. D’abord, quand nous, nous avons été alertés sur la question, rappelez-vous on n’a pas vu d’inconvénients. On s’est dit mais s’il y a des agences qui vous trouvent du boulot c’est bien. C’est quand on s’est rendu compte qu’ils sont payés au tiers par rapport à ce qu’ils devraient gagner, on s’est dit qu’il y a problème. Si vous regardez bien, l’article 52 du nouveau code du travail permet de renouveler les CDD de façon illimitée. Et cet article admet également la possibilité pour les travailleurs ou pour tout autre organisme de faire constater les abus des CDD par la juridiction compétente. Et dans le cas d’espèce, nous pensons qu’il y a abus. Et l’abus vient du fait que ce sont des contrats à durée indéterminée qui ne font que se renouveler de façon indéfinie.
En général ces contrats à durée déterminée sont donnés dans des situations particulières, soit quand une dame est enceinte et qu’on a besoin de la remplacer ou qu’une personne est partie pour une formation et qu’on a besoin de la remplacer ou encore qu’on a besoin de voir si l’employé en question peut faire le boulot. Mais, quand on renouvelle votre contrat à durée déterminée plus de trois fois, ça veut dire que vous savez faire le travail sinon on n’allait pas le renouveler. Mais on le renouvelle pourquoi ?
En ce moment, c’est de l’exploitation. Nous, la ligue des consommateurs avons demandé aux travailleurs qui sont concernés de signaler à partir du moment où il y a abus. Nous pensons que la première responsabilité leur revient du fait d’avoir accepté cette situation sous prétexte qu’ils ne veulent pas retourner au chômage. Donc, pour répondre à cette question, je dirais que premièrement la faute est d’abord aux travailleurs eux-mêmes qui n’ont pas compris qu’il faut saisir la juridiction compétente pour faire constater l’abus des CDD. Deuxièmement, il est du rôle régalien de l’Etat d’assurer la protection de ces personnes qui travaillent dans cette situation au Burkina Faso. L’Etat dira certainement qu’il n’est pas informé et il est du devoir de la ligue des consommateurs de faire en sorte que l’Etat se rende compte de l’abus des CDD. Et donc la faute revient à nous tous parce qu’on a laissé les gens faire en introduisant cet article 52 et voilà qu’il y a des gens qui en abusent.
Est-ce que cela n’est pas dû aussi à la méconnaissance des textes par les travailleurs ?
Je pense quand même que parmi tous ces travailleurs il y a des juristes. Non, moi je pense que les gens ont peur de perdre leur travail parce que lorsque nous étions en train de faire cette enquête, il n’a pas été facile de recueillir certaines informations au niveau des premiers concernés ! Ils ne voulaient pas qu’on sache que ce sont eux qui ont dit ci, qui ont dit ça. Donc, ce n’est pas une méconnaissance des textes dans la mesure où certains nous ont dit même que ça c’est de l’esclavage entre griffe parce que la personne vous oblige à travailler ? Je pense que ces agences, on peut les comparer à des négriers des temps modernes. C’est une espèce d’esclavage. Elles exploitent le fait que le chômage est légion actuellement. Les gens n’ont pas de boulot. Ils se disent que même si on leur propose 150 000 ou 200 000, ils ne vont pas refuser quand elles savent très bien que le boulot que ces gens abattent mérite un million peut-être. Donc, ce n’est pas une méconnaissance des textes. C’est un manque de courage de la part de ces travailleurs de faire respecter leur droit.
A l’issu de votre enquête quelle analyse faites-vous du constat qui se dégage sur le plan national quant à l’existence des agences d’intérim ?
Notre enquête a duré deux mois et ça a concerné toutes les 12 sociétés bancaires qui existent au Burkina Faso, les brasseries, et sociétés minières. La situation est alarmante parce que nous avons constaté au Burkina Faso que ces agences commencent à placer des gens partout. Avant, c’était quelques sociétés mais maintenant presque dans tous les établissements bancaires qui existent au Burkina, vous allez constater que les caissiers, la plupart gens qui sont au niveau de la réception, ce sont des intérimaires. Si vous allez dans les différentes brasseries du Burkina, vous allez constater que la plupart de ces gens-là sont des intérimaires et dans les sociétés minières également. Et là-bas nous avons constaté le cas de deux employés. Un gagne 1million 500 et l’autre c’est 350 000FCFA. Et ce dernier a été recruté par une agence intérimaire. Imaginez combien cette agence gagne sur lui.
C’est une pratique qui est dangereuse et qui tend à se généraliser. Si nous ne faisons rien maintenant, après cela va être difficile parce que c’est un business tellement rentable qu’il ne va pas être facile d’amener ces agences à cesser leurs pratiques. Peut-être pas cesser mais la rendre beaucoup plus humaine, la rendre beaucoup plus juste, ne pas retenir jusqu’à la moitié de ce qu’on reverse à la personne. Si elles estiment que c’est elles qui ont pu te trouver le boulot, peut-être prendre le tiers et te donner le reste mais pas faire le contraire. Et nous nous sommes rendus compte que ça risque de ne pas cesser rapidement parce qu’il y a des grands décideurs pour ne pas dire les plus grands décideurs généralement qui ont des actions dans ces sociétés. Soit l’agence appartient à sa nièce ou son ami ou même parfois à sa femme.
Si vous avez remarqué il y a bien longtemps qu’on a entendu qu’une société privée de la place recrute. C’est à cause de ces agences parce qu’il suffit de passer un coup de fil dire monsieur envoi moi tant de personnes pour la caisse avec tels profils, machin et le tour est joué. Nous pensons qu’il est dangereux et c’est beaucoup plus facile de faire cesser ces pratiques-là maintenant que d’attendre plus tard parce que c’est un business qui rapporte beaucoup d’argent et si vous vous amusez vous risquez de perdre la vie. C’est vraiment une mafia !
Et pour vous qui doit faire quoi afin de mettre un terme à cette pratique ‘’mafieuse’’ comme vous le dites ?
Il faut que les employés qui sont concernés saisissent les tribunaux pour faire constater les abus des CDD. L’article 52 du code du travail leur en donne la possibilité. Qu’ils partent voir le juge et lui expliquent comment les choses se passent pratiquement. Le juge va constater qu’il y a véritablement un abus et il va sanctionner. Si le juge commence à sanctionner une ou deux de ces sociétés de placement, vous allez voir que les autres vont replier parce que je suis convaincu du fait que ce n’est pas seulement au Burkina que ça existe. Ça doit exister ailleurs. Mais est-ce qu’ailleurs c’est aussi dramatique ? Est-ce que c’est aussi inhumain qu’au Burkina ? Je ne pense pas. Des travailleurs s’esquintent plus que ceux mêmes qui sont bien payés mais ils n’arrivent pas à vivre de ce qu’ils font comme travail. Les gens veulent qu’on améliore leur sort sans pourtant prendre des risques. C’est pour cette raison qu’ils se sont adressés à la ligue des consommateurs dont c’est entre autres le rôle d’aborder de telles questions.
C’est peut-être une pratique dangereuse mais sans nous ériger en avocat du diable, est-ce que vous ne pensez que la faire cesser pourrait entrainer une explosion du taux de chômage qui déjà constitue un épineux problème pour le gouvernement ?
Pas du tout ! Pas du tout ! Non ! Tant qu’il y aura des besoins de recrutement dans les entreprises, elles vont recruter. Avant, on n’avait pas ces agences mais on recrutait. On faisait une annonce dans un journal et les gens déposaient leurs dossiers. Mais, maintenant ces agences viennent prendre ces annonces en question et fournissent des gens. Elles vont certes trouver les personnes qualifiées mais ce qui se passe derrière est inadmissible. Si cette pratique cesse, le chômage ne va pas progresser parce que les entreprises continueront de recruter peut-être en ne passant pas par les intérimaires qui jouent les saprophytes sur les travailleurs. Bien au contraire, ça fera en sorte que ceux qui vont avoir du travail puissent en vivre décemment. Cette pratique n’existait pas au Burkina. Elle a été amenée d’ailleurs. Et la plupart des patrons de ces agences se sont des étrangers.
Et depuis que vous avez enregistrez des plaintes est-ce que vous avez pu sortir des personnes de cette situation ?
Nous pensons que si la presse nous accompagne et que l’opinion publique s’en rend compte, parce que les gens murmurent mais n’en parlent, les choses pourront changer. Ils se plaignent dans leur salon mais quand tout le monde va commencer à en parler, je pense que ceux qui vivent de cela seront un peu gênés quand même et ils vont donner un visage humain à la chose. Et nous souhaitons que nos autorités puissent y jeter un coup d’œil. Oui, on a allégé le code du travail mais ce n’est pas pour permettre d’instaurer l’esclavage. On l’a fait pour favoriser l’emploi. C’est de faire en sorte que les entreprises aient moins peur de recruter parce que le code du travail était tellement favorable aux travailleurs que si tu chasses un travailleur tu vas te ruiner.
C’est dans cette optique que ça été changé. On n’a pas fait pour que des gens profitent du chômage pour s’enrichir, recruter des gens diplômés et parfois plus diplômés qu’eux et les payer à des montants qui tendent vers moins l’infini. Le seul moyen que nous avons c’est de faire passer l’information et à partir de ce moment les gens sauront sur quel pied danser. Nous pensons pourvoir sortir ces employés des griffes de ces agences de placement en divulguant l’information. En faisant en sorte que tout le monde sache que ce phénomène, que cette pratiquante néfaste, dégradante, qui fait honte existe au Burkina Faso.
Et le conseil que je vais donner aux employés qui sont dans cette situation, c’est de poursuive leurs employeurs en justice. Qu’ils aient le courage de le faire. S’ils ont peur de perdre leur travail, qu’ils sachent que ce monde s’est construit parce qu’il y a des devanciers qui ont accepté se sacrifier pour leurs postérités. Nous souhaitons que ceux qui sont déjà concernés puissent porter plainte contre ces agences et lorsqu’une décision défavorable à ces agences va être rendue, elles réviseront leur position et nos petits frères et petites sœurs qui viendront ne pourront plus avoir les mêmes problèmes que nous. Qu’ils s’organisent, la ligue des consommateurs est prête à les accompagner.
Ensuite, je voudrais m’adresser à ceux qui ont créé ces agences. Nous n’avons rien contre eux. Nous sommes tout simplement contre la pratique, une pratique qui tend beaucoup plus à de l’exploitation. C’est injuste mais je suis convaincu que parmi les agences, il y a des gens de bonne foi, de bonne volonté qui vont peut-être nous entendre et qui vont contribuer à faire en sorte que cette pratique soit un peu plus humaine.
Propos recueillis par Maxime Jean-Eudes Bambara
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