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Justice : Sayouba Traoré plaide pour l’assainissement du système

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Publié le jeudi 16 juillet 2020 à 22h35min

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Justice : Sayouba Traoré plaide pour l’assainissement du système

Dans cette lettre adressée aux juges, le journaliste Sayouba Traoré, s’insurge contre les jugements infondés. Il plaide pour la prise de mesures contre les cas les plus sérieux

Mesdames les juges,
Messieurs les juges

Permettez à un citoyen de s’adresser à vous ce matin, dans un langage de simple bon sens ! Je souhaiterais vous soumettre les réflexions ci-dessous. Si vous y remarquez des maladresses, je vous serais reconnaissant de les considérer comme telles. Il n’y a aucune intention malveillante dans ma démarche. Et d’ailleurs, je ne vois aucune raison d’avoir des intentions malveillantes à votre encontre.

Je mesure la difficulté de votre tâche, puisque je suis moi-même engagé à expliquer quotidiennement à mon prochain qu’on ne raconte pas ce qu’on veut sur la place publique. Et dans mon cas, je ne suis armé que de ma seule volonté, et je ne suis outillé que de la longue pratique de la déontologie du journalisme. Souvent, mon propos se limite à dire "Tu ne peux pas prouver, tu ne publies pas !". Admettez que c’est très succinct !

Le droit est complexe et les textes des législations sont innombrables et touffues. Si vous considérez simplement les taux d’alphabétisation dans notre pays, si vous considérez parmi les alphabétisés quelques îlots de personnes à même de décortiquer un texte de loi, vous conviendrez avec moi qu’il y a du boulot.

Je ne suis pas un esprit rebelle. En tout cas, ce n’est pas la perception que j’ai de ma personnalité. Toutefois, je suis enclin à refuser que l’on puisse me punir pour une faute que l’on ne m’a pas expliquée. Si vous le permettez, voyons ensemble le problème ! Rien ni personne n’a jugé utile de m’expliquer les règles. Il se trouve que chaque instant de la vie comporte des pièges. Même pour les esprits avertis. Donc, non seulement je ne suis pas prémuni contre les pièges, et quand je tombe dedans, on me sanctionne. Pire, on me punit sans explication. Ce qui veut dire que j’ai toutes les chances de me faire reprendre en faute.

Ce que je décris là, c’est une réalité que je rencontre tous les jours. Vous serez peut-être surpris d’apprendre que dans une Rédaction, aucun journaliste ne souhaite interviewer un juriste. On en revient avec l’enregistrement d’un discours abscons dont il faut faire le montage sans trahir le propos de l’orateur. Un parfait casse-tête !

On peut considérer que vous avez bien fait de tirer la sonnette d’alarme, en quelque sorte. Tout un chacun a compris maintenant qu’on n’écrit pas ce qu’on veut. Mais, permettez moi d’aller plus loin et de vous faire quelques suggestions ! Elles ne seront pas toujours adroites. Toutefois, veuillez vous persuader que je suis sincère dans mes demandes !

Dans un premier temps, montrez un esprit de bienveillance en libérant ceux qui sont aujourd’hui dans les filets ! Cette clémence vous honorera, croyez moi ! Je ne saurais vous dire la formule judiciaire qui convient, mais je sais que je peux vous faire confiance.

Ensuite, il vous faudra, vous et vos collaborateurs et partenaires, baliser le chemin. Je vois bien que vous ne pouvez pas envoyer quelqu’un devant chaque internaute. Votre charge de travail est considérable et les budgets de nos administrations sont notoirement limités. Mais on pourrait utiliser une démarche qu’on appelle en agronomie "manger l’éléphant". Chaque jour un bout, en somme. Des journalistes outillés pourraient relayer votre message. Des responsables associatifs ont une capacité d’immersion dans les quartiers.

Enfin, et c’est le plus important : fixer une date butoir au-delà de laquelle le marteau pourra sévir. Là encore, je n’ai pas la moindre idée de ce que préconisent les textes. Mais je ne crains pas de vous faire confiance.

Mesdames les juges,
Messieurs les juges,
Croyez moi, je suis sensible à l’effort que vous avez dû faire pour lire ce texte. Veuillez me pardonner les insuffisances ici ou là. Car comme dit un proverbe de chez nous "yaam beh la pang kabeye". Traduction approximative : "la volonté ne manque pas, ce sont les moyens qui font défaut". Dans tous les cas, croyez bien que je vous ai écrit ces mots avec toute la sincérité dont mon coeur est capable.
Passez une bonne journée !

Sayouba Traoré

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