Cette thèse, selon l’impétrant, met en lumière la pratique de la médecine traditionnelle dans une ville comme Ouagadougou, où il existe une offre de soins biomédicaux abondante et variée.

Ses travaux ont permis de connaître les raisons de la présence de ces tradipraticiens et les motivations du recours des patients à cette médecine. Il ressort ainsi des résultats que les tradipraticiens sont plus nombreux en zone périphérique où l’offre de soins est souvent limitée et où le niveau de vie est parfois faible, que dans les quartiers centraux. Il souligne également que, contrairement aux idées reçues, les soins chez les tradipraticiens ne sont pas forcément moins chers que dans les formations sanitaires classiques. Et il arrive que des patients parcourent une quinzaine à une vingtaine de kilomètres pour des soins chez un tradipraticien. Ce n’est donc pas toujours une question de proximité. Les recherches ont permis également de mettre en lumière une nouvelle catégorie de tradipraticiens qui utilisent les moyens de la médecine moderne, mais également de faire une cartographie des plantes souvent difficiles à trouver et qui entrent dans les soins chez les tradipraticiens.

Esaïe Yanogo a mis en lumière les lieux préférentiels d’installation des tradipraticiens

À l’issue de près de trois heures de présentation, de questions et de réponses, le jury, présidé par le géographe Pr Tanga Pierre Zoungrana, a déclaré Esaïe Sidbéniwendé Yanogo digne du grade de Dr avec mention très honorable. Un heureux aboutissement après des années de recherches sur un sujet habituellement traité par d’autres disciplines scientifiques. « C’est un sujet qui est original puisqu’il est traité du point de vue de la géographie. Ce qui est relativement rare dans la recherche scientifique. On a l’habitude d’avoir des recherches de la discipline de l’anthropologie. Il a eu une démarche exhaustive à l’échelle de la ville de Ouaga. C’est quelque chose qui est rare et qui permet de disposer d’une base de données importante actualisée, qui pourra servir au ministère de la Santé. Ce qui est très important parce qu’on sait que maintenant la médecine traditionnelle fait partie du système de santé », a indiqué Dr Aude Nikiéma, maître de recherche à l’INSS/CNRST, qui a dirigé la rédaction de la thèse.

À l’issue des délibérations, le jury présidé par Pr Tanga Pierre Zoungrana a déclaré Esaïe Sidbéniwendé Yanogo digne du grade de Dr avec mention très honorable

Pr Tanga Pierre Zoungrana a salué les résultats de la thèse de Dr Yanogo. Il souligne qu’il y a beaucoup d’idées reçues sur la médecine traditionnelle qui ne sont pas vraies. « Par exemple, le fait qu’on pense que la médecine conventionnelle, c’est pour la ville et la médecine traditionnelle pour le milieu rural. Il y a des mécanismes souterrains qui commandent le recours aux soins conventionnels ou traditionnels (...) C’est un ensemble de résultats qui nous permettent de poser la problématique et d’aller plus loin pour comprendre comment est-ce que médecine traditionnelle et médecine conventionnelle travaillent ensemble, quelques fois s’accrochent, mais tentent de s’harmoniser pour offrir des soins aux populations de la ville. Cette compréhension permettra certainement d’améliorer la qualité des soins aussi bien en médecine traditionnelle que conventionnelle », a laissé entendre Pr Zoungrana.

Les nombreuses données récoltées lors des recherches ont permis au désormais Dr Yanogo, de développer une application mobile appelée « Tradi-laafi » téléchargeable sur Playstore et Appstore dont l’utilisation est gratuite. Elle recense tous les tradipraticiens reconnus par le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique à Ouagadougou, les pathologies qu’ils soignent et leurs localisations.

Justine Bonkoungou
Lefaso.net