Sculpture sur arbres morts : La "résurrection" par la beauté
Présidence du Faso, Mess des officiers, ciné Burkina, Office de santé des travailleurs. A proximité de ces lieux, trônent depuis plus d’une semaine, des sculptures déjà superbes en cours d’achèvement. L’originalité de ces œuvres, c’est d’être incrustées dans des troncs de caïlcédrats morts.
Cette nouvelle forme d’expression artistique appelée "résurrection" ajoute un trait au raffinement de la ville de Ouagadougou et fait résurgir la quintessence de la beauté. Une beauté qui se veut éternelle car pour l’artiste Grégoire Sawadogo, au plus profond de l’arbre, se trouve une âme vivifiante et tonifiante...
"Notre mission à Ouagadougou est dénommée résurrection ; pas celle de la chair ou du Christ ; mais celle des bois morts. Elle consiste à donner une seconde vie à l’arbre. En effet, il n’y a pas de raison qu’un caïlcédrat vive 40 ou 50 ans et qu’un beau matin sous le poids de l’âge et des intempéries, il s’écroule et s’efface complètement de la mémoire des gens. L’arbre pour nous est d’une richesse inépuisable et il faut l’immortaliser (...)".
Ces mots sont de M. Grégoire Sawadogo le "résurrecteur". Spécialiste des arbres au "coma profond" et formateur en art plastique, il est le maître d’œuvre de cette équipe d’une vingtaine d’artistes qui forcent actuellement l’admiration de nombreux Burkinabè avec leurs belles sculptures. Cette initiative est soutenue par le maire Simon Compaoré et le parc urbain Bangr-Wéogo à travers son premier responsable, Moustapha Sarr. Elle s’inscrit dans la dynamique du Sommet de la Francophonie que le pays abritera en novembre prochain.
La capitale burkinabè devant être attrayante pour les nombreux visiteurs qui prendront part à ce grand rendez-vous du "donner et du recevoir", c’est dans cette optique que Grégoire Sawadogo a entrepris d’exposer à travers ses œuvres, un pan des réalités socio-culturelles du pays des Hommes intègres. Ainsi rend-il hommage aux Engagements nationaux (soutien à l’agriculture, à l’élevage, à l’emploi...) au Mess des officiers.
A la clinique des travailleurs, c’est la problématique de la santé qui est mise en exergue, cela parce qu’"un homme plein de santé vaut tout l’or du monde" ! La sculpture du ciné Burkina renvoie à toute cette mosaïque culturelle et ethnolinguistique qui caractérise le Burkina Faso. Enfin, l’œuvre de la présidence voudrait rappeler le calvaire des femmes africaines face à l’inaccessibilité à l’eau potable.
Appréhender la symbolique à travers la forme de l’arbre...
Pour Grégoire Sawadogo, il n’y a pas de sources précises d’inspiration. "Dès lors que je vois un arbre, la configuration de mon œuvre se dessine tout de suite dans ma tête ; cela par expérience et aussi par un petit secret qui est en moi". Habituellement, le "résurrecteur" s’attaque directement à ses arbres. mais pour cette fois-ci, il procède par croquis afin que les jeunes qui l’aident et qu’il forme personnellement, puissent s’approprier très facilement le mécanisme.
Le repérage des arbres se fait en fonction de leur résistance. Et une fois un arbre repéré, celui-ci est pulvérisé avec de la sillogile et du carbonile (produits qui servent à tuer les bêtes ; notamment les termites). Après cela, les trous dus à l’activité des rongeurs sont vite mastiqués. L’arbre est par la suite "déshabillé" de son écorce. Et c’est alors que commencent les coups de maillet, de marteaux, les va-et-vient des scies... Une fois l’œuvre achevée, une autre technique est prévue.
D’abord, des produits sont mis au niveau des racines pour l’entretien de l’arbre, ensuite, le contour est décoré par du vernis marin qui résiste pendant de longues années à l’eau. "Ce produit est une garantie totale contre la perforation de l’arbre", lance Grégoire Sawadogo. La mission "résurrection" devrait s’achever le 15 octobre prochain. Mais avec plus de moyens, les artistes sont encore prêts à s’attaquer à dix (10) autres arbres avant le 20 novembre.
Grégoire Sawadogo estime que ce qu’il fait présentement n’est "rien", comparé aux nombreux projets qu’il a. Il s’agit entre autres, de la construction d’un grand site touristique au Burkina Faso (et qui serait unique en Afrique) ; et de l’érection de trois monuments. Le premier, colossal et lumineux, devrait être situé au Boulevard de la Francophonie. Le deuxième, grand baobab, dont les branches serviraient de feux tricolores, est prévu pour être situé à Nongremassom et enfin, le dernier rendrait hommage au général Charles de Gaulle et serait en face de l’avenue qui porte ce nom. "L’art me donne entièrement satisfaction et me permet d’apporter plus de poids au rayonnement de mon pays sur la scène artistique et culturelle du monde".
Grégoire Sawadogo ne pouvait pas mieux dire car au Burkina Faso, on ne joue pas avec la culture, car (et André Malraux l’a écrit) "elle est ce qui fait de l’homme autre chose qu’un accident de l’univers".
Arsène Flavien BATIONO (bationoflavien @ yahoo.fr)
Sidwaya