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Crise universitaire : Crise des ego

Publié le lundi 1er septembre 2008 à 20h04min

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« SLT Camarade. Resté vigilan é mobilisé otour de notr plateform revandicativ. Ns som proche d la victowr. Non à 1 campus fantome. Envoi le o maximum de camarad ». Voici le SMS que l’ANEB ferait circuler actuellement pour maintenir la mobilisation au sein de ses troupes et que l’usager lambda de ce style d’écriture que nous sommes tous désormais décrypte aisément. Au lendemain du communiqué des autorités universitaires annonçant la reprise des cours, voilà qui n’annonce pas un retour prochain de la sérénité dans les amphis.

En effet, c’est désormais officiel, les activités académiques et pédagogiques « suspendues » le 27 juin, selon le vocabulaire officiel, reprennent le 1er septembre. Le communiqué, signé des présidents des universités de Ouaga et Ouaga II, prévoit la rentrée 2008-2009 pour décembre et janvier selon les différents UFR. Mais à une semaine de cette reprise annoncée, le combat des ego continue sur le campus. Et la guerre est loin d’être finie.

L’assemblée générale convoquée par l’ANEB à la Bourse du travail en a donné une illustration. Moumouni Déra et ses camarades ont réaffirmé leur fermeté à continuer leur lutte. Si c’est seulement après l’assemblée générale du 30 août que l’on saura définitivement si le mouvement est pour la reprise ou pas, il est déjà clair qu’il n’entend pas baisser la garde. Ainsi, à la Bourse du travail ce 18 août, les responsables de l’association ont été clairs face aux quelque 4 000 étudiants présents. Il n’y a aucune avancée dans le traitement de leurs revendications, clament-ils. Ils exigent la reprise des cours à leurs conditions, à commencer par le départ des forces de l’ordre du campus, la réouverture des cités et le traitement diligent des plates-formes des UFR/SVT et SEA, qui ont été le détonateur de cette crise.

Pendant ce temps, le mur en béton armé du campus de Zogona monte et monte avec certainement la perspective de battre le record de réalisation d’un tel ouvrage ; car on a rarement vu une telle rapidité. Jean Kouldiati et ses collaborateurs semblent, en effet, sourds aux critiques de Moumouni Déra et de ses camarades et mènent leur programme comme si de rien n’était. Les chiens aboient, la caravane passe.

Ainsi, ceux qui ont le loisir ou la curiosité de passer par Charles-de-Gaulle peuvent admirer la nouvelle clôture de l’Université de Ouaga avec ses belles inscriptions dignes des sculptures de Laongo. Rien à voir donc avec le mur fictif d’Alfred Traoré construit à coups de centaines de millions que personne n’a jamais vu.

A l’intérieur de ce mur, d’autres travaux sont en cours avec la même célérité insoupçonnée chez nos maîtres d’ouvrage universitaires. La cité de Zogona, construite en plein cœur du campus, a été « balayée », comme disent les étudiants. Mais elle est en voie de transformation, constateront les observateurs avec pour objectif de transformer les chambres d’étudiants en bureaux pour les enseignants et en laboratoires. Les amphithéâtres dont le « vrai gars » Tertius Zongo avait posé la première pierre en février sont en voie de finition définitive et devraient être ouverts aux étudiants à la rentrée. D’autres cités comme celles de Tampouy et de Gounghin I ont été fermées pour cause d’insalubrité ou d’inaccessibilité. Les étudiants, promet-on, seront relogés ailleurs.

Alors, de quoi se plaignent les étudiants, devrait-on leur demander ? Puisque, à en croire les travaux en cours, tout est fait pour leur rendre la vie belle ?! Moumouni Déra et ses camarades se plaignent de ne pas être consultés. « ... jusqu’à présent, les autorités n’ont pas essayé de nous contacter pour proposer des solutions concrètes de sortie de crise. Les propositions de solution, nous les apprenons à travers la presse et c’est un peu difficile de nous fier à ça », dénonce-t-il ainsi dans les colonnes de notre confrère San Finna.

Après les multiples appels lancés aux deux protagonistes, chacun semble décider à bouder l’autre. Car il n’y a pas de doute qu’il y a eu des avancées depuis ce fatidique 27 juin qui a vu la prise de mesures indiscutablement excessives comme pour punir les étudiants pour leur insolence. S’il y a eu des efforts financiers, matériels, physiques consentis par les acteurs pour une reprise des activités académiques et pédagogiques, il reste un dernier effort à accomplir, celui sur leurs ego, pour réintroduire le dialogue et ramener la paix. Jean Kouldiati et Moumouni Déra devraient arrêter de jouer aux enfants gâtés et prendre, chacun, la mesure de ses responsabilités. Il y va de leurs crédibilités respectives.

Quels que soient les travaux réalisés sur le campus, il faudra bien revenir au dialogue avec les étudiants pour ramener définitivement la sérénité dans les amphis, et donc passer par l’ANEB. Car, malgré les tombereaux d’injures déversés sur cette association ces derniers jours dans la presse, elle reste la plus représentative des étudiants. Les structures « gâteaux » créées à chaque crise ne l’enterreront pas de sitôt. Mais Déra et ses camarades savent aussi que la résistance a des limites et que la lassitude est palpable chez la majorité des étudiants dont un nombre non négligeable s’est jeté sur les concours avec la ferme intention d’aller voir ailleurs. Alors, que chacun jette son ego par-dessus le nouveau mur et vivement le retour de la sagesse dans le temple du savoir. Chacun y gagnera.

A. Traoré

Journal du jeudi

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