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El Hadj Abdoulaye Borro, professeur d’arabe et prêcheur : "La Tabaski marque le nouvel an chez les musulmans"

Publié le vendredi 30 janvier 2004 à 06h57min

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Souvent critiqué par ses co- réligionnaires pour ses prises de position en faveur d’un islam pur, Abdoulaye Borro reste cependant très écouté à travers ses prêches dans les mosquées et sur les ondes des radios FM de la ville. Quel sens donne-t-il a la Tabaski ? La manière de fêter aujourd’hui répond-t-elle à l’esprit du Coran ? Des questions que Sidwaya a posées à cet homme rompu aux questions religieuses avant son embarquement pour le Hadj-2004.

Sidwaya (S.) : Que représente la Tabaski pour les musulmans ?

El Hadj Abdoulaye Borro (A.B.) : La Tabaski est une fête islamique célébrée par tous les musulmans du monde. Dans l’année, les musulmans fêtent deux fois, à savoir pendant le Ramadan (après le jeûne) et la Tabaski. Le prophète Mahomet a célébré cette fête avec ses compagnons et a recommandé aux autres musulmans d’en faire de même tant qu’ils sont sur terre.

S. : Comment doit être fêtée la Tabaski ?

A.B. : La Tabaski doit être fêtée comme le prophète l’a fait. Mais le constat que l’on peut faire aujourd’hui est qu’il y a des changements que je qualifie d’anormaux et qui n’ont rien à voir avec l’islam. Sinon le jour de la fête, le matin, on fait sa toilette et on se rend à la prière. Au retour de la prière, on égorge le mouton qu’on a eu. Pour les musulmans, la Tabaski est considérée comme une nouvelle année. En reconnaissance de ce que Dieu a fait pour chacun pendant l’année écoulée, on doit le remercier. La Tabaski est un moment de prière et de grâce à Dieu. En dehors de ça, tout ce que l’on voit en ville comme les réjouissances n’ont rien à voir avec ce que le Coran dit.

S. : La Tabaski ou l’Aid El Kébir est encore appelée la fête du mouton. Etes-vous de cet avis ?

A.B. : On dit que la Tabaski c’est la fête du mouton mais quand on regarde réellement, ce n’est pas la fête du mouton parce qu’on doit égorger les moutons. Pourquoi on égorge les moutons ce jour-là ? Notre grand prophète Ibrahim a fait un jour sacrifice de plusieurs centaines de bétail à Dieu. Cela a émerveillé tout le monde et même les anges dans le ciel. En réaction à cela, il a dit qu’il était même capable d’égorger son enfant en sacrifice à Dieu s’il le lui demandait. En ce moment, il n’avait pas encore d’enfant mais par la suite, Dieu lui en donna un. C’était un garçon. Quand cet enfant eut 7 ans, Dieu rappela à Ibrahim son propos et lui demanda en songe que cet enfant lui soit sacrifié. Le grand prophète crut que c’était une inspiration démoniaque mais le même rêve se répéta plus tard. Alors il se décida à offrir l’enfant à Dieu pour lui témoigner sa fidélité. Au moment où il allait l’égorger, Dieu arrêta sa main armée de couteau et par l’entremise de l’ange Gabriel mit un bélier en remplacement de l’enfant. Et depuis ce temps, pour perpétuer cette fidélité, les musulmans égorgent à chaque Tabaski un bélier. Au-delà du geste d’Ibrahim, la Tabaski marque le nouvel an chez les musulmans tout comme le 1er janvier l’est chez les chrétiens.

S. : Que doit faire celui qui n’a pas les moyens de s’acheter un mouton ?

A.B. : Celui qui n’a pas les moyens de s’acheter un mouton pour la Tabaski, Dieu ne l’oblige pas puisque c’est une adoration. Si on a les moyens de le faire c’est bien, et si on en a pas, Dieu n’en tient pas compte. C’est comme le pèlerinage à la Mecque. On y va seulement quand on en a les moyens, sinon Dieu n’oblige personne. En ce qui concerne la Tabaski, même si on proposait le prix du mouton à 5 000 F, il y aura toujours des gens qui ne pourront pas l’acheter. Et je profite pour interpeller les vendeurs de moutons qui à l’approche de la Tabaski augmentent de façon arbitraire les prix des animaux que cela n’est pas la volonté de Dieu.

S. : La manière de fêter la Tabaski aujourd’hui répond-t-elle à la philosophie de départ ?

A.B. : Certaines manières correspondent, d’autres pas du tout. Si Dieu te donne les moyens, le jour de la fête, on porte les habits neufs pour la prière publique le matin et au retour, on égorge le bélier pour le repas. On ne doit pas escroquer ou voler pour avoir un habit neuf ou s’acheter un mouton pour la fête, car le prophète n’a pas fait cela. Le jour de la fête, nous devons avoir une pensée pour les indigents et les malades. Pour cela, le Coran recommande que la viande du mouton de la fête soit répartie en trois parts. Une partie est donnée aux personnes nécessiteuses, la deuxième partie aux voisins et aux amis et la troisième partie revient à la famille. Mais que constate-t-on aujourd’hui ? Par égoïsme, les gens font sécher la viande pour mieux en profiter après la fête alors que d’autres n’ont rien du tout. Le prophète n’a pas dit ça. Ensuite il y a des familles où les filles qui ne sortent pas n’importe comment sont laissées ce jour là en libertinage pour mieux jouir des plaisirs de la fête à travers des réjouissances en ville. Cela ne se voyait pas avant et c’est tout ce qui fait la différence entre la Tabaski d’avant et de maintenant. C’est pourquoi j’invite les musulmans à approcher les maîtres islamiques, ceux qui connaissent bien le Coran pour s’éclairer et mieux comprendre la pratique religieuse recommandée par les saintes écritures.

Propos recueillis par Frédéric Ouédraogo
Sidwaya

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