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Mariage traditionnel au Tchad : Des coups de fouet comme cadeaux de mariage

Publié le jeudi 26 juillet 2007 à 07h46min

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La semaine qui suit leur mariage, les jeunes mariées de l’Est du Tchad sont quotidiennement fouettées par les proches de leur mari. Certaines en meurent. Une tradition d’une extrême violence comme tout ce qu’endurent les femmes de cette région. Reportage.

Quand Myriam, une jeune journaliste d’Abéché, ville à l’Est du Tchad, m’invite au mariage de son frère, elle me prévient : "II n’est pas très éduqué. Il respecte la tradition." Des journalistes de la radio où elle travaille tentent aussi de me dissuader de me rendre à la cérémonie. "II y a beaucoup de gens en armes en ce moment à Abéché et sortir le soir est dangereux", insistent-ils.

"La semaine passée, une dizaine d’hommes en uniforme ont fait irruption dans une cérémonie de mariage et ont pris les invités en joue. Ils voulaient enlever les femmes pour les violer, mais d’autres militaires sont arrivés et les intrus se sont enfuis en sautant par-dessus la clôture. Une personne est morte", précise l’un d’eux, présent à la cérémonie. Je décide donc d’arriver tôt au mariage du frère de Myriam et d’en repartir avant la tombée de la nuit.

La cérémonie a lieu dans un quartier populaire d’Abéché où toutes les maisons et les boutiques sont en torchis. À quatre heures de l’après-midi, une soixantaine de femmes sont déjà là, voilées, assises sur des nattes, à ras du sol, sous une toile de tente colorée. De l’autre côté de l’enclos qui sert de salle de fête, les hommes arrivent par petits groupes. Pour eux, des sièges en plastique ont été installés en demi-cercle face aux femmes, sous des bâches. Une façon de montrer sans ambiguïté l’infériorité de celles-ci.

Mariées de force à 13 ans

Deux larges fauteuils, placés sur une estrade, attendent les mariés. Le jeune mari arrive une heure plus tard, porté par ses amis qui le déposent sur l’un des sièges. Il brandit un long fouet en peau d’hippopotame. Ces fouets sont interdits au Tchad, non seulement parce que les hippopotames deviennent rares, mais parce que leurs lanières rugueuses blessent cruellement les chairs. La jeune mariée arrive ensuite, discrète, et s’assied à côté de son mari qui tient toujours son fouet. Les invités commencent à danser. D’abord les femmes, puis les hommes. Les uns et les autres s’observent sans se parler. À la porte de l’enclos, deux policiers montent la garde. Ils ont des bâtons dont ils se servent pour repousser brutalement les enfants et les adolescents qui tentent de se joindre à la cérémonie sans invitation.

En quittant les lieux, je demande à Hassan, un journaliste d’Abéché qui m’accompagne, combien de coups de fouet recevra la mariée. "Elle sera fouettée toute la semaine", me répond-il avec sérieux. Intrigué et choqué, je décide d’en savoir p !us. Je me rends ensuite à Goz Beida, 400 km plus au Sud, un grand village, aux chemins de terre. Comme partout dans l’Est du Tchad, les femmes y vivent dans la terreur que leur inspirent les hommes dès leur plus jeune âge. Toutes ont été excisées, sans anesthésie, entre six et huit ans. Nombre d’entre elles ont été mariées de force dès l’âge de 13 ans, l’âge minimum requis par la loi.

Bien souvent, elles épousent des hommes de plus de 40 ans, qui ont déjà une ou deux épouses. Tout comme au Darfour voisin.
C’est le cas d’Housna que me présente Azene, un ami qui travaille dans l’humanitaire. Cette jeune réfugiée soudanaise de 20 ans avait commencé ses études universitaires au Darfour avant d’être vendue à 18 ans par son père à un forgeron de 55 ans, qui en a fait sa troisième femme. Elle a déjà deux enfants qu’elle porte sur son dos tout en travaillant dans une ONG internationale

"Moi, je préfère frapper fort".

Je demande à Azene s’il est au courant de cette pratique qui consiste à fouetter les jeunes mariées "Moi aussi, j’ai fait cela. Tous les Arabes font cela, ainsi que des tribus non arabes, me répond-il. La nuit de noces, on conduit la femme dans la maison du mari. Le plus souvent, elle refuse de s’y rendre. Si elle n’agit pas ainsi, les vieilles femmes se moqueront d’elle. Donc, on l’amène par la force Si la femme refuse d’aller chez son mari, son père, ses frères, ses oncles, ses cousins la fouettent.
On la tape, on la ligote, on lui fait n’importe quoi. Son mari l’attend. Parfois, elle meurt en route des suites de ses blessures ou de déshydratation, attachée sur le dos d’un chameau."

Après la cérémonie de mariage, poursuit Azene, on conduit l’épouse dans une pièce où se trouvent des amies. Elle doit rester voilée et n’a pas le droit de sortir pendant une semaine. C’est le moment du fouet. Tous les hommes, le plus souvent des proches du marié, sont alors autorisés à entrer dans la chambre et à lui donner deux, trois coups de fouet Parfois violemment, parfois doucement. "Moi, je préfère frapper fort, pour ne pas paraître une mauviette", conclut Azene.

De retour à Abéché, je constate que les femmes, comme à Goz Beida, ont généralement l’air épuisé et abattu, un peu comme les ânes qui les transportent. La violence exercée par les hommes sur les femmes et les enfants est ici systématique. Le jour de mon départ, je demande à mon chauffeur. "Avez-vous un fouet chez vous ?"."Out", répond-il. "L’utilisez-vous pour frapper votre femme ?" "Quand elle proteste, je la fouette. C’est normal ".

Claude Adrien de Mun
(Syfia International)

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 30 juillet 2007 à 14:46 En réponse à : > Mariage traditionnel au Tchad : Des coups de fouet comme cadeaux de mariage

    cet article m’a scandalisée je connais un peu le tchad y ayant vecu 2 ans et y ayant de la famille et des amies notamment, je me demande où cet homme (je n’ose le qualifier de journaliste !) a pu aller pour ecrire des choses pareilles ; "les maisons en torchis" pour les gens cultives cela s’appelle l’architecture afro soudanaise et ce sont des maisons fabriquees en briques de terre, en argile mele à de la paille, de forme geometrique, avec souvent des decorations et des portes decorees ou sculptees en bois ou en fer ; c’est une tres belle construction traditionnelle, climatisee naturellement ; et quel mepris pour les femmes et les tchadiens en general ; les femmes au tchad n’ont rien des victimes presentees la ; elles peuvent divorcer tres facilement et se marier plusieurs fois ; chez les musulmans, ce sont les peres qui ont la charge des enfants et les meres jouent le role des peres en france : amour, cadeaux, ecoute etc...sans avoir la charge materielle des enfants ; elles peuvent donc mener leur vie et ne sont pas tenues de vivre dans leur famille ; c’est vrai que dans les campagnes isolees certaines jeunes filles sont encore mariees de force et que l’argent joue un role dans les choix des femmes et des familles pour le mariage ; mais cela existe ailleurs en asie comme en afrique, au moyen orient ou en oceanie ; au tchad il y a pas mal d’associations de villageois et de citoyens dans les vuilles : comites de sante, asso de parents d’eleves, asso pour la lecture publique, l’environnement, l’education, centres sociaux en direction des femmes et des activites remuneratrices, asso en direction des enfants des rues a n’djamena, etc... c’est bizarre de ne jamais donner la parole a ceux qui bougent et construisent mais toujours a des etrangers plein de fric et de morgue ou aux representants de l’etat ou aux gens presentes comme victimes ; special dedicace pour les africaines ; cet article est un scandale et represente bien l’ignorance vis a vis de peuples avec leurs cultures et leurs traditions et en ignorant toujours leurs luttes ; helene marx

  • Le 31 juillet 2007 à 10:48, par SALIOU OUATTARA En réponse à : > Mariage traditionnel au Tchad : Des coups de fouet comme cadeaux de mariage

    Je crois que l’auteur de cet article a vraiment exagéré. Je vis au Tchad plus précisement à Abéché mais ce qu’il raconte ne me semble pas la réalité.Lorsque j’ai lu l’article je me suis empressé d’échanger là dessus avec des amis tchadiens et ils étaient tout simplement sacndalisés. S’i est vraiment un "journaliste" c’est qu’il manque énormément de professionalisme.Et son regard méprisant envers ces femmes qu’il compare aux ânes est intolérable. Il y a des gens qui au nom de la liberté de presse écrivent n’importe quoi et cela est finalement dangereux pour la liberté de presse. Comment SYFIA a t-il pu publier un tel article ?

  • Le 1er août 2007 à 16:32 En réponse à : > Mariage traditionnel au Tchad : Des coups de fouet comme cadeaux de mariage

    Par ACHECK KOKO Aziza
    Je suis de nationalité Tchadienne, native de la région à l’Est du Tchad, précisément de Goz-Beïda et je vis actuellement à Abéché.
    Je ne peux m’empêcher d’exprimer mon opinion en lisant cet article. Non, des pratiques pareilles n’existent pas chez nous.
    Comment peut-on parler des traditions d’un peuple qu’on ignore ? Un bref séjour ou une simple mission ne suffit pas pour connaître la vie d’un peuple, son histoire, ses traditions. Il faut vivre avec ces gens pour mieux les connaître, discuter et écouter les sages, les personnes ressources. Et de tels indices pourraient au moins témoigner, fonder des informations. C’est une insulte à toute une nation qui mérite d’être respectée comme les autres. Ce n’est pas sérieux. Jamais, pour ma part, je n’aurais l’idée de demander à un boulanger de réparer une voiture !
    Non seulement l’information est erronée mais les faits sont relatés dans la confusion totale. Tantôt c’est dans un quartier populaire d’Abéché, tantôt c’est à Goz-Beïda et dans le camp des réfugiés d’où la rencontre avec la jeune réfugiée soudanaise. Une chose serait nécessaire à retenir : il y a plusieurs ethnies, de différentes langues dans cette région à l’Est du Tchad. La diversité ethnique fait que les traditions ont quelques nuances. Ni chez les arabes, ni chez les ouaddaïens, ni chez les dadjos, ni ... Ces pratiques ne se font nulle part.
    Et les femmes, quel sentiment de mépris ? Et pourtant elles se défendent bien. D’ailleurs on remarque une proportion importante des femmes qui travaillent, que ce soit à Abéché, à Goz-Beïda, à Biltine, quelques éléments non exhaustifs. Elles sont aussi organisées en association, en groupement comme un peu partout.
    A Abéché, je peux citer ici l’Union des groupements des femmes pour le développement de l’artisanat, dénommé EKHLAS. Ce sont des femmes vannières, potières, tapissières et brodeuses. Vers les autres lieux, les femmes s’organisent beaucoup plus dans le domaine de l’économie rurale (cultures maraîchères, agriculture). Par exemple, leur participation pour la construction des ouvrages socio-économique joue un rôle important. Financièrement, elles contribuent au même titre que les hommes. Et de cette manière, elles gèrent leurs biens, donnent leur point de vue.
    A Loufounga (Mata-Kornoï/Am-Zoer), des efforts pour l’alphabétisation des femmes ont été faits.
    Je conseillerais aux journalistes qui manquent de professionnalisme, aux journalistes stagiaires de respecter les règles du journalisme. En ce sens que, les devoirs essentiels du journaliste, dans la recherche, la rédaction sont le respect de la vérité ; ne pas confondre le métier de journalisme avec le dénigrement.

  • Le 21 septembre 2010 à 09:54, par pmabeche En réponse à : Mariage traditionnel au Tchad : Des coups de fouet comme cadeaux de mariage

    La honte soit sur lui ! qui se prétend journaliste !
    Salut à tous les Tchadiens qui ont pu lire cet "article". Je connais bien le Ouaddaï, j’ai été marié à une arabe qui m’a choisi elle-même. Je m’honorais d’être parmi les amis du Sultan des Dadjos et du Cheikh des arabes d’Abougoudam. J’avais des amis Ouaddaï, etc. Aucun de ces peuples n’a jamais pratiqué de telles sauvageries. Ma belle-mère était propriétaire du puits, et de l’eau qui en provenait, dans la concession de sa famille, et son mari se gardait bien de lui contester cette propriété. J’ai assisté à un jugement local dans le canton d’Hadjer Hadid, entre une femme et son mari, et c’est la femme qui a vu son droit respecté. Je pourrais multiplié les exemples. Les femmes au Ouaddaï sont libres et respectées. Il est vrai, cependant, que ma femme ne sortait jamais seule, elle exigeait de moi que j’aille chercher sa mère ou une amie pour l’accompagner : une jeune femme ne sortait pas seule, pour ne pas se compromettre ; je respectais son choix.

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