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Affaire Kossouka : Il ne faut rien exclure a priori

Publié le lundi 1er décembre 2008 à 05h02min

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Depuis le mois d’octobre, il est question d’une tentative d’assassinat, ou plutôt d’une présumée tentative, sur la personne de Travaly Bandja, le représentant de British American Tobacco (BAT) au Burkina.

Selon l’affaire, narrée dans la presse à grand renfort de "selon", de "sources concordantes", de "Dame Rumeur", comme les journalistes savent bien le faire, les noirs desseins devaient se réaliser dans la nuit du 8 au 9 octobre 2008, mais, pris de remords, le vigile de l’agence de gardiennage "Force de sécurité et de protection", commis à la basse besogne, aurait rengainé avant d’aller se mettre à table à la gendarmerie qui, en deux temps trois mouvements, aurait rondement mené l’enquête et expédié 6 personnes à la Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou (MACO).

Dont le vigile en question et un certain Issouf Ouédraogo, réputé proche de Salif Kossouka Ouédraogo, patron de NESKO, qui est en relation d’affaires avec... BAT. Et voilà lâché le nom de ce jeune opérateur économique de 36 ans dont l’ascension fulgurante dans le monde des affaires alimente, il est vrai, les commentaires, les suspicions et... les convoitises.

La légende veut qu’il ait commencé petitement à 14 ans à Bobo-Dioulasso en vendant des piles, du riz et d’autres denrées. Une vingtaine d’années plus tard, il est à la tête d’une véritable holding qui comprend SKV (Société Kossouka Voyage), créée en 2002, les Grands Moulins du Burkina (GMB) relancés en 2008 et surtout NESKO (principal filiale du groupe avec 60% de son chiffre d’affaires), qui est le représentant exclusif de Nestlé au Burkina (avec des produits comme Nescafé, Maggi, Guigoz) en même temps qu’il détient l’exclusivité des produits de BAT, objet de la présente affaire.

Toutes les pistes, sans le moindre doute, convergent vers Salif Kossouka, du nom de ce village du Yatenga dont il est originaire. Il faut certainement se garder de le disculper à bon compte, de lui donner le bon Dieu sans confession, car rien n’est impossible, surtout dans le milieu du business, où les gens sont parfois prêts à tout pour parvenir à leurs fins. N’empêche, il faut quand même se méfier des évidences, et le plus curieux, c’est que personne ne se soit posé la moindre question sur ce qui a l’allure d’un roman policier peut-être cousu de fil blanc. A commencer par celle-ci : suffit-il qu’un quidam, comme on dit, aille dire à le maréchaussée que X a dit d’aller tuer Y pour que ce soit parole d’évangile, surtout qu’aux dernières nouvelles, le "tueur à gages" s’est rétracté ? Et s’il a affabulé, à quelles fins était-ce ?

Mais, on le sait, il n’y a pas de présomption d’innocence pour des gens comme Kossouka. Juste bon pour l’échafaud, il ne peut qu’être coupable de ce dont on l’accable. Il semble que NESKO devait la bagatelle de 1,6 milliard de francs CFA à BAT (et non au sieur Travaly), mais quand bien même ç’aurait été ce dernier intuitu personae, ce n’est pas en éliminant son créancier que la créance disparaît. Du reste, à ce qu’on dit, NESKO avait déposé une caution de quelque 2 milliards qui couvre donc largement le montant litigieux sans oublier que quand l’affaire éclatait, l’incriminé devait se rendre à Londres même pour aplanir le différend.

Alors question : et si tout cela n’était que cabale, si ce n’était que du pipeau pour déstabiliser quelqu’un et, au passage, récupérer tout ou partie de la distribution des produits BAT, sur lesquels lorguent beaucoup de gens, lesquels ont d’ailleurs tenté, il y a quelque temps, de s’y inviter, mais sans succès ? Déjà, le contrat d’exclusivité qui lie NESKO à BAT n’est pas encore formellement rompu, mais les rapports sont bloqués.

Autre piste possible, ses parrains politiques, comme on l’entend, l’ont peut-être lâché à moins qu’ils ne veuillent, eux-mêmes, récupérer le gombo frais de BAT et, qui sait, le couler, puisqu’on apprend que deux banques de la place ont vite fait de sortir les ardoises de Kossouka, qui leur devrait la rondelette somme de 4 milliards. Comme on dit, un malheur ne vient jamais seul, surtout que les bonnes volontés ne manquent jamais pour tirer les ficelles en sous-main afin que le ciel vous tombe dessus.

Il faut donc se garder, dans cette affaire d’assassinat présumé, de donner un blanc-seing à Salif Kossouka, mais il faut aussi ne rien exclure à priori. Car celui qu’on veut liquider pourrait ne pas être celui qu’on pense. Cela dit, le séjour prolongé à l’étranger de l’intéressé ne joue pas pour lui et il gagnerait sans doute à regagner le bercail et à organiser sa défense.

La rédaction

L’Observateur Paalga

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