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Justice : Un sexagénaire écope d’une peine d’emprisonnement de 11 ans pour viol aggravé sur une mineure de 9 ans

Publié le vendredi 3 novembre 2023 à 21h20min

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Justice : Un sexagénaire écope d’une peine d’emprisonnement de 11 ans pour viol aggravé sur une mineure de 9 ans

La première session de jugement des dossiers de la chambre criminelle de la Cour d’appel de Ouagadougou a débuté le jeudi 2 novembre 2023 au Tribunal de grande instance Ouaga 2. Le premier dossier jugé est un crime et l’accusé, un sexagénaire, est poursuivi pour des faits de viol aggravé sur une mineure de 9 ans. Mais pour comprendre les faits, il faut remonter à 2018.

« La première fois, il m’a dit qu’il voulait m’envoyer payer du Nescafé. Quand j’ai tendu mon bras pour prendre l’argent, il tendait son bras puis le retirait en reculant d’un pas. Et une fois que j’étais dans son atelier, il me soulevait et m’emmenait dans sa chambre qu’il refermait. La deuxième fois, il m’a dit qu’il voulait me donner une mangue. Quand je suis allée dans son atelier, il m’a dit qu’elle se trouvait dans la chambre et que je pouvais rentrer la prendre. Mais quand je suis rentrée, il m’a rejoint là-bas et a refermé la porte...Il me mettait sur ses cuisses, me ceinturait avec ses bras et faisait rentrer et sortir son sexe plusieurs fois ». Voilà en quelques mots, la version des faits relatée par la victime, absente à l’audience de ce jour et dont la lecture des déclarations a été faite par le président du jury.

La mère de la victime elle, souligne que son attention fut attirée un jour, alors que l’accusé était de passage chez eux. De ses dires, ce dernier a soulevé la jupe de sa fille qui l’a repoussé à tour de bras. Instinct maternel ou non, en tout cas, elle a, en plus du geste déplacé du visiteur, conclu que l’attitude de sa fille était loin d’être anodine. Ce n’est que plus tard qu’elle réussira à lui (sa fille) tirer les vers du nez, mais entre cette dernière scène et le prétendu premier forfait, deux années s’étaient déjà écoulées.

Mis devant les faits, l’accusé nie avoir eu un quelconque rapport avec la fille. Pour ce qui est de la scène qui s’est produite devant sa mère, il se défendra en ces termes : « j’ai l’habitude de m’amuser avec l’enfant même devant sa maman. Je n’ai pas soulevé sa jupe. J’ai juste tiré ça comme ça, simplement pour m’amuser. Je ne l’ai même pas touché ».

Parmi les témoins qui ont donné leurs versions des faits dans cette affaire, figure celle d’une animatrice. Cette dernière travaille pour le compte d’une ONG qui lutte pour la cause des jeunes filles. Elle dit avoir reçu la mère de la petite victime en larmes qui lui demandait la conduite à tenir dans ce cas de figure. « Je lui ai dit que de mon côté, on ne peut que faire des enquêtes. C’est ainsi qu’on a décidé d’observer la fille en prêtant une attention particulière à ses faits et gestes. On s’est rendu compte qu’elle changeait au fur et à mesure et qu’elle était de moins en moins concentrée. Même ses notes ont chuté en classe. En plus de cela, on a fait des examens et le certificat médical révèle qu’il y a absence d’hymen », a-t-elle relaté. A la question du conseil de l’accusé de savoir si elle sait avec exactitude quand est ce que les présumés actes de viols ont été commis, le témoin répondra qu’elle n’en a aucune idée.

Au moment de se constituer partie civile, son père après hésitation (visiblement sous le choc) a souligné qu’il n’entendait rien réclamer à titre de dommage et intérêt.

Dans ses observations, le procureur a souligné son indignation au regard de cette affaire qui met en cause une personne du troisième âge et la victime, laquelle pourrait avoir l’âge de sa petite fille. « Pour quelqu’un qui a plus de soixante ans, on ne peut pas vraiment comprendre. Est-ce une maladie ? Une passion ? Une déviance ? Un trouble ? On ne sait pas. C’est peut-être même un peu de tout. Quand je regarde son père qui est sous le choc, je le comprends. Le complexe d’Œdipe dit qu’il y a une relation particulière entre un père et sa fille et c’est difficile d’accepter que sa fille a subi ces affreusetés...La situation est déplorable et on ne peut que constater et regretter les faits. Pour ce qui est de la peine, nous n’avons rien à proposer. Pas parce que nous sommes père, mais parce que vous êtes les juges et que vous serez à même de lui infliger la peine que vous aurez jugée suffisante et ce, à la hauteur du crime qu’il a commis », a-t-il souligné.

Pour cette affaire, il n’y avait pas foule dans la salle. Mais sur les visages du peu de personnes qui assistaient au procès, on pouvait aisément lire le dégoût. Dans sa plaidoirie, le conseil de l’accusé a lui-même relevé le caractère très émotionnel de cette affaire, soulignant toutefois au passage qu’on est en droit.

« Ce sont les faits qui importent, alors je vous demande de bien vouloir faire abstraction des vives émotions que peuvent susciter cette affaire et juger les faits. Je commencerai par souligner le fait qu’il existe bel et bien un certificat médical. Mais ce document précise qu’il y a absence d’hymen et de rougeur. Je ne suis pas médecin et je ne prétends pas l’être, mais je sais que l’absence d’hymen ne veut pas forcément dire qu’il y a eu pénétration, donc, que la fillette a été victime d’un viol. En sus, lorsque j’ai posé la question à l’animatrice de savoir si elle savait avec exactitude, à quelle date avait eu lieu le prétendu dernier rapport entre mon client et la jeune fille, elle a répondu non. Ce que l’on sait et qui est constant dans cette affaire, c’est que c’est deux ans après que les faits ont été reconstitués. Et en deux ans, beaucoup de choses peuvent se passer sans être du ressort de mon client. En plus de cela, ici même au tribunal, on a dû recourir à l’interprétation pour que certains puissent cerner certaines choses. Mais jamais l’interprétation n’a été fidèle. Il y a toujours des choses qui ont été oubliées ou même ajoutées. Et pour revenir au cas d’espèce, êtes-vous sûrs que de la fille à la mère, de la mère à l’oncle, de l’oncle au père et encore de la mère à l’animatrice, les faits qui ont été racontés ont été fidèlement transmis d’une personne à une autre, au point qu’ils n’aient pu être dénaturés ? Ce que je veux relever ici c’est que le doute profite toujours à l’accusé. Et dans cette affaire, il y a beaucoup de doutes. Pour autant, doit-on faire fi de tout cela et prendre le risque d’envoyer un vieillard de 61 ans en prison, quand on sait que la peine minimale qu’il risque est de 11 ans ? Ça aurait été un jeune, on aurait pu comprendre. Mais pour mon client, je ne vois pas la nécessité et ce, en plus du doute qui existe dans cette affaire. C’est pourquoi je vous demande donc de le relaxer », a plaidé le conseil de l’accusé.

Après une pause d’une trentaine de minutes, les jurés ont reconnu l’accusé coupable des faits de viol aggravé avant de le condamner à une peine d’emprisonnement de 11 ans et une amende 1 million FCFA, le tout ferme.

Erwan Compaoré
Lefaso.net

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