Actualités :: Situation nationale : Questions au Premier ministre Yonli

Dans cette lettre ouverte , le Parti national républicain/Juste voie
et le Front patriotique pour le changement Yelemani interpellent
le Premier ministre sur certaines questions portant sur la vie
nationale.

Monsieur le Premier ministre,

Nous venons par la présente attirer votre attention sur la
situation de plus en plus grave que connaît notre pays depuis
que vous êtes à la "tête" du gouvernement du Burkina Faso.
En son temps, vous avez déclaré avec beaucoup d’aplomb que
vous conduirez un gouvernement de "combat". Force est de
constater que vous et votre équipe avez capitulé sur tous les
fronts où le peuple vous attendait pour assurer son bonheur.
Ces derniers temps une série de scandales et de crimes
économiques sont dénoncés dans la presse et soulèvent
l’indignation du peuple plus que la fameuse tentative de coup
d’Etat révélée au grand public le 7 octobre 2003 après
l’arrestation de quelques personnes présumées putschistes.(...)

Cette situation met en éveil toute les nationalités qui subissent
l’ostracisme et l’ethnocentrisme et pousse à une vigilance
accrue sur d’éventuels dérapages ultérieurs qui pourraient
mettre en cause ceux des nôtres car nous les exclus du
systèmes n’accepterons jamais d’être les victimes expiatoires
d’une autre sordide lutte pour le pouvoir. Non seulement vous ne
vous êtes pas encore prononcé sur cette grave affaire, mais
encore vous ne réagissez pas sur les risques que notre pays
court quant à son unité nationale.

Sur le plan politique, le népotisme, le régionalisme et
l’ethnicisme s’accentuent sans que vous ne puissiez rien y faire.
La cohésion nationale s’effrite de jour en jour et le
"développement solidaire" que vous avez la charge de traduire
dans les faits, ne profite qu’à certains (....)
Monsieur le Premier ministre, le peuple veut être gouverné, il
veut savoir et il a le droit de savoir ce que pense et compte faire
le gouvernement face aux multiples affaires "politiques" et
économiques qui gangrènent notre société car jusqu’ici rien,
absolument rien, n’a été fait ou dit pour faire comprendre au
peuple que les gouvernants sont à l’écoute et comptent prendre
des mesures pour corriger cette dangereuse dérive qui
caractérise la gestion de la IVe République depuis son
avènement.

Pour se maintenir au pouvoir, le régime a développé les
pratiques les plus sordides qui minent et détruisent dans ses
fondements le système démocratique que le peuple s’est donné
avec la constitution du 2 juin 1991. Ainsi,, le clientélisme, le
clanisme, le népotisme, le régionalisme, l’ethnocentrisme et la
corruption ont pris des dimensions exponentielles avec en
prime l’impunité totale, d’où un retour en force de la paresse, de
l’affairisme et de la délinquance à col blanc. Ce système pervers
a fini par tuer le patriotisme et favoriser l’introduction de réseaux
mafieux internationaux et l’entrée en action des prédateurs
locaux.

Sur le plan économique et social, votre bilan est encore plus
catastrophique. Tout se passe comme si vous n’étiez pas le
Premier des ministres, mais seulement un simple membre du
gouvernement, c’est-à-dire quelqu’un qui assiste aux conseils
des ministres et qui n’a aucune emprise sur le milieu donc
aucune prise sur les événements.

En effet, les crimes économiques se succèdent à un rythme
effréné, tous plus scandaleux les uns que les autres, sans que
vous ne puissiez lever le plus petit doigt. Dans un pays aussi
pauvre que le nôtre, où il y a tant à faire pour le bien du peuple
votre immobilisme est des plus révoltant là où vous êtes.
Sur le scandale relatif à la construction de la route nationale 1
(RNI) tronçon (Boromo-Bobo), onze (11) milliards de francs CFA
sont partis en fumée.

La seule réaction digne d’intérêt, quoi que bien en deçà de nos
attentes, est celle de la commission de l’Union européenne
(après que nous avions dans la presse stigmatisé et dénoncé
les crimes économiques tout en interpellant votre gouvernement
sur les mesures urgentes à prendre) qui aime bien distribuer
des leçons sur la bonne gouvernance (...)

Mais de la part de votre gouvernement le peuple ne ressent que
mépris, arrogance et duplicité. Votre ministre des Infrastructures
des Transports et de l’Habitat, Hyppolite Lingani s’est bien
expliqué devant la presse sur ce gros scandale de la route
Boromo -Bobo mais c’était pour (...) débiter des contre-vérités : il
n ’y a pas que 25 km de goudron à reprendre : les retenues de
garanties sont insuffisantes pour réparer cette route et mieux ce
n’est pas après la réception provisoire des travaux qu’il faut
réclamer à l’entreprise à cor et à cris la police d’assurance ou
autres pièces du cahier des charges. Pourquoi n’avez vous pas
exigé de lui qu’il vous remette sa démission ?

Votre gouvernement ne peut pas nous convaincre qu’il n’y a pas
dans le cas présent une affaire de concussion et de
malversations. (...) Son comportement complaisant dans cette
affaire nous conduit à vous interpeller sur le bitumage de l’axe
Tenkodogo-Garango. Pourquoi le bitumage de ce tronçon
d’environ 27 kms, pendant que l’axe Ouaga-Dédougou, est
ignoré malgré son importance économique et sociale évidente ?

A quel moment l’appel d’offre officiel relatif au tronçon
Tenkodogo-Garango a-t-il été lancé ? Qui a financé ces travaux ?
Quelles mesures votre gouvernement de "combat" a-t-il prises
quant au scandale des Syro-Libanais impliqués dans les
contrefaçons, fraudes douanières et fiscales portant sur les
motocyclettes ? Il y a un certain temps de cela, vous avez été
personnellement sollicité dans l’affaire CATHWEL pour venir au
secours de cette organisation humanitaire malmenée par des
commerçants véreux. Qu’avez-vous fait ?

Des opérateurs
économiques excellent dans le tripatouillage de marchés
publics qu’ils ne parviennent pas à exécuter, se livrent à des
fraudes douanières grossières avec le parapluie protecteur des
caciques du régime. Ils jouissent malgré tout d’une impunité
totale alors que de petits commerçants qui cherchent à gagner
leur pain, sont froidement abattus comme ce fut le cas à Banfora
dans la région des Cascades, région sinistrée par la crise
Ivoirienne. N’y a-t-il pas ici des combats à mener, de vrais
combats ? Pourquoi ne pas prendre des mesures
économiques urgentes telles que réduire la pression fiscale et
douanière pour permettre à ces populations de survivre en
attendant que passe l’orage ?

Le samedi 29 novembre 2003, une mission du Premier
ministère a rendu visite à la SN-SOSUCO à Banfora, société
reprise par le groupe IPS d’AGHA KAN et qui aujourd’hui est au
plus mal. Quelles actions avez-vous initiées face aux menaces
de dépôt de bilan qui planent sur cette entreprise ? (...). Ce
même groupe qui possède FASO PLAST & Air Burkina se serait
positionné pour reprendre la SONABEL promise à la
privatisation. Il y a véritablement danger en la demeure. (...) La
fermeture des GMB est également à l’actif de votre
gouvernement de "combat" gangrené par l’affairisme et la
corruption. Des sociétés d’Etat et de nombreux projets de
développement sont bradés ou pillés au vu et au su de tous par
des individus sans vergogne, bien connus qui n’ont plus peur de
votre justice aux ordres parce qu’ils sont les amis ou servent de
prête-noms à des pontes du régime. C’est le règne absolu de
l’impunité pour ces gens.

Durant vos 2 mandats et sous votre haute autorité, les records
de corruption et de fraudes aux examens et concours ont été
battus d’année en année, les recrutements dans
l’administration, les projets et les sociétés d’Etat se font sur des
bases ethniques et "népotiques", un état de chose qui créent
des frustrations et marquent durablement le subconscient des
laissés-pour-compte. Les récents événements de Banfora
(incendie et saccage du bureau de la douane) et de Niangoloko
(soulèvement des populations, suivi des dégâts à la Mairie, puis
l’incendie des domiciles du Maire et de l’adjoint maire) nos
donnent raison à posteriori et traduisent très bien les
frustrations et le mal être des populations marginalisées et
oubliées par votre gouvernement.

Ces populations ne se
reconnaissent pas dans leurs hommes politiques (mal élus) et
encore moins dans l’Etat qui n’a pas pris la pleine mesure du
fait qu’il s’agit d’une région plus que sinistrée parce qu’elle vit
dans sa chair les conséquences économiques et sociales de la
crise en Côte d’Ivoire. Pourquoi votre gouvernement ne peut
examiner et se prononcer avec lucidité sur les malheurs de cette
région ? Nous demandons à votre gouvernement de traiter ces
affaires avec délicatesse et intelligence pour ne pas aggraver
les souffrances des populations concernées.

Tous ceux qui n’ont vu dans ces affaires que des actes de
"vandalisme" et appellent à la répression contre les populations
se trompent lourdement et sous-estiment les risques de
fractures sociales et nationales que les méthodes fortes ou la
voie judiciaire comportent dans ces cas. D’ores et déjà, nous
demandons la relaxe pure et simple des personnes impliquées
et exigeons que soient examinées avec le plus grand soin les
doléances des populations concernées. Si nous ne prenons
garde, tout pourrait brutalement basculer dans ces régions
devenues très sensibles et au bord de l’instabilité politique et
sociale à cause du contexte sous-régional, toutes attitudes
irresponsables des politiques et de l’administration seraient
dangereuses voire fatales comme la situation en Côte d’Ivoire.

Le pouvoir de la IVe République a joué avec le feu chez les
autres, aujourd’hui ce feu est à nos portes. Nous mettons en
garde tous les acteurs pour nous éviter le pire car le danger est
dans notre région, nous refusons et redoutons qu’elle ne
s’embrase. Récemment votre gouvernement a initié une caisse
de solidarité à grand renfort de publicité sans toutefois emporter
l’adhésion du peuple et insidieusement les travailleurs ont été
mis à contribution. A quoi va servir ce fonds ? (...) Nous avons
encore à l’esprit les malversations dénoncées par des
transporteurs ivoiriens et burkinabè.

Cette solidarité qui semble être le credo de votre gouvernement
est outrageusement à sens unique ; elle fait l’impasse sur les
autres victimes collatérales de la crise ivoirienne que sont les
travailleurs de SITARAIL qui sont en chômage technique.
Jusque-là, eux n’ont fait l’objet d’aucune attention, ils n’ont
bénéficié d’aucun geste de solidarité de votre gouvernement. Ne
sont-ils pas des Burkinabè sinistrés comme les rapatriés ?
Leurs familles, femmes, enfants n’ont-ils pas le droit à la
solidarité nationale ? C’est donc contre cette politique de deux
poids deux mesures que leurs femmes, ces mères de famille
qui souffrent, ont marché à Bobo pour réclamer de votre
gouvernement qu’il traduise dans les faits ce qui a été le thème
de campagne et
programme septennal du président Blaise Compaoré : " le
Développement solidaire".

Pour des activités ludiques donc de plaisir et de prestige, votre
gouvernement s’apprête à mobiliser pas moins de 2 milliards
de nos francs pour le sport alors que les travailleurs de
SITARAIL et leurs familles son en train de sombrer dans le
désespoir et la misère noire. Nous sommes tous nationalistes,
nous soutenons tous le football, mais convenons qu’il y a des
priorités : soutenir les pauvres victimes de la crise ivoirienne.
Pour ce faire, nous proposons que les fonds PPTE soient
dégagés pour soutenir la scolarité des enfants de ces
travailleurs, c’est aussi lutter positivement contre la pauvreté.
Votre gouvernement n’a pas le droit de laisser se compromettre
l’avenir de ces enfants. Que les fonds qui ont été levés
récemment soient en partie affectés au soutien de ceux de
SITARAIL avant que les sous ne disparaissent.

Face à toutes ces affaires de crimes économiques, votre
gouvernement a choisi plutôt de combattre énergiquement les
partis politiques de l’opposition. Le "nous allons ratisser large"
du commissaire du gouvernement en dit long et donne le ton.
Ainsi, dans votre logique, vous réprimez les défenseurs de
droits humains. Vous cherchez à briser les reins des avocats
honnêtes, défenseurs des faibles, des veuves et des orphelins.
Mais jusqu’ici vous n’avez livré aucun combat utile au profit de
notre peuple.

Monsieur le Premier ministre,
Vous êtes le coordonnateur de l’action gouvernementale,
visiblement vous n’avez aucune prise sur les événements. (....)
Regardez au Mali d’à côté ou l’on mène concrètement la lutte
contre les crimes économiques : un ancien directeur général
des douanes a été écroué pour des motifs de crimes
économiques : un ex-procureur de la république arrêté et
incarcéré pour malversation ou abus confiance, toute chose que
l’on ne peut s’imaginer sous votre gouvernement. Pourquoi
n’imitez-vous pas les bons exemples d’ailleurs ?

Ici, les
nouveaux riches " voleurs" pillent allègrement le pays tout entier
et bénéficient d’une quasi "immunité judiciaire" qui leur permet
de narguer le peuple et terroriser les honnêtes citoyens.
Outre notre volonté de crier haro sur les crimes économiques
par nos prises de positions sans équivoque, nous tenons à
faire prendre conscience à tous que notre pays vit dans et grâce
à une économie sous perfusion, tel un malade trop faible pour
s’alimenter de lui-même. Non, le Burkina Faso est trop pauvre
pour subir les prédations de ces nouveaux riches du fruit des
vols et de la concussion.

Jamais nous ne ploierons devant les nouveaux riches ou
délinquants à col blancs qui déambulent et pavoisent dans les
couloirs du pouvoir, les salons feutrés et les hôtels luxueux.
Nous les regardons droit dans les yeux et les dénoncerons
malgré leur "puissance" et les protections dont ils bénéficient.
Nous ne pouvons pas vous laisser tranquille, vous ou ( tous
ceux qui seront appelés à occuper cette fonction) les voleurs et
autres prédateurs de la République tant que les choses ne
changeront pas.
Non ! Vous ne pouvez et ne devez pas rester là, à ce stade, il
serait bon que vous pensiez à votre avenir politique. Rendez le
tablier. Partez pour sauver votre dignité pendant qu’il est temps.
Démissionnez !

Veuillez croire, Excellence Monsieur le Premier Ministre à
l’expression de notre très haute considération.

Ouagadougou, le 22 décembre 2003

Pour le PNR/JV
Le président : Christian T. Koné

Pour le FPC/Yélmani
Le président : Tahirou T Zo

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