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CAN 2012 : Et si c’était le niveau réel de notre football ?

Publié le mercredi 25 janvier 2012 à 23h59min

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Dimanche 22 janvier 2012 vers 18 heures, alors que nous supputions au « grain » sur les chances des Etalons, une personne de nos amis lâcha que pour ce qui la concernait, elle n’allait pas suivre leur match contre les « palancas negras ». Car, disait-elle, pour regarder évoluer notre onze national, il faut avoir un cœur de secours dans la mesure où le premier, immanquablement, va lâcher. « Non, rétorqua un autre, même trois cœurs ne serviraient à rien. Un bon supporter de l’équipe nationale, c’est comme le mari de plusieurs épouses : il n’a tout simplement plus de cœur ». On en a ri, sans nous imaginer que trois heures plus tard on en pleurerait.

Pour leur première sortie, les poulains de l’entraîneur Paulo Duarte on en effet trébuché (1-2) face à des Angolais qui n’avaient rien d’extraordinaire mais qui furent admirables de réalisme. Nous partions pourtant avec la faveur des pronostics. Dans ce groupe B de Malabo composé, outre du Burkina, de la Côte d’Ivoire, de l’Angola et du Soudan, beaucoup d’observateurs de la scène footballistique africaine, sous réserve de la vérité du terrain, voyaient, il est vrai, les deux premiers cités franchir le cap des matches de poule.

Ce n’est pas encore perdu pour nous, mais en chutant dès l’obstacle initial le capitaine Moumouni Dagano et ses camarades ne facilitent pas, et c’est une litote, leur tâche.
Il faut croire que notre réputation était surfaite. Les choses avaient pourtant bien commencé ce soir et, pour l’essentiel, les nôtres, sans être exceptionnels, ont dominé la majeure partie du temps. La faute à « pas de chance » ? Ce serait bien trop commode.

A un déficit d’engagement ? Aux limites intrinsèques de certains joueurs ? Au système de jeu mis en place par le technicien portugais qui, selon certains spécialistes, auraient dégarni le milieu, privant de ce fait les attaquants des indispensables porteurs d’eau ? Peut-être y a-t-il un peu de tout cela à la fois.

On savait déjà que nos vis-à-vis pratiquaient un football athlétique, qu’ils savaient manier la boule de cuir mais que nos canassons n’étaient pas des pur-sang ; il n’empêche, on pouvait attendre d’eux qu’ils fussent combatifs et agressifs pour compenser le défaut de talent. Las ! Momo transparent la plupart des 90 minutes, Aristide Bancé égal à lui-même, c’est-à-dire quelconque et courant dans tous les sens, Charles Kaboré désordonné dans son habituel style rudimentaire, il ne restait guère, ainsi que nous l’avons relevé dans notre livraison d’hier, que le génie de Jonathan Pitroipa, constant dans l’effort, et la patte magique de Sibiri Alain Traoré (auteur du but égalisateur). Ce dimanche soir, ces atouts n’ont pas été suffisants pour éviter au public sportif burkinabè une nouvelle déception.

Et comme si cela ne suffisait pas, il a fallu en plus que Djakaridja Koné fasse une offrande sur le deuxième but angolais (celui de Manuchao) et que Bakary Koné perde son calme en rudoyant un adversaire, ce qui aurait pu lui valoir un carton rouge direct si les juges avaient vu le vilain geste. Non, on a vraiment été à côté de la plaque. Cette défaite est de celles qui scient le moral d’une nation et en ce moment nos compatriotes, déjà meurtris par l’affaire Guiro (1) doivent l’avoir dans les chaussettes.

Certains ne sont du reste, pas loin de penser qu’en parlant avant le début de la compétition de problèmes organisationnels (imputables aux pays hôtes ou aux responsables sportifs burkinabè ?) le coach préparait les esprits à une bérézina annoncée.

En n’arrachant même pas le petit point du match nul, les protégés de Duarte, disions-nous, compliquent dangereusement leur situation puisqu’en scorant deux fois, l’Angola, avec qui ils étaient censés disputer le second ticket du groupe, est propulsée à la première place et, pour sa deuxième sortie, elle doit jouer le Soudan qui a toutefois montré de belles choses face aux Eléphants, ne s’inclinant que par un petit but à zéro.

Pendant ce temps, dans ce derby ouest-africain de jeudi qui s’annonce décisif, les Burkinabè jouent déjà un match au couteau face à la bande à Drogba. Car s’ils devaient à nouveau s’incliner, ce qui n’est pas une simple vue de l’esprit au regard du niveau de leur jeu, ils rentreraient prématurément (?) au bercail. Nos deniers publics n’en seraient d’ailleurs que plus soulagés.

Certes, ce n’est pas encore totalement compromis mais comme c’est souvent le cas avec nos athlètes, on reprend la calculette pour un improbable calcul de probabilités, en espérant gagner contre X et Y par telles marges et que, dans le même temps, Z soit laminé. C’est ce qui arrive quand on n’a plus tout à fait son sort entre les mains. C’est à se demander si, finalement, nous autres, Burkinabè, là où ce doit être une longue et patiente construction, nous ne nous emballons pas trop vite à la moindre victoire, convaincus que nous sommes, parce que nous sommes réguliers à la CAN, devenus une grande nation de football et que nous jouons désormais dans la cour des grands.

Or ce doit être le niveau réel de notre football qu’on a vu l’autre jour et il est peut-être enfin temps de se rendre à l’évidence et de revenir sur terre n

(1) Du nom d’Ousmane Guiro, ex-DG des Douanes débarqué et poursuivi en justice après la découverte dans des cantines de quelque 2 milliards de francs CFA et d’objets précieux qui lui appartiendraient.

Ousséni Ilboudo

L’Observateur Paalga

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