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Convention des universitaires et experts du MPP : Un langage de vérité de praticiens aux politiques !

Publié le mercredi 24 août 2016 à 01h06min

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Convention des universitaires et experts du MPP : Un langage de vérité de praticiens aux politiques !

La Convention nationale des universitaires et experts associés (UEA) du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), tenue du 19 au 21 août 2016 à Ouagadougou sous le thème général « Pour une reconfiguration du système éducatif du Burkina Faso en phase avec les défis de son développement » a été sanctionnée par plusieurs recommandations adressées à la direction politique nationale du parti, parti au pouvoir. Pour les participants, il y a urgence à trouver solutions aux difficultés que vit le système éducatif national.

« Inscription effective de l’enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de l’innovation comme priorité à travers la création d’un objectif spécifique dédié dans le Plan national de développement économique et social (PNDES) », « mise en place d’un organe technique de finalisation d’un plan de financement et de mobilisation des ressources financières au profit de l’enseignement secondaire, supérieur et la recherche », « mise en œuvre des mécanismes de normalisation des années académiques tels que définis dans le cadre du Comité de concertation des établissements d’enseignement supérieur (CCEES) tenu les 08 et 09 juillet 2016 », « mise en place d’un dispositif de mutualisation des centres de formation professionnelle des différents départements ministériels pour accroître la capacité de formation du ministère de l’Education nationale et de l’alphabétisation (MENA) et du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de l’innovation (MESSRI) » et « mise en place d’un comité de suivi-évaluation des conclusions de la convention nationale des UEA tenue 19, 20, 21 août 2016 ». Ce sont-là, les recommandations formulées par les universitaires et experts associés à la direction politique de leur parti, le MPP.

Pour Pr Filiga Michel Sawadogo (co-parrain), qui a présidé la cérémonie de clôture, l’espoir est permis, parce que ceux qui ont formulé ces recommandations s’engagent eux-mêmes à participer à leur mise en œuvre. De son avis, en tant qu’enseignants, ces acteurs jouent un rôle essentiel et leur participation est donc un gage de succès de mise en œuvre de leurs recommandations. « Avant que le Convention ne se tienne, c’était prévu que les conclusions sont à remette à la direction du parti, qui va les analyser, les ordonner et proposer le calendrier de leur mise en œuvre et c’est à stade que le gouvernement intervient pour leur mise en œuvre », a précisé Pr Sawadogo, qui appelle de tous ses vœux, la résorption dès cette rentrée, des retards à l’Université. ‘’Il y a un problème visible qui est celui des retards dans les Universités. Il y a des filières dans lesquelles, ceux qui ont eu le BAC 2015, n’ont pas pu mettre les pieds dans les amphithéâtres jusqu’à ce jour. C’est vraiment gravissime. Nous allons poursuivre le travail et nous espérons d’ici octobre, avoir des mesures pour que tout le monde puisse aller dans les classes dans les délais. Quand vous faites une année dans le vide, même si vous étiez brillant, peut-être maintenant vous êtes devenu d’un niveau moyen. Le temps passé à ne rien faire peut vous conduire à adopter maintenant de mauvaises habitudes et à ne plus être un brillant étudiant’’, a scruté le ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de l’innovation. Pour lui, il est impératif de travailler à résoudre ce « système bancal », qui n’a pas de programme et où on ne sait quand commence et prend-elle fin l’année. C’est pourquoi a-t-il exhorté les enseignants à une implication effective pour une solution à cette situation.

« Nous avons, au cours de ces trois jours, assumé notre part de responsabilité. Et cette responsabilité, c’est d’éclairer les politiques, sur le chemin à suivre pour reconstruire notre système éducatif. Veuillez également leur dire, qu’il leur revient d’assumer leur responsabilité en tant que politiques ». C’est, essentiellement, en ces termes que le coordonnateur national des UEA, Pr Jean-Marie Dipama, a simplement engagé les responsables de son parti.

Oumar L. OUEDRAOGO
Lefaso.net

Le Coordonnateur national des UEA, Pr Jean-Marie Dipama, donne des détails sur la Coordination nationale des UEA.

Lefaso.net : Pouvez-vous présenter la Coordination des Universitaires et experts associés ?

Pr Diapama Jean-Marie : C’est un organe du parti, qui regroupe les universitaires et les enseignants au niveau du supérieur qu’on appelle les universitaires et les experts associés. Les experts associés, ce sont ceux qui ont un niveau de compétences élevé mais qui officient ailleurs que dans les Universités : experts comptables, spécialistes des sciences de l’éducation qui sont dans le privé. Ce sont des compétences qu’on ne peut pas laisser de côté parce qu’elles peuvent contribuer à nourrir la réflexion à même d’alimenter tout ce que nous avons comme programme.
Pour comprendre la Coordination, il faut noter qu’à la création du MPP, ses fondateurs ont approché des intellectuels de ce pays, pour dire qu’ils ont l’intention de créer un parti mais qu’ils ont fait le constat que pendant longtemps, les intellectuels sont restés en marge de la politique. Que de ce fait, ils souhaiteraient que ce pays-là puisse désormais compter sur le potentiel intellectuel local. Au départ, on avait une certaine réticence ; parce que nous n’avons pas l’habitude de la politique, nous sommes novices sur ce terrain (nous ne savons faire qu’enseigner et la politique, c’est l’espace des intrigues et ça, ce n’est pas notre fort). D’échanges en échanges, nous avons également posé nos exigences ; quel est le niveau de fiabilité qu’on peut avoir vis-à-vis d’eux ? Ce n’est pas qu’on refuse de contribuer à la réflexion pour le développement du Burkina, mais encore faut-il que nous ne soyons pas utilisés comme des faire-valoir du parti à des fins politiques. Ce problème a été posé et il a fait l’objet de débats avec le camarade Salifou Diallo. Après réflexions, les gens se sont dit, pourquoi pas, pour une fois essayons ; parce que c’est plus facile aussi d’être-là à critiquer. On s’est dit qu’on peut aller, essayer, en restant toujours sur notre objectivité intellectuelle à guider, à éclairer les politiques autant que faire se peut, dans la mesure de leur volonté. C’est ainsi que nous avons pris corps et nous nous sommes organisés pour l’accompagnement du parti. La coordination, c’est la faîtière d’un ensemble d’organisations qui commencent de la base avec des cellules reparties au niveau des universités publiques et privées ainsi que des sociétés où nous avons des experts. Nous avons trois grands regroupements qu’on appelle des cellules qui, rassemblées, forment la section. Nous avons à ce titre, une section à Ouagadougou, une à Bobo-Dioulasso et une autre à Koudougou. C’est l’agrégation de ces trois sections qui forme une structure faîtière qui est la coordination nationale des Universitaires et experts associés, un organe rattaché à la direction politique du parti.
Notre travail, c’est de faire l’éclaireur. C’est une cellule de veille qui est à la disposition du parti pour des besoins de réflexion, dans quel que domaine que ce soit (nous avons l’expertise et la compétence). Si c’est pour réfléchir pour construire ce pays, c’est le sens de notre existence et c’est ce qui nous a valu de nous engager dans ce parti. On n’est pas entré parce qu’on veut des postes. Non ! On ne voit pas ce que la politique peut nous donner de mieux que ce que notre carrière nous a octroyé.

Lefaso.net : La Convention est votre première activité d’envergure …. ?

Pr Diapama Jean-Marie : Non. Elle est la troisième activité. Nous avons eu plusieurs activités dont des panels organisés bien avant même la campagne présidentielle. Le premier panel a eu lieu à Bobo en mai 2015 pour réfléchir sur les maux du système éducatif et les défis majeurs, une réflexion en juillet 2015 à l’Université de Ouagadougou sur les défis économiques. Nous avons également des rencontres ponctuelles pour débattre de tel ou tel autre problème et dès lors que le parti nous sollicite. Nous avons été beaucoup sollicités pour contribuer à l’élaboration de certains volets du programme présidentiel. Donc, ce n’est pas la convention la première activité. C’est lié à un besoin urgent du moment ; parce qu’étant acteurs du système éducatif, nous voyons les problèmes qui se situent à ce niveau et également les risques qui se profilent. Quand vous venez au campus pour regarder comment vivent les étudiants, en tant qu’enseignants, en tant qu’éducateurs et en tant que parents, ce n’est pas une situation viable. Il est de notre responsabilité de réfléchir à offrir de l’espoir à ces enfants ; qu’ils ne soient pas là à attendre le mois d’août pour faire les concours de la Fonction publique parce qu’on ne leur offre aucune autre alternative. C’est aussi le sens de cette réflexion et c’est de façon volontariste que nous avons décidé de tenir ce cadre pour amener les gens à bouger. Dans le programme présidentiel, il est bien dit qu’on va donner une priorité à l’éducation. Mais, ça fait huit mois et on ne voit rien bouger. Nous sommes des acteurs du terrain et ce n’est pas parce que nous sommes du parti que nous allons fermer les yeux sur ça. Nous sommes-là pour se dire les vérités et c’est dans ce sens que nous nous sommes engagés.

Lefaso.net : … D’où votre appel à chaque partie d’assumer ses responsabilités devant l’histoire !

Pr Diapama Jean-Marie : Nous avons un devoir de vérité. On se dit les vérités et c’est tout ; ce n’est pas parce que nous sommes dans un cadre solennel qu’on va faire la langue de bois. Non ! Disons-nous les choses crûment, parce que c’est à force d’enrober, de diplomatie que, peut-être, on est toujours-là ! Mais, si on se dit les choses, on se situe les responsabilités, après chacun assume. C’est tout. Le béni oui-oui, ce n’est pas par nous (personnellement, je ne me sens pas concerné par ça).

Lefaso.net : A l’ensemble des acteurs, quel peut être le message de la coordination ?

Pr Diapama Jean-Marie : Nous avons l’obligation de travailler à redonner confiance à notre jeunesse ; nous tous, autant que nous sommes. On est tous fils de pauvre. C’est parce que nous avons bénéficié d’un système éducatif qui, à un moment donné, était viable, que chacun est arrivé là où il est aujourd’hui. Et nous ne sommes pas enseignants s’il n’y a pas d’étudiants. Ça ne fait pas plaisir de voir des étudiants arrêtés-là, tout affamés, tout aigris, les yeux rouges, agressifs. C’est parce qu’ils n’ont pas confiance, ils ne savent pas où aller. C’est une question de volonté politique ; on décide et on assume. On décide de ce que nous voulons du système éducatif. Moi, personnellement (et ça n’engage que moi), je préfère qu’on prenne 100 personnes et qu’au bout du compte, on ait 60 personnes bien formées que de prendre 1000 personnes et qu’au finish, on est 20 personnes bien formées. C’est ce qui se passe actuellement. Nos amphis sont bondés et dans certaines filières, vous avez trois à quatre mille étudiants mais au bout du compte, c’est peut-être 500 qui sortent. Quand vous faites le ratio, c’est trop faible. Cette déperdition est liée à quoi ? On ne peut pas accuser à l’infini, les infrastructures. Non. Il faut qu’à un certain moment, chaque acteur puisse se remettre en cause. Que chaque acteur puisse, à un certain moment, faire donc son introspection et surtout dire : qu’est-ce que je peux apporter à ce système, du meilleur de moi-même. C’est est ce prix-là qu’on espère sortir de ce bourbier éducatif.

Oumar L. OUEDRAOGO
(oumarpro226@gmail.com)
Lefaso.net

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