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Soutenance de thèse de doctorat unique : Alain Héma présente les boues de vidange comme une solution de fertilisation des sols

Publié le mercredi 24 janvier 2024 à 22h25min

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Soutenance de thèse de doctorat unique : Alain Héma présente les boues de vidange comme une solution de fertilisation des sols

Alain Sabiriba Héma a été jugé digne du grade de docteur en sciences naturelles et agronomie, spécialité science du sol, avec la « mention très honorable ». Il a défendu sa thèse de doctorat, ce mardi 23 janvier 2024 à l’université Nazi Boni de Bobo-Dioulasso. Ce, devant un jury présidé par le Dr François Lompo, directeur de recherche en agro-pédologie. Le fruit de ses recherches a porté sur la valorisation agronomique des boues de vidange au Burkina Faso.

« Les boues de vidange, de l’ONEA que nous négligeons tant, peuvent être utilisées de façon efficace pour améliorer la fertilité des sols et répondre aux défis de la sécurité alimentaire ». C’est la conclusion à laquelle est parvenu le désormais Dr Alain Héma, aux termes de ses travaux de recherches qui auront duré environ quatre années. Le fruit de ses recherches a été présenté le mardi 23 janvier 2024 à Bobo-Dioulasso devant d’éminents chercheurs, des parents et amis. Ainsi, de sa présentation orale à la phase des questions, l’impétrant a su montrer une maîtrise du sujet qui a séduit l’ensemble des membres du jury. Ils estiment que le document présenté est un « document scientifique de qualité et répond aux exigences d’un document de thèse de doctorat unique ». C’est pourquoi, ils ont déclaré Alain Héma digne du grade de docteur en sciences naturelles et agronomie avec la « mention très honorable ».

« Effets d’amendements à base de boues de vidanges sèches associées aux phosphates naturels et à l’argile montmorillonitique sur les paramètres agro-pédologiques sous cultures du maïs (Zea mays L.) et du cotonnier (Gossypium hirsutum L.) dans deux zones agro-écologiques du Burkina Faso », c’est autour de ce thème que Dr Alain Héma a muri la réflexion pour les travaux de recherche de sa thèse. Le travail a été encadré par Dr Mamadou Traoré, maître de conférences à l’université Nazi Boni (directeur de thèse) et le Pr Hassan Nacro, professeur titulaire à l’université Nazi Boni (co-directeur de thèse). L’objectif des travaux est de contribuer à l’assainissement du cadre de vie et l’augmentation durable de la production agricole, en améliorant l’offre en matière organique des sols par la mise au point des formules d’amendements à base de boues de vidange sèche et des substrats locaux.

Dr Alain Héma expliquant le fruit de ses recherches

Les Boues de vidange sèches (BVS) comme solution de fertilisation des sols
A l’image des autres pays en voie de développement, le Burkina Faso fait face à un grand problème d’assainissement, de par sa forte croissance démographique. Ainsi, une grande production de boues de vidange a lieu chaque jour. Une situation qui pousse les populations à adopter souvent des méthodes peu conventionnelles pour gérer ces déchets issus des latrines et autres fosses septiques. Toute chose qui peut avoir des conséquences sur l’environnement et sur la santé des populations elles-mêmes. Cependant, la mise en place d’une stratégie d’assainissement conformément aux ODD a permis une augmentation du taux d’accès à l’assainissement. Selon les données présentées dans sa communication, Dr Héma a fait savoir que la production substantielle des sous-produits d’assainissement notamment les boues de vidange sur l’ensemble des stations de traitement de l’ONEA est estimée à 167 082 000 m3.

Seulement 15% de ces boues de vidange sont traitées dans les stations et 85% sont anarchiquement dépotées dans l’environnement. Cela constitue donc une source de pollution environnementale, une perte de la biodiversité tellurique et un problème de santé publique. Au niveau des stations de traitement, le cycle de traitement des boues de vidange se résume à leur déshydratation dans des lits de séchage et de leur stockage. Le document précise qu’au Burkina Faso, 34,54% des sols agricoles sont fortement dégradés (CILSS, 2015). D’où l’importance de l’utilisation des boues de vidange sèches (BVS) dans les systèmes de production agricole en vue d’améliorer la fertilité des sols. C’est ainsi que Alain Héma a décidé de mener la réflexion sur la question.

« Mon travail consistait à valoriser les sous-déchets d’assainissement notamment les boues de vidange issus des différentes stations de traitement de l’ONEA, afin de répondre aux défis de la baisse de la fertilité des sols. Cela pourrait améliorer la production agricole et répondre également aux défis de la sécurité alimentaire au Burkina Faso. Ces sous-produits d’assainissement sont très riches en matière organique donc on s’est dit pourquoi ne pas utiliser ces substrats dans notre agriculture pour améliorer la fertilité du sol au lieu d’acheter des engrais et minéraux qui nous coûtent très chers et à la longue pourraient dégrader le sol », a expliqué Alain Héma.

Alain Sabiriba Héma a été jugé digne du grade de docteur en sciences naturelles et agronomie, spécialité science du sol, avec la « mention très honorable »

Les activités ont porté essentiellement sur la caractérisation des boues de vidange sèches dans les quatre stations de traitement de l’ONEA (Dogona, Kossodo, Sourgoubila et Zagtouli) ; l’optimisation du potentiel fertilisant des boues de vidange sèches par le chaulage ; et la formulation et l’évaluation des performances agronomiques et rentabilité économique d’amendements à base de boues de vidange sèches et de substrats locaux sur sols ferrugineux et ferralitiques. « Nous avons caractérisé toutes les boues des quatre stations de traitement de l’ONEA. En plus de la caractérisation, nous avons fait des formulations d’engrais sur la base des substrats endogènes pour mettre en place des formules en vue de les utiliser en plein champ.

Pour le deuxième travail, nous avons choisi deux sites à savoir un à Bobo-Dioulasso et l’autre à Ouagadougou. Sur chaque site nous avons travaillé sur deux cultures à savoir le maïs et le cotonnier qui sont des cultures très rentables au Burkina Faso et dont l’économie en dépend fortement. Les travaux ont été conduits sur les sites pendant quatre ans et à l’issue des travaux nous avons obtenu des résultats que nous avons présentés ce matin », a-t-il fait savoir.

Au terme de ses analyses, il a souligné un fort potentiel agronomique des boues de vidange sèches. Toutefois, ces boues sont caractérisées par une acidité très prononcée et une minéralisation accentuée de la matière organique. Aussi, les apports de chaux éteinte à 3,125 et 6,25 kg/tonne de BVS réduisent l’acidité des BVS sans perturber l’activité microbienne ; l’adjonction des substrats locaux (argile et chaux) aux BVS a permis d’obtenir des formules d’amendements meilleurs aux BVS brutes. Il a aussi relevé que la combinaison substrats locaux aux BVS est économiquement rentable en cultures du coton et du maïs.

Le travail a été réalisé dans le cadre d’une collaboration avec l’ONEA, selon le Dr Mamadou Traoré, enseignant chercheur en science du sol à l’université Nazi Boni

Les travaux lui ont permis de faire des recommandations. Il s’agit de la mise en place d’un système de traçabilité des BVS lors du stockage, la mise en place d’une unité semi-industrielle de production des fertilisants organiques à base des BVS et des substrats locaux (phosphates naturels et l’argile). En terme de perspectives, Dr Héma compte approfondir les essais agronomiques avec différentes doses des formulations et évaluer leurs effets sur l’indice de qualité du sol ; évaluer l’effet des BVS sur la solubilisation des phosphates naturels et d’évaluer l’acceptabilité des consommateurs vis-à-vis de l’utilisation des fertilisants organique à base de BVS et de substrats locaux.

La qualité du document est saluée par les membres du jury

Dr Mamadou Traoré, enseignant chercheur en science du sol à l’université Nazi Boni, est celui-là qui a dirigé la thèse de Alain Héma. A l’en croire, ce travail a été réalisé dans le cadre d’une collaboration avec l’ONEA. « L’ONEA avait des soucis avec la gestion des boues de vidange et nous en tant que des spécialistes en science des sols, ayant comme domaine d’intervention la valorisation des sous-produits, nous nous sommes investis pour essayer de trouver des fertilisants à base de ces boues de vidange et aussi en utilisant des produits locaux qui sont disponibles », a-t-il indiqué.

Au terme donc des travaux, il a exprimé sa satisfaction car il estime que cette thèse résout deux problèmes. Le premier étant le problème de l’assainissement, le second est lié à la gestion de la fertilisation des sols. « Ce sont des problèmes fondamentaux. L’un des indices de développement d’une communauté, c’est d’être à mesure de recycler les déchets qu’elle génère. Et l’ONEA avait entrepris un processus qui n’était pas encore fini et nous, nous avons pu terminer le processus. Au lieu que ces boues de vidange soient des déchets encombrants, elles seront transformées en substrat organique de haute valeur agronomique qui pourra être vendu sur le marché. Nous sommes satisfaits », a laissé entendre le directeur de thèse, Dr Mamadou Traoré.

Le président de jury, Dr François Lompo, a salué la pertinence du thème et la qualité du travail de l’impétrant

Le président de jury, Dr François Lompo, pour sa part, a salué la pertinence du thème et la qualité du travail de l’impétrant. « Le sujet permet de répondre à des défis tels que les questions d’assainissement et d’hygiène avec tout ce que nous connaissons qui amène des maladies. Dans un pays où nous avons la dégradation des ressources naturelles, la dégradation des terres, ces terres ont besoin de matières organiques pour la fertilité des sols. De ce point de vue, les boues de vidange qui ont fait l’objet de cette thèse sont une ressource organique sur laquelle il fallait qu’on travaille pour résoudre la question de la fertilité des sols », a-t-il lancé.

L’ambition du nouveau docteur est de mettre en place une unité de production mécanisée de fertilisant à base des substrats locaux. Il est convaincu que c’est en cela que le pays pourra résoudre le problème de l’insécurité alimentaire.

Romuald Dofini
Lefaso.net

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