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Processus de réconciliation au Burkina : L’administrateur civil, Sibiri Sawadogo, pose le débat !

Publié le mardi 4 juillet 2017 à 00h44min

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Processus de réconciliation au Burkina : L’administrateur civil, Sibiri Sawadogo, pose le débat !

« Le processus de la réconciliation nationale post-insurrection au Burkina Faso : enjeux, défis et perspectives ». C’est le thème qui a servi de prétexte à Sibiri Sawadogo pour sa soutenance de fin de cycle, option Administrateur civil, à l’Ecole nationale d’Administration et de la Magistrature (ENAM). Pour cette ultime phase dans cette école d’élite, la charge lui est revenue d’ouvrir les soutenances 2017. Pour accéder à la « short-List » d’Administrateur civil, l’étudiant était face à un jury composé de Dr Sangaré Salifou, Conseiller du ministre de la Fonction publique, par ailleurs directeur de mémoire ; Dr Thomas Ouédraogo, directeur exécutif du Centre pour la gouvernance démocratique (CGD), président du jury et Jérôme Compaoré, membre du Haut Conseil pour la Réconciliation et l’Unité Nationale (HCRUN).

« Notre conviction est que la réconciliation tout comme le conflit sont des phénomènes inhérentes à la vie en société. Ainsi, en nous intéressant à la question de la réconciliation nationale, nous voudrions questionner un fait social important de la nation tel que le processus de la réconciliation nationale post-insurrection », a observé Sibiri Sawadogo en guise de propos introductifs. Pour mieux cerner la problématique de son thème, l’impétrant a d’abord eu des entretiens avec des personnes-ressources dont le premier président de la Coalition pour la démocratie et la réconciliation nationale (CODER), le président du Mouvement burkinabè des droits de l’Homme et des Peuples (MBDHP), le procureur général de la Cour des comptes, le directeur exécutif du CGD, le directeur chargé des conflits du Ministère de l’Administration territoriale et de la décentralisation et le Secrétaire général de la Commission « Justice et paix ».

Il s’est ensuite appuyé sur la recherche documentaire (exploitation d’ouvrages généraux et spécifiques, de mémoires, d’articles de presse et autres sources, notamment l’Internet) et l’enquête de terrain. Dans cet élan, il s’est entretenu avec dix-sept membres sur 53 que composent la Commission de la réconciliation nationale et des réformes et le Haut Conseil pour la Réconciliation et l’Unité Nationale (dont les présidents, les vice-présidents, les membres de la sous-commission « Vérité, Justice et Réconciliation nationale » de la Commission de la réconciliation nationale et des réformes).

La première partie du travail situe les fondements du processus de la réconciliation nationale et à travers le chapitre I, Sibiri Sawadogo a rappelé le contexte de l’avènement du processus de la réconciliation nationale post-insurrection, marqué par la mauvaise gouvernance et la récurrence des conflits sociopolitiques. « En effet, les crimes économiques et de sang ont meurtri tant de Burkinabè et entretiennent encore aujourd’hui un climat caractérisé par des rancœurs et parfois, la haine. Aussi, la crise socio-politique de 2011 et celle qui a abouti à l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 ont effectivement ébranlé le vouloir-vivre-ensemble des Burkinabè, si bien qu’il est nécessaire de recourir à une réconciliation nationale. A ces crises, on associe les contentieux administratifs et les effets des privatisations qui ont fragilisé la sécurité sociale. Par ailleurs, les crises politiques au cours de la transition ont conforté la demande de réconciliation nationale. La révision du Code électoral en avril 2015 ainsi que l’invalidation de certaines candidatures ont exacerbé le climat social déjà délétère. De même, les atrocités du coup d’Etat du 16 septembre 2015 ont meurtri profondément le peuple burkinabè », a-t-il expliqué.

De la CRNR au HCRUN, le Burkina dispose-t-il de leviers ?

Dans le chapitre II de cette partie, Sibiri Sawadogo s’est intéressé à la Commission de la réconciliation nationale et des réformes (CRNR), créée par l’article 17 de la Charte de la Transition et dont les membres ont été installés en mars 2015 et six mois plus tard, ils ont remis leur rapport, baptisé « les voies du renouveau ». A en croire M. Sawadogo, ce rapport a tracé les chemins pour une véritable réconciliation nationale, précisant que la Commission a fait de fortes recommandations, notamment l’adhésion à une Charte de la réconciliation nationale, la création du HCRUN pour parachever la mission de réconcilier les Burkinabè.

La seconde partie du mémoire fait une analyse du processus de la réconciliation nationale post-insurrection. « La réconciliation nationale en cours dans notre pays se distingue des processus antérieurs tels ceux entamés par le Forum de réconciliation nationale en 1991 et le Collège des sages en 1999. En effet, le présent processus s’est ouvert dans un contexte marqué par l’absence de l’ancien président Blaise Compaoré, accusé à tort ou à raison d’être à l’origine de nombreux crimes économiques et de sang », a-t-il soulevé. En se fondant donc sur cette perspective, il a, dans un premier chapitre, sondé l’originalité du processus de la réconciliation post-insurrection au Burkina. Ainsi, il ressort que les structures post-insurrection ont de nombreuses forces qui peuvent faciliter la réconciliation nationale. Toutefois, ces structures ont des handicaps à même de compromettre le processus en cours dont les enjeux sont pourtant immenses et délicats.

De ses observations, la réconciliation nationale doit, du point de vue politique, aboutir à une plus grande légitimation du nouveau pouvoir et à la restauration de l’autorité de l’Etat. Au plan socio-économique, elle devrait resserrer les liens qui unissent les Burkinabè et permettre la relance du développement économique. Par le chapitre II de cette seconde partie, Sibiri Sawadogo a focalisé le travail sur les défis et les perspectives du processus. Ici, et au titre des défis, il estime que l’encrage institutionnel est indispensable à la consolidation et à l’aboutissement du processus de la réconciliation nationale. En effet, la survie du HCRUN et du Secrétariat technique chargé du suivi de la mise en œuvre des réformes et de la réconciliation sont nécessaires pour la poursuite du processus, convainc M. Sawadogo, ajoutant qu’il est urgent d’obtenir l’adhésion des Burkinabè à la réconciliation nationale.

Associer constamment l’élan de pardon et de tolérance !

En termes de perspectives, l’administrateur civil a mis en évidence la vision de la réconciliation nationale post-insurrection fondée d’une part, sur le tryptique Vérité-Justice-Réconciliation et d’autre part, sur la justice transitionnelle. En revanche, il a suggéré un assouplissement de ce triptyque pour y associer constamment l’élan de pardon et de tolérance.

Pour Sibiri Sawadogo, le processus de la réconciliation nationale en cours s’avère opportun pour l’apaisement des cœurs et l’unité des Burkinabè autour des grandes questions de développement.

Le HCRUN dispose d’atouts pour faciliter la réconciliation des Burkinabè. Toutefois, il ressort de l’analyse que l’action de cette institution est entachée par l’absence d’une vision claire des responsables de la structure. Par ailleurs, le non fonctionnement du Secrétariat technique chargé du suivi de la mise en œuvre des réformes et de la réconciliation handicape énormément la poursuite du processus.

C’est pourquoi suggère-t-il d’assurer une appropriation sociale et politique des recommandations de la Commission de la réconciliation nationale et des réformes ; réorganiser le HCRUN en lui associant un comité de médiation capable d’exercer une forte influence sociale et politique en faveur de la réconciliation nationale. Dans le même esprit, M. Sawadogo prône de rendre effectif le fonctionnement du secrétariat technique pour veiller à la mise en œuvre effective des réformes. Pour ce faire, le secrétariat technique pourrait être rattaché directement au HCRUN en lieu et place du Premier ministère. Enfin, il note la nécessité de réconcilier enfin les membres de la structure.

Après avoir fait des observations de forme et de fond sur le mémoire, les membres du jury ont salué le candidat pour l’actualité et la pertinence de son sujet. Ils ont également fait des suggestions en vue de finaliser le document. Après un moment de concertation entre ses membres, le jury a décerné la note de 16 sur 20, avec la mention « Très bien » au désormais Administrateur civil. Ce qui lui a valu de chaleureuses congratulations des parents, amis, collègues et connaissances qui ont effectué nombreux le déplacement pour non seulement être témoins de cet acte majeur dans la vie de ce cadre de l’administration burkinabè, mais également pour lui apporter leur soutien. Bon vent donc à celui-là même qui fut entre autres, de 2010 à 2014, Préfet du département de Namissiguima dans la province du Yatenga (région du nord).

O.L.O
Lefaso.net

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