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Enseignement primaire : 58% des enseignants sont peu qualifiés"

Publié le jeudi 15 juillet 2004 à 07h46min

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Du 5 au 10 Juillet derniers s’est tenu à Koudougou un atelier de
formation du Syndicat national des enseignants africains du
Burkina (SNEA-B) sur l’école pour tous (EPT). Dans l’interview
qui suit, le Secrétaire général du SNEA-B, Jean Kafando, donne
des précisions sur le concept et dit pourquoi sa structure
s’intéresse à cette politique.

"Le Pays" : Pouvez-vous nous dire en quelques mots ce qu’est
l’école pour tous (EPT) ?

Jean Kafando : L’EPT est une recommandation que toute la
communauté internationale s’est faite à Dakar en avril 2000.
Comme quoi il faut faire en sorte que tous les enfants de la
planète aient accès à l’éducation.
Son intérêt est que l’éducation est la clé du développement. Un
pays dont le peuple est analphabète, où les enfants n’ont pas
accès à l’école est un pays condamné à rester dans la misère et
la pauvreté. C’est pourquoi l’ensemble de la communauté
internationale : les institutions républicaines, les gouvernants,
les ONG, les organisations syndicales, l’ensemble de la société
civile, s’est réuni à Dakar pour dire qu’il est grand temps que les
moyens et les efforts soient mis en oeuvre pour que tous les
enfants aient accès à l’école.

Le SNEA-B en fait une préoccupation, parce qu’au-delà des
revendications corporatrices, nous sommes acteurs de la
société civile et l’intérêt de notre pays et de celui des enfants de
ce pays doivent constituer une préoccupation pour nous. Nous
avons donc estimé que nous devons faire de l’EPT notre cheval
de bataille pour que notre pays connaisse des lendemains
meilleurs.

Le SNEA-B ne privilégie-t-il pas la protection du système
éducatif plutôt que l’amélioration des conditions de vie et de
travail des enseignants ?

Pas du tout. Ce sont des actions qui s’imbriquent. Quand on se
bat pour la qualité de l’éducation, on se bat pour l’amélioration
des conditions de vie et de travail des enseignants. On ne peut
pas avoir la qualité si les enseignants ne sont pas motivés, bien
logés etc. C’est un tout cohérent.

Vous avez commandité une étude sur le rapport qualité de
l’éducation et qualification des enseignants. Quel est le résultat
de cette étude ?

Nous avons demandé cette étude pour faire voir la corrélation
entre qualité de l’éducation et qualification des maîtres. Parce
que, voyez-vous, il y a des théoriciens qui peuvent croire qu’il n’y
a pas de lien. Il y a des gens qui ont fait sortir des théories pour
dire que n’importe qui peut enseigner, des volontaires peuvent
enseigner. C’est pour réfuter ces thèses-là que nous avons fait
cette étude pour prouver le contraire. L’étude révèle que les
enseignants bien formés produisent des rendements scolaires
meilleurs par rapport à ceux qui n’ont aucune qualification.
L’aspect important qu’il faut voir, c’est la qualité de la formation
que ces enseignants reçoivent.

Que dit votre étude par rapport au taux d’enseignants bien
formés ?

Les statistiques montrent clairement que les enseignants peu
qualifiés sont plus nombreux. Le taux est de 58,65% ; ceux-là
qui ont un badigeonnage pédagogique et il y a même d’autres. :
ceux dont on ne connaît même pas la qualification.

Mais à
l’allure où nous allons aujourd’hui avec les 6 mois de formation,
si dans 10 ans ceux que nous considérons comme qualifiés
vont à la retraite, les choses vont empirer. Parce qu’avec la
formation au rabais que nous avons, on ne peut que avoir des
résultats faibles. Et ce qui est écoeurant, c’est que ceux-là qui
viennent avec ces genres d’idées, qui soutiennent que même en
3 mois on peut former un enseignant. Pourtant, chez eux la
formation se fait en 3 ans.

Selon votre étude, les enseignants sont mal formés au Burkina.
Pourtant depuis deux ans, nous enregistrons de très bons
résultats au certificat d’études primaires (CEP)...

Je crois qu’il n’y a pas de contradiction. Le taux de succès au
CEP est un fait. Mais il n’y a pas que çà ! Il n’y a pas que le taux
de succès au CEP pour dire que le système éducatif se porte
bien. Il y a bien d’autres aspects plus importants. Même parmi
ceux-là qui réussissent au CEP, il y a une minorité qui accède à
l’enseignement secondaire. Et le reste, qu’est-ce qu’il sait faire ?
A quoi sert-il à la société ? Est-ce que l’école d’aujourd’hui
répond aux besoins et aux attentes des populations ? C’est bien
que ces dernières années les collègues se défoncent. Chacun
joue sa partition pour qu’on ait des taux de succès assez
importants.

Que dit l’étude par rapport aux conditions de vie des travailleurs
 ?

L’étude a fait des recommandations. Parmi ces
recommandations il est question de ramener la durée de la
formation dans les écoles de formations à deux ans minimum.
L’étude recommande qu’on augmente le nombre des
instituteurs principaux (IP) sur le terrain. En augmentant la
formation à deux ans, le problème de rémunération va se
résoudre. L’enseignant aura une classification supérieure et
une rémunération importante.

Selon les nouvelles dispositions c’est en principe cette année
que les diplômes universitaires doivent être pris en compte pour
les concours professionnels. Est-ce que vous avez des
précisions sur le sujet ?

Jusqu’à l’heure où je vous parle, rien n’est fait pour que cette
disposition soit appliquée cette année. A ma connaissance, il y
a tout un travail préalable qui doit être fait au niveau de la
Fonction publique et je crois qu’à une des rencontres, on nous
avait rassurés que la question n’était pas à l’ordre du jour. Et
comme vous savez, il est question de relire la loi 013. Il y a déjà
eu plusieurs rencontres autour de cette question et dans la
relecture de la loi 013, je crois que ceci est une disposition qui
sera enlevée. Il y a d’autres corps qui sont concernés. Et comme
on n’a pas changé de mode de recrutement, il sera difficile
d’appliquer cette disposition.

Le Pays

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