Lefaso.net : Voulez-vous bien vous présenter ?

Ben Moussa Boudane : Je suis Boudane Ben Moussa, promoteur du programme télé éducatif « Tableau d’honneur », en abrégé TH.

Quel est le concept de l’émission TH ?

Bien avant de répondre à votre question, j’aimerais saisir l’occasion pour faire un « gros coucou », comme on le dit dans notre jargon, à Lefaso TV et au Dr Cyriaque Paré qui fait partie des personnalités qui accompagnent le programme ; lui-même intervenant à l’université et dans l’encadrement de la jeunesse. Tableau d’honneur est un programme télé éducatif qui a plusieurs volets dont le premier est la réalisation d’un magazine télé de 26 minutes autour d’un élève modèle pour voir comment il travaille, qu’est-ce qui fait son succès scolaire, quel est son cadre de vie et quel est son cercle social. Cela permet aux jeunes téléspectateurs qui vont suivre le programme, d’apprendre aussi de ses pratiques.

Bien entendu, on le (l’élève étoile) prend dans un établissement scolaire pour montrer l’établissement scolaire. Egalement, dans ce numéro du magazine, on a la rubrique qu’on appelle « Métier de rêve » qui amène l’« étoile » (un élève excellent) dans le jargon TH, à aller à la rencontre d’une personnalité qui exerce déjà son métier de rêve. Donc si l’élève dit « je veux être plus tard avocat », on fait tout pour qu’il puisse rencontrer l’un des avocats les plus chevronnés du pays. Pareil s’il veut être ingénieur en télécommunications, journaliste...

Egalement dans cette émission, on a la rubrique « Coup de cœur », qui amène l’étoile à aller à la rencontre d’une personnalité de rêve, peu importe le domaine d’activité, pourvu que la personnalité soit au Burkina Faso. On a un deuxième volet qui se décompose en deux, il y a la plateforme d’émulation d’excellence (TH). Au bout de la diffusion de toutes les émissions de TH, on regroupe les enfants des treize régions à Ouagadougou, au cours d’un camp d’excellence. Durant ce camp, il y a une série activités au cours desquelles les enfants participent à des formations, des visites guidées d’institutions. Et on termine par la grande nuit de célébration de l’excellence scolaire qui est intitulée « la Nuit des TH ».

Comment sont sélectionnées les étoiles ?

Pour avoir l’étoile gravée sur la poitrine, comme on le dit de nos élèves modèles, ces trésors du système éducatif, il faut passer par un filet de sélection très serré. Chaque année, nous recevons environ 3 000 dossiers de candidatures pour 20 places. On a un comité de sélection qui est présidé par un enseignant chevronné, qui a près de 25 ans d’expérience, qui préside un comité de cinq personnes. Ils se penchent sur les dossiers de candidature que nous recevons et arrivent à extirper, sur une base de critères, les 20 qui feront l’objet de la saison.

Les candidatures commencent via les directions régionales de l’enseignement qui peuvent nous charrier les dossiers de candidatures, les établissements d’enseignement également ou les enseignants et certaines personnes nous contactent directement par plusieurs canaux. Soit téléphonique ou par whatsapp. Quand on est contacté par un canal différent des canaux officiels du système éducatif, non par les établissements d’enseignement, non par les directions régionales, nous faisons le chemin inverse pour aller vérifier l’authenticité des documents présentés à la candidature de cet élève-là.

Une fois que c’est agréé, c’est reversé dans l’ensemble des dossiers de candidature pour être soumis maintenant au travail du comité de sélection. Il faut noter que personne ne paie 5 francs pour passer à TH. Il n’y a que les résultats scolaires de cet élève qui permettent de le sélectionner. Ça fait que l’enfant, même quand il se trouve à Legmoin, derrière Gaoua, Niangologo, bref, dans les quatre coins du Burkina, nous nous y rendons gracieusement pour mettre en lumière cet élève qui fait des efforts pour exceller.

C’est vrai qu’il y a le travail de l’enfant qui est traduit par ses résultats scolaires, mais au nombre des critères de sélection, il y a la discipline. L’élève qui a déjà fait l’objet d’un conseil de discipline est ipso facto écarté parce que nous voulons que cette jeunesse, qui va bâtir le pays demain, soit à la fois compétente et comprenne c’est quoi le civisme, la discipline, et soit respectueuse de ces valeurs.

Comment sont désignées les personnalités de rêve ?

Dans la rubrique « Coup de cœur » où l’étoile va à la rencontre de sa personnalité de rêve, elle est choisie de façon très simple. Nous partons à la rencontre de la personnalité d’un élève. C’est l’élève qui nous propose d’entre tous les Burkinabè ou les personnalités résidentes au Burkina Faso, quelle personnalité est son coup de cœur. La personnalité de rêve, c’est le choix de l’élève étoile.

Le programme TH a maintenant 10 ans, quels bilans dressez-vous ?

Le bilan de 10 ans de TH est très satisfaisant parce que, d’entrée de jeu, nous avons voulu un programme télé éducatif qui soit quantifiable, contrôlable et mesurable. Quand nous regardons les résultats aujourd’hui où sur les 200 élèves étoiles durant les 10 ans que nous avons pu porter à l’écran, vous avez ceux de la première promotion qui occupent des fonctions très prestigieuses parfois dans les institutions très prestigieuses.

Je vous donne un exemple. Voici un jeune homme que l’on découvre à Zorgho, Karaga Oumar. Aujourd’hui, il est ingénieur logiciel à Google Silicone Valley. On a également Cissé Papa Ousmane que nous avons rencontré au lycée technique de Ouagadougou, qui est aujourd’hui à Renauld Industry où il pilote une équipe de près de 400 personnes, après avoir fait Airbus. Parmi eux, certains sont au Burkina Faso, notamment Arnaud Sawadogo qui a prêté serment comme étant le plus jeune architecte du Burkina Faso.

Aujourd’hui, il a son cabinet d’architecture qui emploie des Burkinabè. On a au passage Frank Tapsoba qui est un double ingénieur en BTP et hydraulique qui aussi aujourd’hui a créé une boîte qui emploie de jeunes burkinabè. Pour les autres promotions des étoiles, il y en a qui sont dans les quatre coins du monde. Sur les 200 étoiles révélées, le constat est largement positif. Le programme a pris du volume au fur et à mesure qu’on a avancé. On a des partenaires qui nous accompagnent de façon très remarquable, et le programme a pris du volume avec le temps.

Quel est le cachet spécial de ce 10e anniversaire ?

La nuit du dixième anniversaire de l’émission TH aura lieu le 8 février 2020 à la salle de banquets de Ouaga 2000. Et pour la première fois, elle se tient dans cette somptueuse enceinte et c’est déjà un grand pas pour nous. Cela, grâce aux partenaires. Nous allons, à cette nuit-là, accueillir, en termes d’invités, beaucoup de nos autorités qui croient que le développement de ce pays-là sera basé sur un capital humain apte et capable et bien formé, pour pouvoir relever les défis de développement de notre pays.

On aura exceptionnellement des reportages déjà calibrés, des success stories de quelques étoiles pour montrer à des jeunes burkinabè qu’on peut étudier à Tita ou à Titao et se retrouver plus tard, comme Sidiki Ganamé, à Oklahoma City en train de terminer ses études d’économie. La soirée sera impactée par des messages très forts. Je reste convaincu que le Burkina Faso est un pays de tous les rêves, il suffit qu’on se donne un peu de peine, on peut y arriver.

Quelles sont les difficultés rencontrées en 10 ans de parcours ?

En 10 ans, on ne peut pas dire qu’on n’a pas rencontré de difficultés. Seulement ces difficultés sont allées en s’amenuisant. Je me rappelle qu’en 2009, en portant le programme sur ses fonds baptismaux, il y a une étoile qui était à Bobo-Dioulasso, qui est aujourd’hui en France pour ses études. Il a eu pour personnalité de rêve, Monseigneur Anselme Titiama Sanou. Monseigneur était tellement séduit par l’architecture du programme qu’il nous a dit : « Croyez-y dur comme fer. Vous allez rencontrer des écueils sur votre chemin, mais n’abandonnez jamais ». Donc nous avons quitté l’archevêque avec une note de confiance. Toutes les épreuves que nous avons rencontrées, au lieu de nous décourager, nous réconfortaient. Jusqu’aujourd’hui, le programme jouit d’un relatif succès un peu partout.

Quelle est la situation des étoiles que vous avez mises en lumière ?

Nous avons voulu un programme qualifiable, qualifiable et mesurable pour pouvoir mesurer son aspect impact. En temps réel, nous sommes capables de vous dire où sont exactement les 200 étoiles, qu’est-ce qu’elles font. Et ce qui est intéressant ici, c’est que les premières promotions ont mis sur pied une association appelée « Association TH », qui enveloppe au fur et à mesure des années, les promotions qui viennent. Beaucoup de choses se passent au sein de cette association ; qui des opportunités de bourse, qui des encouragements quand le moral retombe. Au-delà de cela, il y a des sorties dans les établissements scolaires du Burkina Faso pour apporter le message de l’excellence et de la discipline.

Quels sont vos défis après 10 ans de parcours ?

Au bout des 10 ans, le programme va prendre une nouvelle bretelle. Certes, nous allons continuer à produire le magazine télé, nous allons faire beaucoup d’activités de proximité. Nous nous apprêtons même à organiser le symposium international de l’excellence scolaire de Ouagadougou.

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