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FOOTBALL BURKINABE ! De qui se moque-t-on ?

Publié le mercredi 8 février 2012 à 01h41min

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La débâcle des Etalons à la CAN 2012 laisse la place désormais au bilan de cette campagne. J. M. Dabiré y va de son diagnostic.
J’ai attendu que le thermomètre baisse un peu après la débâcle des Etalons à la XXVIIIe CAN pour tracer ces lignes. Lors de la campagne précédente en 2010, j’avais adressé un écrit très critique sur le football burkinabè en général aux éditions Le Pays par mail, mais celui-ci n’a pas été publié. Dans cet écrit, j’attirais l’attention sur le fait que les galopées foudroyantes des Etalons en phase, éliminatoires de la CAN n’étaient que de la poudre aux yeux.

De plus, j’affirmais que pour que le Burkina devienne une nation de football comme semble le croire certaines autorités, il fallait faire des progrès du point de vue du niveau social de la population. Je faisais un parallèle avec la situation des nations avérées de football dans le monde. Mais mon propos aujourd’hui n’est pas de revenir sur cet écrit qui n’a pas été publié. Je conçois que cela puisse arriver vu le nombre d’écrits que reçoit certainement la rédaction du journal Le Pays. Il s’agit pour moi, encore une fois, de vider ce que je ressens, même si encore une fois, je ne suis pas sûr que l’écrit paraisse. Je ne suis pas un acteur direct ou indirect de la planète foot du Faso, encore moins un analyste chevronné du sport, ou même un supporter zélé.

Mais bien avant que les Etalons ne s’envolent pour Malabo pour affronter les phases finales de la CAN, j’avais la conviction que le Onze national reviendrait bredouille encore une fois. Pis, j’étais sûr que nous allions perdre nos trois (3) matchs de poule. C’est le score des confrontations que je ne pouvais pas prédire. Restez tranquilles ; il ne s’agit pas ici d’un don divinatoire ou encore d’une lubie liée à une quelconque prémonition. Il s’agissait seulement d’un constat froidement réalisé par un observateur lointain de l’environnement footballistique. Cela me donnait l’avantage de chahuter quelques amis intimes en leur disant avant le match du Burkina que nous allions perdre. Aujourd’hui, quand je vois la levée de boucliers d’analystes sportifs de tout acabit qui affirment, sans sourciller, à l’écran des différentes chaînes de télévision que les Etalons avaient leurs chances dans la compétition, avant de se lancer dans des critiques acerbes en passant à la loupe leurs prestations , je ne peux m’empêcher d’avoir un sourire triste.

Quelle hypocrisie ou encore quel étalage d’inconséquence de la part de ces messieurs qui nous donnent l’impression d’aimer le football burkinabè, et même d’aimer le Burkina tout court ? En effet, messieurs, d’où vous viennent subitement ses analyses structurées, réalistes de la production de nos Etalons ? Est-ce un don du ciel, ou encore une inspiration divine ? En réalité, pour que vous puissiez être aussi prolixes sur le sujet, il a fallu puiser à une source ou partir d’une réalité qui existait déjà et dont vous aviez conscience, seulement il vous manquait le courage pour vous affirmer et l’affirmer : le Burkina ne passera pas le premier tour de cette CAN parce que… En réalité, une bonne analyse ne se fait pas seulement a postériori, mais elle doit également et surtout pouvoir anticiper sur le futur. Par manque de courage et de réalisme, vous vous êtes confondus à l’hystérie collective, devenant du même coup, monsieur tout le monde, au même titre que Goama qui ne connaît pas le nom du sélectionneur national et se dit supporte N°1 drapé des couleurs nationales.

Mon entrée en matière est de dire à ces messieurs de la presse, analystes sportifs occasionnels, qu’ils sont des hypocrites car la vérité était là juste sous le vernis et ils n’ont pas eu le courage d’assumer cette vérité qui choque. Vous avez préférer attendre que les choses se passent pour être plus libres d’avoir le crachoir. C’est nettement plus simple de voir les failles quand les choses sont faites. Mais je vous comprends, et je ne vous en veux pas car il n’est pas donné à n’importe qui de s’assumer face à la vérité. Car ici au Faso, lorsque vous êtes très critique, vous êtes en retour critiqué et taxé de tous les noms d’oiseaux : apatride, non- patriote, négativiste, etc. Mais sachez que votre attitude à vouer les Etalons aux gémonies a fait qu’aujourd’hui le supporter lambda leur impute la débâcle, des invectives sans rien comprendre dans le fond (il est vrai que la défaite reste toujours orpheline).

Ce qui s’est passé est vu, sous l’angle d’un novice observateur, comme un cumul de manquements à tous les niveaux qui a causé ce naufrage collectif. Je m’attarderai sur trois (3) points que je trouve importants, même si, vus sous un autre angle, ils peuvent ne pas paraître des facteurs majeurs pour certains. Primo, le fait que l’on veuille sculpter notre football en l’associant forcément à l’image de Blaise Compaoré, président du Faso, qui, soit dit en passant, selon l’imagerie populaire, relayée par certaines autorités, est un passionné de football. Résultat, là où un encadrement sérieux et l’application de programmes politiques efficients ont fait défaut, l’on veut faire croire que l’argent et l’image du président du Faso accompliront des miracles. Suivez ma plume, on décaisse des milliards à tout vent pour le sacre des Etalons ; pour cette CAN trois (3) Guiros (nouvelle devise que l’impunité et la corruption nous ont léguée, 1 Guiro=1 Milliard de F CFA) ont été mobilisés dans un contexte où la famine frappe à la porte des provinces.

Le raisonnement est banal, il faut injecter de l’argent dans le football coûte que coûte, car le président du Faso aime ce sport. Ainsi, si les Etalons font une bonne campagne, il sera content. Combien sont –ils ces Etalons sportifs d’autres disciplines dont les exploits sont restés dans l’anonymat, soit parce que la préparation d’avant compétition s’est faite avec des moyens de bord, soit qu’une fois l’exploit réalisé au nom de la nation, ils n’ont que pour seule récompense la satisfaction du devoir accompli et d’avoir honoré la nation ? Pas de poignée chaleureuse du chef de l’Etat, encore moins une simple lettre d’encouragements et de félicitations ou même de décoration. Ici au Faso, le mérite des dignes fils est jugé et géré à double vitesse ! Secundo, il y a une pratique que je trouve indigne d’un pays démocratique dont le socle devrait reposer sur des institutions républicaines, ciment de l’unité et de la cohésion nationales, quand des gens mal inspirés veulent se faire de la publicité à des fins politiques. Il s’agit de cette coutume non écrite qui tend à devenir source de droit depuis quelques CAN déjà, celle de faire transiter le Onze national chez le Moogho Naaba pour des bénédictions avant d’aller chez le président du Faso.

Ceux qui se prêtent à ce jeu malsain ont-ils oublié que les Etalons sont une marque d’envergure nationale et qu’il est indécent de trimballer les joueurs devant ce dernier qui n’est, en fait, représentatif qu’ a l’ échelon du milieu dont il est issu et qui reconnaît ces attributs de monarque ? Que diraient alors nos parents de l’Est, les Gourmantché, face à une telle démarche et comment la ressentiraient-ils, eux aussi issus d’une communauté à pouvoir centralisé ? Je m’abstiens de parler du regard et de l’analyse des autres ethnies (en rappel le Faso en compte une soixantaine).Tout cela, s’il vous plaît retransmis au journal télévisé par la chaîne nationale. Seul le président du Faso constitue une institution de la République et non le Moogho Naaba. Que feraient les initiateurs de ce théâtre si un autre chef réclamait la visite des Etalons pour, lui aussi, leur imposer sa bénédiction royale ? Quelle impasse ce serait alors ? Vraiment n’importe quoi ! Travaillons plutôt à créer une osmose mentale nationale autour de notre équipe et laissons ce qui nous dessert.

Enfin, l’une des plaies de notre football réside dans l’organisation de ces tournois aux relents purement politiques, avec l’onction du ministère des Sports et des loisirs, initiés par des politiciens en perte de vitesse ou désireux de se construire une réputation. Je loge l’USSU-BF à la même enseigne car tous les promoteurs de ces fanfaronnades affirment que leur action contribue à la promotion du football burkinabè. Mon œil oui ! C’est plutôt leurs intérêts égoïstes de politiciens qui cherchent un terrain fertile pour assouvir leurs ambitions au détriment de la situation de désœuvrement de la jeunesse qu’ils exploitent de manière éhontée. Sinon que l’on me montre un seul jeune qui a été promu dans l’élite sportive par ce canal : coupe d’un tel ou encore USSU-BF. Il n’y en a pas parce que tout simplement aucun mécanisme de repérage de talents, d’accompagnement et de promotion au sein de l’élite du football n’est associé à ces manifestations hétéroclites.

C’est purement et simplement l’appétit politique des promoteurs qui est assouvi, on se balance du devenir du talent des jeunes qui s’expriment. Pis, certaines perles rares se sont éteintes dans cette cacophonie orchestrée, faute d’encadrement, de coup de pouce et parfois même suite à des blessures graves que leurs parents ou eux-mêmes ont été obligés de prendre en charge. En fait, n’importe qui se présente, trouve une matière quelconque en guise de trophée, y placarde son nom et, à la fin, donne des primes ridicules (parfois de 10 000 F CFA au vainqueur) et vive le foot ! Tout cela retransmis au journal du sport de la chaîne télé qui nous aime tant, la TNB. Quelle médiocrité ? Je m’arrête là comme convenu, car dans mes envolées et mes émotions propres, je pourrais me retrouver sur un chemin que je ne devrais pas emprunter. Alors messieurs les analystes sportifs, sachez que « qui aime bien châtie bien », dit le dicton. Ayez le courage de vos convictions, car nul n’est prophète chez soi.

Si vous faites preuve de courage et de responsabilité, au début vous essuierez les quolibets, les incompréhensions des gens, mais votre analyse froide et objective finira par vous donner raison envers et contre tous et les gens plieront les genoux devant tant de compétence et de perspicacité. Vive le sport en général ! Vivement que l’on pense à investir sérieusement dans les autres sports.

Sâayè J. M. DABIRE Citoyen du pays réel

Le Pays

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