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Lutte contre le SIDA à Ouagadougou : Deux témoignages émouvants

Publié le mardi 19 décembre 2006 à 07h31min

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La journée internationale de lutte contre le Sida a été commémorée le 1er décembre 2006. Au Burkina Faso, c’est la ville de Dori, capitale de la région du Sahel, et chef-lieu de la province du Séno, qui a abrité la cérémonie officielle présidée par le Premier ministre Ernest Paramanga Yonli.

A Ouahigouya, l’association AMMIE, qui lutte contre la pandémie dans la région du Nord, a célébré cette journée en différé le samedi 16 décembre 2006, sous la présidence du haut-commissaire de la province du Yatenga, Ernest Thiombiano.

Cette célébration a débuté la veille par une retraite au flambeau, suivie d’un cross populaire le matin du 16 décembre. Le clou de la cérémonie a été, sans conteste, le témoignage à visage découvert de personnes vivant avec le VIH (PVVIH). En effet, un homme (en mooré) et une femme (en français) ont signifié publiquement leur statut séropositif.

"J’ai la maladie - le Sida - j’ai contracté le mal avec mon épouse qui en est décédée", a affirmé Boureima Ouédraogo du secteur 6 de Ouahigouya, sous ARV (anti-rétroviraux) depuis 2004. C’est au cours de l’année qu’il est arrivé à l’association AMMIE, "sur une civière".

Aujourd’hui, il se sent plus fort que certaines personnes séronégatives, même s’il en appelle à leur esprit de solidarité.

Fatimata Keïta, quant à elle, est une jeune femme de 26 ans. Résidant au secteur 8 de Ouahigouya, elle est conseillère psycho-sociale au compte de l’association AMMIE de la même ville. Mariée et mère d’une fille saine qu’elle a eu en février 2003 grâce à l’assistance du programme de prévention de la transmission mère - enfant, elle dit avoir été dépistée séropositive en 2001. Comme elle-même l’a affirmé, elle est "une preuve palpable que vivre avec le VIH n’est pas synonyme de mort comme beaucoup le croient". A vu d’œil, elle ne présente aucun "signe d’appel" qui peut faire penser au Sida. Rayonnante, elle est physiquement en forme et parle sans complexe. "Le Sida est bien là, en nous, dans nos familles, dans nos communautés, dans notre société", s’est alarmée Cecile Beloum, présidente de l’association AMMIE. Pour elle, "le Sida est là sur le plan physique avec les signes qu’on lui attribue, mais, il est surtout là sur le plan moral avec pour expression : les regards accusateurs, les médisances, la stigmatisation, la marginalisation, le manque d’affection, le manque d’assistance, le manque d’amour, le rejet. C’est plutôt ça, le Sida !", a insisté Cécile Beloum.

Cependant, nous pouvons stopper le Sida, estime-t-elle, à condition que chacun s’engage et tienne sa promesse, comme le demande le thème de la présente journée : "Stop, Sida, tenons notre promesse."

Parmi des personnes distinguées pour leur appui ou engagement aux côtés de l’association AMMIE dans ce combat contre la pandémie, 3 femmes et 2 hommes PVVIH, dont les 2 témoins du jour, ont reçu des attestations de reconnaissance pour leur observance des traitements aux ARV.

En 2005, à l’issue d’une campagne de dépistage volontaire gratuit, l’association AMMIE a fait des prélèvements sur 363 personnes à Ouahigouya dont 8,42% se sont révélés positifs.

Cette année, en prélude à la journée internationale de lutte contre le Sida, la même association a reconduit sa campagne de dépistage volontaire, du 27 novembre au 8 décembre 2006, qui a vu la participation de 2 079 individus. Il y avait parmi eux 82 séropositifs, soit un taux de seroprévalence de 3,94%.

Toutefois, même si en un an le taux de séroprévalence a chuté de 4,48% à Ouahigouya, selon ces chiffres de AMMIE, force est de reconnaître que le nombre de personnes atteintes reste encore élevé et interpelle chacun et tous. En effet, 805 personnes, dont 282 sous ARV, sont suivies par l’association AMMIE. L’espoir de stopper le Sida est-il permis au Burkina Faso et dans le monde ?

"Avec plus de responsabilité, de solidarité et d’engagement francs, nous y arriverons", pense la député Cécile Beloum.


Le maire de Ouahigouya interpelle la communauté scientifique

"Chercheurs du monde, si vous avez pu découvrir le virus du Sida, faites tout pour trouver son médicament", a Abdoulaye Sougouri, maire de la commune de Ouahigouya a l’occasion de la Journée internationale de lutte contre le Sida, organisée en différé le 16 décembre 2006 a Ouahigouya.


Fatimata parle à ceux qui ont peur

"Je m’appelle Keita Fatimata,

J’ai été dépistée séropositive en 2001 à l’association AMMIE.

Si je ne l’avais pas dit, qui l’aurait cru ?

Je suis une preuve palpable que vivre avec le VIH n’est pas synonyme de mort, comme beaucoup le croient.

Si j’ai accepté de témoigner à visage découvert, c’est pour dire à ceux qui ne connaissent pas leur statut sérologique qu’il n’y a que des avantages à faire le test de dépistage.

Je suis mariée.

Ayant pris connaissance de mon statut sérologique, j’ai informé mon mari et il a aussi fait son test.

Nous avons cherché et obtenu les conseils nécessaires pour notre vie conjugale.

Nous sommes sous ARV depuis 2004.

Avec les conseils et le soutien obtenus de l’association AMMIE, nous avons suivi le programme de prévention de la transmission mère-enfant du VIH et le 15 février 2003, j’ai mis au monde une fille, Abibata, qui a été dépistée séronégative 18 mois après sa naissance. Elle est en très bonne santé et fait notre joie.

Si je n’avais pas fait mon test de dépistage pour savoir que j’étais infectée depuis 2001 et afin de me soigner, peut- être que je ne serais pas devant vous aujourd’hui, à plus forte raison avoir un enfant séronégatif.

A tous ceux qui ont peur de faire le dépistage du VIH, je dis que c’est une erreur grave et une fuite de responsabilité.

La présidente de l’association AMMIE nous a toujours dit que personne ne pouvait affirmer ne pas être infecté tant qu’il n’avait pas fait le test de dépistage.

Les mots me manquent pour lui exprimer à elle et à l’association AMMIE ma gratitude et la reconnaissance de toute ma famille.

Sans elle, on serait morts depuis longtemps.

Merci à l’association AMMIE.

Merci à ses partenaires.

A ceux qui, jusque-là, stigmatisent les PVVIH, je voudrais dire que personne n’a voulu être PVVIH, et personne ne sait ce que l’avenir réserve à tout un chacun. Si vous voulez que nous vivions longtemps, ne nous jugez pas, ne nous rejetez pas car avant tout nous sommes vos enfants, vos frères, vos sœurs, vos maris, vos femmes, vos enfants, avant d’être PVVIH.

Nous comptons sur vous pour un changement positif à l’égard des PVVIH que nous sommes.

Merci pour votre soutien."

Diouldé Sadou DIALLO

Sidwaya

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